Pour une hospitalité à la souffrance de l’enfant :
Invitation au Forum de la Pédopsychiatrie lors du
Meeting de la Résistance – Collectif des 39
Le 1 novembre 2014 à Montreuil
Depuis l’arrivée du DSM III, le champ de l’enfance et de l’adolescence n’a cessé
d’être l’objet d’expérimentation d’une psychiatrie évaluatrice, médicamenteuse et
rééducative. Le plan Autisme, les recommandations de l’HAS et les attaques contre la
psychanalyse ne sont que les branches d’un même arbre qui cache bien mal la volonté
de démanteler tout accueil de la singularité .
D’après certains démographes de la santé, la demande de consultations se serait
multipliée par dix en quelques années. Il est de notre devoir de nous interroger sur
cette demande - ses causes et ses conséquences - que la société adresse avec ses
enfants.
En France, la loi du 2 janvier 2002 a ouvert le champ du médico-social (c’est à
dire une immense part de la souffrance enfantine) et de la pédopsychiatrie à la logique
du marché : A) Par la réification d’un « usager » (parents et enfants indistinctement) et
l’élimination du symptôme derrière le handicap, c’est à dire par l’escamotage de la
subjectivité. B) Par l’instauration de la « démarche qualité » qui prétend évaluer les
prestations délivrées en regard de recommandations de « bonnes pratiques »
professionnelles déterminées arbitrairement par l’ANESM (médico-social) et l’HAS.
Une évaluation scandaleusement privatisée représentant un marché plus qu’attractif
qu’il serait temps de dénoncer. C) Par l’instauration manifeste ou dissimulée d’un
champ « hors-soins » que ce soit dans le cadre du sanitaire ou du médico-social.
La loi de 2005 instituant la MDPH est une prolongation de la précédente. La
politique du handicap, malgré quelques rares avancées sociales, produit des effets
pervers majeurs. Actuellement nous vivons un double paradoxe : les enfants en grande
souffrance sont moins soignés, pendant qu’une foule de simples « déviants » du
système scolaire sont stigmatisés en handicapés, à coup de certificats médicaux et de
diagnostics psychiatriques, pour pouvoir bénéficier de renforts purement
pédagogiques (type AVS, ou classes à effectif réduit). L’école, publique et privée,
scolarise plus de 220 000 élèves considérés comme en situation de handicap (chiffres
du rapport de la CNSA-MDPH 2012). En 2012 on comptait 88 000 « prescriptions »
de AVS. L’immense majorité de ses dossiers se justifieraient pour des difficultés
psychiques !
Les agités, les redoublants, les insoumis, les peu concernés par l’apprentissage -
le plus souvent issus des populations les plus précaires - se voient ainsi « psychiatrisés »
par la voie du handicap. Par la production de certificats médicaux pour la MDPH, les
cliniciens se trouvent souvent dans l’injonction anti-éthique et liberticide d’être
simultanément experts et soignants. Les rouages de l’intégration scolaire proposée par
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l’actuelle loi sont un formidable processus d’aliénation de chacun: où plus personne ne
décide directement, où plus personne n’est concerné par les décisions et où plus
personne n’est responsable.
La pédopsychiatrie doit rester le lieu d’accueil de la souffrance psychique
enfantine, quand elle ne peut plus être entendue pour ce qu’elle est : un moyen
désespéré, par le corps, par le comportement, par la parole abimée, de faire entendre
que « ça ne va pas ». Il nous faut nous opposer ensemble aux connivences et aux
renoncements qui détruisent notre raison d’être soignante et qui parfois, il faut bien le
dire, viennent cacher la misère de la clinique.
La conjonction de ces trois références (DSM, marché, handicap) en produit une
quatrième : la prescription médicamenteuse dès le plus jeune âge (amphétamines,
neuroleptiques, etc.) et la surmédicalisation scientiste qui l’accompagne (imagerie
médicale, génétique, investigation électro-numérique, diagnostiques biologiques de
Dys- -lexies,-calculies,-praxies,etc.) le plus souvent très éloignée des réalités
quotidiennes des enfants.
C’est pourquoi, le Premier Novembre, le Collectif des 39 propose de
rassembler nos forces, d’échanger nos expériences, de rompre l’isolement des acteurs -
infirmiers, éducateurs, rééducateurs, psychologues, pédopsychiatres, enseignants,
cadres administratifs et parents - concernés par la situation de la souffrance psychique
de l’enfance et de l’adolescence.
— Pour un front uni du service public, sanitaire et médico-social et pour la continuité
des soins.
— Pour la pérennisation des moyens des inter-secteurs de pédopsychiatrie.
— Contre la privatisation à but lucratif de des prises en charge en pédopsychiatrie.
— Contre la récupération de la clinique par une politique du handicap quand elle
transforme les marges en anormaux.
— Contre une pensée unique, pseudo-experte et bureaucratique. Contre le DSM5, la
CIM10 et la pensée classificatoire appliquée aux enfants et aux adolescents
— Contre la médicalisation et la médication outrancière des enfants par les
psychotropes.
— Pour une remise à plat démocratique de l’arsenal législatif concernant l’enfance :
Loi de 2 janvier 2002, loi de 2005, loi de 2007.
Meeting de la Résistance — A l’appel du Collectif des 39
Le Samedi 1 novembre 2014 De 9h à 17h
A la Maison de l’Arbre
9, Rue François Debergue
93100 – Montreuil Plus d’informations au www.collectifpsychiatrie.fr
« TOUS LES HOMMES NAISSENT FOUS, LIBRES ET ÉGAUX EN DROIT »