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Papiers à bulles

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Billet de blog 16 novembre 2008

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Misanthrope sociable. Diacritik.com

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L'entreprise m'a tuer

Carlos Ghosn: «Ce qui est important, c'est l'avenir à long terme de l'entreprise». L’avenir de L’Entreprise de Dobritz est sombre. Noir. Ses salariés sont en proie à la placardisation, aux mécanismes iniques, aux engrenages injustes et aux DRH sanguinaires.

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Carlos Ghosn: «Ce qui est important, c'est l'avenir à long terme de l'entreprise». L’avenir de L’Entreprise de Dobritz est sombre. Noir. Ses salariés sont en proie à la placardisation, aux mécanismes iniques, aux engrenages injustes et aux DRH sanguinaires.

Travailler plus
Pour gagner plus
Pour s'angoisser plus
Pour stresser plus
Pour se suicider plus
Pour subir plus
Pour râler plus
Pour se placardiser plus
Pour se décerveler plus Bref

Travailler plus
Pour vivre moins

En 72 pages et en noir et blanc, Dobritz brosse un tableau morbide et cynique de l’entreprise moderne mangeuse d’hommes. Ses cadres en costumes sombres et attaché-case subissent tout. La chute des courbes, la chute des cours, le démantèlement d’usines, les parapluies protecteurs, les sièges éjectables, l’abattement et l’incertitude.

Cet album trouve des échos malheureusement très justes aujourd’hui, la crise financière mondiale apportant son lot de fermetures, de faillites, de destins brisés. Comme les lignes des statistiques de croissance qui n’en finissent pas de plonger vertigineusement.

"Vivement la reprise !!", se dit un salarié rapiécé, "Vous étiez dans quelle branche ?", demande un cadre tombé de l’arbre entrepreneurial. Une fois à terre. Son humour cynique revisite des expressions clés du vocabulaire de l’entreprise, les placards, parapluies et autres corbeilles. Dans un monde kafkaïen, pour la noirceur, l’ironie et l’absurdité répétitive.

Par petites touches, avec un humour désabusé dans les rares bulles, par un trait acéré qui joue avec l’opposition du noir et blanc, Dobritz fait de son entreprise imaginaire un lieu nihiliste, où les puissants seuls ont droit de cité. Où les voies sont sans issues, où les plans de carrières ne mènent à rien.

Pour Dobritz, l’entreprise tue. Et rien ne semble vouloir empêcher cela.

DB L'Entreprise m'a tuer, Dobritz, Hugo BD, éditions Hugo et Cie, 72 pages, 12,95 €