LA « GESTION DU RISQUE »
N’ayant pas réussi à trouver sur le site du Ministère de la Santé, ce Plan, dont vous parlez, Guy Baillon, et vous estimant fort – estimant fort votre parole, votre engagement, et votre honnêteté, bien que nous ayons de plus en plus des positions divergentes sur le problème –je vous réponds par ces lignes.
Je pense également que le moment est crucial et dangereux. Car il n’y a pas à rigoler, avec tous ces prises de positions et plans gouvernementaux qui – tout à coup, l’échéance électorale approchant – dans tous les domaines, se mettent à jaillir et à proliférer, prenant une allure, et se masquant sous un langage (comment dire ?) naïvement bien faisant, et à l’improviste soucieux de l’existences de tous ses citoyens.
Je m’empresse donc de vous répondre, tout en me promettant de bien le lire, et attentivement, ce Plan. (Trop tard, peut–être ?)
Cela, entendant faire le point quant à mon point de vue, que j’ai si souvent exprimé dans ces colonnes. Car, je défends et j'a toujoursi défendu une, pour ainsi dire, une « folie » (on n’a pas d’autres paroles, pour la désigner...) libre et digne. Et cela, NON PAS – seulement – contre d’éventuels « mauvais soignants » (comme vous émettez l’hypothèse qu’ils seraient perçus par ces « bons malades », promus à la fonction de« pairs-aidants »), mais également contre (il me paraît d’une évidence aveuglante), contre toute ingérence d’un Gouvernement, qui – en ce précis moment historique – peut, et tient infiniment à se faire « passer » pour l’unique Etat de droit – ayant été élu, à cette charge.
Je ne vous cacherai pas que j’ai souffert, et beaucoup, lisant vos pages, Guy Baillon. Car si j’écris, et m'entête à écrire tout cela, c’est parce que j’ai vécu un quotidien, avec d’autres humains (hommes et femmes) qui ont connu, comme moi, la violence d’un enfermement psychiatrique forcé, et la déchéance psychique et corporelle des camisoles médicamenteuses. Et ceux–là, et cela, je ne l’oublierai jamais de ma vie !
C’est pourquoi, j’insiste et persiste à me signer de mon propre nom et prénom, tout en essayant de faire la part des choses.`
Je ne comprends pas qu’est-ce que cela veut dire, ce que cela pourrait bien signifier que cette stupide « gestion des risques » dont les « soignants » seraient les responsables. Je sais seulement que je l’ai lu cela (dans votre texte, qui essaye de nous mettre en garde vis–à–vis de ce Plan), à un moment précis où j’étais en train de tracer un écrit, au titre prémonitoire « Et puis... c’est dangereux ! », qui voulait signifier que – comme disait Jacques Brel – à tout moment pour l’humain « il faut aller voir ». Même en risquant.
Je ne sais pas (comme la plupart de nous) vers quoi, vers où nous cheminons. Je sais seulement qu’ici, en France, ou peut-être, en Europe (bien qu’on voie des signes aigus de révolte, par ci par là.), l’on voudrait que nous nous oubliions toutes les valeurs qui ont fait de nous des humains dignes de ce nom.
Si tout le monde, si tous s’étaient tenus à cette notion, de « gestion » du risque, et pire encore de « gestion » autoritaire du risque, à savoir d’une gestion qui – exprimée par des mots doux ou violents – ne conduit qu’à broyer notre liberté et notre dignité, nous ferions bien de nous tourner en arrière, et de regarder derrière nous. Car, il n’y aurait eu sur Terre, aucun progrès, aucune découverte, aucune « création » culturelle : au sens large, gramscien du terme, à trop observer ces rites gestionnaires, et/ou autoritaires.
Les pays du Maghreb nous font la leçon. Là, bats le cœur, le rythme de notre existence humaine. Car là, on ne craint pas de mourir, l’on meurt, pour la liberté et pour la dignité : hommes et femmes. Ecoutons–les donc, et (ré)apprenons nous aussi à risquer quelque peu.
Je ne pense pas que la « folie » est une maladie mentale. Et ça fait longtemps, que je le dis, et que je le crie, même ici. Bien que – à un moment non éloigné de ma vie, ou de mon existence – j’ai cru moi aussi, devoir faire mon auto–critique, et me plier sous ce lourd poids, diagnostiquant ma substantielle différence d’avec les autres mortels sur cette Terre. Mais maladie mentale, ou pas, je saurai faire alliance avec vous, Guy Baillon et avec tous ceux qui (soignants ou pas) se battent et luttent, contre tout enfermement – physique ou psychique –, et contre toute humiliation exercée sur les vivants.