Communiqué.
Paris, le 14 février 2024.
L'Assemblée nationale a adopté aujourd'hui sur amendement du Gouvernement dans le cadre d'une 2ème délibération consécutive à un rejet en séance la veille ( ! ) un projet de loi contre les dérives sectaires [2], malgré un avis négatif du Conseil d’Etat en date du 9 novembre [3].
Ce texte inclut un article 4 remanié qui pénalise lourdement la "provocation" à l'arrêt de traitements dont l'efficacité est prouvée scientifiquement ...[4]
Nous prônons une saisine parlementaire du Conseil constitutionnel puisque ce texte nous semble hautement problématique pour les libertés fondamentales.
Une telle disposition en effet est hautement susceptible, sous couvert de lutte contre l'emprise sectaire, de rendre pénalement condamnables les critiques et attaques contre les politiques de consommation forcée des firmes pharmaceutiques. On comprend aisément qu'en matière psychiatrique l'application de telles dispositions reviendra à interdire toute indication ou prescription tendant à un sevrage aux traitements psychiatriques qui ne soit pas faite par un psychiatre tenant du médicament en première et dernière intention.
Il s'agit donc, entre autres impacts de ce texte, d'un outil de premier ordre pour une répression psychiatrique intensifiée.
Le droit fondamental des patients de la psychiatrie au libre choix de la thérapie et en l'espèce de modalités thérapeutiques non appuyées sur les traitements psychiatriques (ou même non appuyées centralement sur les traitements psychiatriques) est ainsi remis en question.
Nos contestations pourraient ainsi être pénalement interdites, les médecins qui nous soutiennent pénalisés et radiés par le Conseil de l'ordre des médecins.
Je rappelle à toutes et à tous que nos latitudes connaissent depuis plus d'un demi-siècle une forme de "guerre de l'opium" [5], et que des millions de personnes en Métropole comme dans les départements d'outre-mer, passent des produits stupéfiants (dont du cannabis) mais aussi de dérivés de l'opium, aux traitements psychiatriques, les traitements psychiatriques substituant les produits stupéfiants. Cette politique est menée a contrario d'une politique de bonne santé mentale qui devrait tendre à un assainissement par une hygiène de vie standard. Le mieux étant qu'on se procure avec une étonnante facilité des produits stupéfiants dans les établissements psychiatriques.
Des nouveaux produits mortels tel le Fentanyl, un dérivé opiacé augmenté, arrivent en France. Ce produit a amené ces derniers temps une vague inédite de décès par surdoses aux USA et au Canada [6].
Nul besoin de préciser que celles et ceux d'entre nous qui entendent sortir de ce genre d'engrenage, ou simplement de ne pas en être, sont en péril. Les praticiens et les soignants qui entendent promouvoir des méthodes psychothérapiques également.
Ce n'est pas pour rien que ce projet de loi, et plus précisément son article 4, a rencontré une vive opposition tant au Sénat, qui a complètement remanié cet article le 19 décembre, que le 13 février en séance. Le Gouvernement a dû imposer une nouvelle délibération pour contrer ce rejet en séance, utilisant ainsi une procédure dérogatoire afin de déjuger un vote négatif du Parlement.
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[1] Le CRPA est adhérent au Réseau européen des (ex) usagers et survivants de la psychiatrie (ENUSP / REUSP).
[2] Lire deux dépêches de l’AFP du 14 février 2024 de 13h39 et 18h07 ( cliquer sur ce lien ), ainsi qu’une dépêche d’Hospimedia du 8 février 2024, 16h27 ( cliquer sur ce lien ).
[3] Avis négatif du Conseil d’Etat du 9 novembre 2023 n°407626, cliquer sur ce lien
[4] Lien sur le dossier parlementaire de ce projet de loi : cliquer sur ce lien
[5] Sur les deux guerres de l’opium menées au 19ème siècle par le Royaume-Uni contre la Chine, cliquer ici
[6] Lire à ce sujet un article du Monde du 9 janvier 2023, Le Fentanyl la drogue qui ravage les Etats-Unis, https://lc.cx/LNt69-
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Références :
Dossier parlementaire relatif au projet de loi contre les dérives sectaires déposé le 15 novembre 2023 à la Présidence de l’Assemblée nationale, cliquer sur ce lien.
Pour retrouver cet article sur le site du CRPA, cliquer sur ce lien
CRPA - Cercle de Réflexion et de Proposition d’Actions sur la psychiatrie [1]
Association régie par la loi du 1er juillet 1901 | Réf. n° : W751208044
Président : André Bitton. 14, rue des Tapisseries, 75017, Paris |
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[1] Le CRPA est adhérent au Réseau européen des (ex) usagers et survivants de la psychiatrie (ENUSP / REUSP).