Billet de blog 20 août 2025

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Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

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"Il Ferroviere" de Pietro Germi

Sandrino, 8 ans, observe le délitement de sa famille alors que son père conducteur de train dépendant à l'alcool va perdre son emploi, que sa grande sœur enceinte est contrainte à se marier alors qu'elle n'aime pas son époux, que sa mère qui tente sans trop d'espoir de conserver les liens avec ses enfants malgré les foudres de son époux, etc.

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Illustration 1
Il Ferroviere de Pietro Germi © Carlotta Films

Sortie Blu-ray : Il Ferroviere de Pietro Germi

Peut-être l'un des derniers grand témoignages du néoréalisme italien, Il Ferroviere (1956) de et avec Pietro Germi, fut un succès public important à son époque qui n'entraîna pas de la part du cinéaste la poursuite de ce genre, puisqu'il réalisa ensuite des « comédies italiennes » promises également à un grand succès à l'instar de son Divorce à l'italienne (Divorzio all'italiana, 1961).

Il Ferroviere naît ainsi de la volonté autonome d'un réalisateur-acteur et de son coscénariste de raconter une histoire largement inspirée de la vie des cheminots à partir d'observations réelles. Le rapport entre un jeune garçon et son père dont la stature charismatique à son égard va peu à peu décliner, n'est pas sans rappeler le tendre amour filial dans Le Voleur de bicyclette (Ladri di biciclette, 1948) de Vittorio de Sica mais avec des intentions différentes. En effet, le ton mélodramatique qui voit tout le délitement d'une famille modeste italienne à partir du regard d'un enfant qui a du mal à interpréter tout ce qui est en train de se passer mais qui n'en est pas moins profondément affecté, est au cœur de l'intrigue et rend poignante chacune de ses scènes.

Le film ne se situe pas non plus dans la peinture sociale fataliste d'un Zola et son adaptation à l'écran de La Bête humaine (1938) de Jean Renoir mais s'ancre davantage par des destins individuels dont les choix peuvent les faire passer pour des traîtres à leur cause puisque le père Marcocci interprété par Pietro Germi est accusé, infamie ultime, d'être un « jaune », un briseur de grève. Le syndicalisme n'est plus ici le rêve d'un monde meilleur, le point de vue se situant davantage dans le sursaut possible du sens de la famille et les amitiés masculines dépassant leurs moments de beuverie inclusive dans un bar d'habitués.

Pietro Germi livre une peinture large pétrie d'humanité de tout un microcosme avec une grande précision dans le trait, avec un sens dramatique développé avec une rigoureuse rythmique du montage et un sens du cadre qui privilégie la dynamique entre les personnages et met en valeur les sensations d'enfermement et d'ouverture dans des lieux clos ou dans la rue. Près de soixante-dix ans plus tard, le film de Pietro Germi n'en a pas fini d'émouvoir par sa peinture détaillée d'un microcosme humain en saisissant au plus près une dynamique familiale patriarcale où la mère au foyer est le pilier souffre-douleur sacrifiant son propre épanouissement tout en espérant que la nouvelle génération ne suive pas le même chemin.

Illustration 2

Il Ferroviere (Le Disque rouge)
de Pietro Germi
Avec : Pietro Germi (Andrea Marcocci), Luisa Della Noce (Sara Marcocci), Edoardo Nevola (Sandro Marcocci, dit "Sandrino"), Sylva Koscina (Giulia Marcocci), Renato Speziali (Marcello Marcocci), Carlo Giuffré (Renato Borghi), Saro Urzì (Gigi Liverani), Lilia Landi
Italie – 1956.
Durée : 115 min
Sortie en salles (France) : 29 novembre 1957
Sortie France du Blu-ray : 19 août 2025
Format : 1,37 – Noir & Blanc
Langue originale : italien - Sous-titres : français.
Éditeur : Carlotta Films

Bonus :
préface de Jean A. Gili
Bande-annonce originale

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