
Parce que la période estivale est souvent synonyme de trêve pour les éditeurs (et par conséquent pour les critiques), en attendant une rentrée qui s’annonce d’ores et déjà riche en parutions marquantes, Comic Strip vous propose sa sélection d’albums à ne pas oublier...

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DMZ - Sur le terrain - Le corps d'un journaliste

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Premier Comic book de l’artiste italien Ricardo Burchielli aux Etats-Unis, co-réalisé avec Brian Wood, DMZ a paru pour la première fois aux USA en 2005 et en France chez Panini en 2007, les deux premiers tomes viennent d’être republiés chez Urban Comics (collection Vertigo). La « DMZ » («DeMilitarized Zone ») est située sur l’île de Manhattan où ne vivent plus que 400 000 personnes qui n’ont pu être évacuées au moment du déclenchement de la seconde guerre civile (entre les États-Unis d'Amérique et les États Libres).
En la personne du jeune héros, Matthew Roth, photographe contraint de rester au cœur de la Zone, l’Amérique se dote d’un regard. Il va découvrir (et rapporter) le quotidien des insurgés, les luttes internes… La presse aux ordres, l’omerta, les manœuvres politiciennes, la lâcheté des dirigeants sont autant de thèmes chers à Brian Wood. Dans une Amérique post 9/11, marquée par Katrina et la guerre en Irak, survivre est devenue la seule préoccupation. Somptueux récit d’anticipation, DMZ tient à la fois du récit post-apocalyptique et du pamphlet antimilitariste.
- DMZ, de Brian Wood et Ricardo Burchielli, Urban Comics, T1 Sur le terrain 118 pages couleur, 14 € / T2 Le corps d'un journaliste, 139 pages couleur, 15 €

La peau de l’Ours
« En amour, il n’y a pas de date de péremption. Il n’est jamais trop tard pour tomber amoureux ». Tel est le conseil adressé par Don Palermo à Amadéo. Comme une sentence. Le jeune Amadeo vient chaque jour lire son horoscope au vieil homme qui a perdu la vue il y a bien longtemps. Ce dernier décide un beau jour de raconter un peu de son passé au jeune homme. D’une époque où il est question de mafia, d’un ours, d’amour et de vengeance.
Oriol et Zidrou ont réalisé un album de genre, une fable cruelle ; La peau de l’ours renvoie au Parrain de Coppola, évoque Steinbeck et les pulp magazines. Le scénario utilise habilement les codes de la littérature policière et distille une intrigue où les souvenirs, le passé, sont autant de clés pour le lecteur. Une histoire finement mise en images qui joue admirablement avec la lumière et la part d’ombre de chacun des protagonistes.
- La peau de l'ours, de Zidrou et Oriol, 64 pages couleur, Dargaud, 14,99 €

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Daytripper, au jour le jour
Et si chaque jour qui s’annonçait était le dernier de votre vie ?
Somptueux roman graphique à la structure complexe, Daytripper est une quête introspective, un livre qui interroge notre rapport à la vie, à la mort, à la destinée.
Brás est écrivain, journaliste spécialisé dans l’écriture de nécrologies. La mort des autres est en quelque sorte son gagne-pain. Une sommité décède et l’exercice peut commencer. Mais Brás est également un fils, un ami, un mari, un père. Comme chacun d’entre nous il est une somme, un composite d’expériences et de vécu. Jusqu’à ce que la mort décide d’y mettre un point final. Fábio Moon et Gabril Bá sont brésiliens, frères jumeaux nés à São Paulo où ils résident toujours. Paru dans la collection Vertigo d’Urban Comics, Daytripper est un récit choral qui emprunte des sentiers tortueux, vertigineux même. Avec sa narration déstructurée, brouillée, qui d’analepses en prolepses projette le lecteur de passés incertains en futurs hypothétiques. Imaginaire, réalité et temporalités sont adroitement malmenées pour reconstruire les parcours et les vies de chacun des personnages. Pour mieux délivrer au cours des chapitres (dont le lecteur curieux pourra s’ingénier à recomposer la chronologie) un propos empli d’humanité et de sensibilité. Un chef d’œuvre.
- Daytripper, de Fábio Moon et Gabril Bá, 244 pages couleur, Urban Comics, Coll. Vertigo, 22,50 €. Préface de Cyril Pedrosa.

Toby mon ami
Une tranche de la vie d’un artiste passée par le prisme, par le regard de Toby, chien fidèle, craintif et joueur : Grégory Panaccione livre avec Toby mon ami un album muet, ça et là ponctué de bulles minimalistes, mais ô combien parlantes. Toby est le compagnon des affres de son maître, dessinateur en proie aux affres de la création et de la solitude. Les souvenirs, le quotidien, les préoccupations et les besoins naturels, font de Toby un témoin, un fil rouge. Tout en aquarelle et traits déliés, Toby mon ami est un livre plein de charme et de poésie.
- Toby mon ami, de Grégory Panaccione, Delcourt, Coll. Shampooing, 144 pages couleur, 14€30.
Capitaine Capital


On le savait déjà, le dessinateur de presse, de bande dessinée et scénariste Yan Lindingre a l’humour militant chevillé au crayon. Son Capitaine Capital en est une synthèse. En 69 planches, l’album rassemble une sélection de strips, fausses pubs et histoires courtes parus dans Siné-Hebdo & Siné-Mensuel, Fluide Glacial, CQFD et L’Echo des savanes. Avec un humour débridé et ravageur Lindingre croque et brocarde, démonte et dénonce tout ou presque : la société de consommation, la crise, le quotidien, la guerre médiatique, la finance toute puissante, la bêtise ambiante…
- Capitaine Capital, de Yan Lindingre, Les Requins Marteaux. Format 15 x 20,5cm, souple, 48 pages couleur. 14€
En silence

Juliette et Luis partent pour une journée de canyoning, une première pour le jeune couple. Une découverte, une expérience qui transformera la jeune femme. Le lecteur pourra être dérouté par ce premier album dont Audrey Spiry signe le scénario et les dessins dans le label KSTR de Casterman. En silence se donne comme une expérience sensorielle avec ces jetés de couleurs et ce graphisme tout en mouvement. Juliette va vivre cette journée au cœur de la nature, au fil de l’eau, comme un voyage initiatique au cours duquel elle va devoir affronter la peur, la solitude. Elle devra se dépasser, trouver en elle les ressources nécessaires pour retrouver la surface. Pour se retrouver.
Au delà du parcours semé d’embûches, presque anecdotique, à l’image de sa vie de couple, En silence est un voyage intime où l’élément liquide n’est qu’un prétexte à une renaissance et une ode à la liberté. Un album prometteur pour une jeune dessinatrice à suivre. Au fil de l’eau.
- En silence, Audrey Spiry, 168 pages, KSTR (Casterman), 16 €

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