Docteur Guy Baillon, psychiatre des hôpitaux le 7 juillet 2012
Rectificatif évoquant le nombre et la complexité des 'Conseils' en psychiatrie
Par souci de clarté j'ai fait dans l’envoi précédent la synthèse des deux textes sur les CLSM, le premier et son rectificatif en un seul ; le premier était bien mon propos mais pouvait laisser croire que c’était une déclaration écrite de la FNAPSY, sa critique ne portant en fait que sur le contenu de certains conseils.
La complexité du débat vient de la diversité des textes officiels qui se sont succédés autour des conseils, de leur diversité, les uns concernant le secteur, les autres d'autres territoires, et de la façon dont ils ont été interprétés.
Le premier en date est celui créant, après les premières circulaires 1960 et 1972 de la Politique de Secteur, le Conseil de Secteur, il a été officialisé par une circulaire de 1976 ou 78 (signée Poniatowsky qui parlait de l'équipe ?)
Comme le remarque Eric Piel (co auteur d’un fameux rapport) peu d'équipes en ont créé un à l'époque. Ceux qui ont été créés ont tenu parce que les Conseillers Généraux étaient directement impliqués par leurs votes au Département pour engager les dépenses psychiatriques de l'extra hospitalier, les Conseils de Secteur nous permettaient de les informer de l'ensemble du travail de secteur ; celui-ci à cette époque évoluait sous une double gestion (hôpital et département), ce qui rendait le développement des équipes très difficile car les directeurs d'hôpitaux ne s'intéressaient pas du tout au secteur, à quelques exceptions près, bien sûr.
Le Conseil de Secteur était le seul lieu où l'on pouvait avoir une vision cohérente de l'ensemble du travail de secteur (à la fois l'hôpital et les soins dans la Cité) et en débattre avec la participation des élus.
Cet intérêt des élus s'est évanoui avec « l'enveloppe globale », première version (associant intra et extra), décidée par le ministère en 1984, qui allait être gérée par les directeurs d’hôpitaux à partir de la loi de 1985 officialisant enfin le secteur.
Mais aucun d'entre nous n'avait noté et compris que la loi de 1970 avait au préalable divisé la psychiatrie en deux : l'aigu pour l'hôpital, le chronique pour le social, ce qui est un contre sens pour la psychiatrie, incohérence qui n'a été réparée qu'en 2005 par la loi sur le handicap.
Nous approuvons donc tout à fait l'appel de la FNAPSY demandant le retour à une définition générale de la psychiatrie (soins plus social), c'est ce que chacun souhaite, en se débarrassant de la notion de 'santé mentale' qui au lieu d'éclairer le débat est venu apporter un maximum de confusion en se mettant au service d'une psychiatrie uniquement administrative.
Pour revenir aux conseils, c'est à chacun de vous de jouer et de faire (c'est assez simple, c’est à vous de participer à cette remise en mémoire) des recherches d'archives officielles pour préciser la succession des textes les concernant, comme nous y invite Marie Leyreloup de SERPSY qui fait mention auprès de Yves Gigou cadre infirmer vigilant, d'un texte produit par un groupe de travail national en 2002 s'appuyant sur le Plan Santé Mentale de nov 2001 (c'est dans ce plan qu'il serait fait mention des premiers Centres Locaux de Santé Mentale).
(Il y avait eu auparavant les textes passagers de la Départementalisation, il y a eu ensuite des projets de conseils qui devaient avoir pour base d'énormes 'territoires intersectoriels' -totalement inhumains car allant de 200.000 à 600.000 hab !- avec l’idée que les équipes de secteur devaient être surveillées de très près, comme dans les Yvelines).
Un Conseil n'a de sens que s'il reste à l'échelle humaine, mais surtout s'il reste associé à un seul secteur.
Ainsi il faut insister sur les effets dévastateurs qu'a eu ensuite la loi HPST avec ses 'pôles' qui dans beaucoup de départements ont morcelé les secteurs dans le même esprit que le fâcheux rapport Couty, avec l’intention de substituer aux secteurs des territoires inhumains, où les acteurs ne peuvent plus se connaitre et n'ont que des rapports anonymes).
Entre temps sont nés « les conseils de santé » parlant de la santé au sens très général, qui comprend évidemment la psychiatrie aux côtés de la médecine, chirurgie, obstétrique, et toute forme de prévention (c’est là que devraient se fondre les CLSM dans un avenir aussi proche que possible).
Alors aujourd'hui il nous paraît inacceptable que la volonté du gouvernement précédent de remettre en selle les CLSM de 2001 et cette fois avec le concours du CCOMS (voulant -pourquoi ? : pour peser pour des raisons personnelles sur la politique française- en faire son cheval de bataille en continuité avec la politique sécuritaire et de contrainte de Nicolas Sarkozy) soit poursuivie par le gouvernement de François Hollande qui veut faire preuve, lui, d'humanité et de générosité !
Nous avons toute raison de le croire à la suite des dernières rencontres des ARS les dangers évoqués dans notre texte précédent : la semaine dernière (juin 2012) en Ile de France, les ARS ont montré qu’elles voulaient faire des CLSM un outil de maitrise des secteurs, encadrés par des administrateurs de haut rang et avaient l'intention d'y contrôler le comportement des personnes fauteurs de troubles ceci avec le soutien du CCOMS qui se permet de donner des recommandations !!! Alors que par définition l'OMS n'a aucune expérience du secteur.
D'où la nécessité absolue aujourd'hui et très vite de tout remettre à plat dans une nouvelle perspective de liberté de fonctionnement des équipes de secteur, avec un Conseil de Secteur identique à celui de 1976.
Cela justifie pour les partenaires actuels de vouloir faire un grand ménage dans tous ces textes contradictoires et le désir de mener à bien l'élaboration d'un Plan nouveau sur la Psychiatrie de Secteur, intégrant la psychiatrie dans sa totalité (soins et social, et son enveloppe financière globale, seconde version) pour chaque secteur.
Pour une psychiatrie à visage humain et à dimension humaine, construite sur une attention à l’homme, à la personne qui souffre, la personne qui soigne, la personne qui est proche, leurs rencontres, leurs relations, leurs liens, le tout dans l’espace que connait la personne qui souffre.