Billet de blog 27 février 2012

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PARTAGER LES SAVOIRS... UN PHANTASME SO HARD À ENVISAGER ?

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PARTAGER LES SAVOIRS... UN PHANTASME SO HARD À ENVISAGER ? (*)

« Le point hard de la perversion des psychiatres promoteurs était de faire croire à quelques usagers que leur expérience "vécue" de la maladie était un "plus" qui les élevait à un niveau de savoir meilleur que celui des soignants, ceci en s'appuyant sur la théorie conçue aux USA de « l'empowerment, » le fameux 'rétablissement' venant prendre la place de la guérison et les plaçant soit disant à un niveau supérieur aux autres malades et aux soignants[...] », nous déclare Guy Baillon, dans son texte – moitié jubilatoire, moitié alarmiste – titré : « L’Etat reconnaît son erreur sur les médiateurs de santé (ou pairs-aidants) en psychiatrie », paru dans ces mêmes colonnes.

Cela, afin de mieux nous expliciter la situation actuelle et les rapports  réciproques de ces « psychiatres pervers », habillant la bêtise innée de « quelques usagers » (: quelques ? Mais dans un premier moment, la FNAPSY toute entière – que Guy Baillon nous pardonne ! – serait tombée, dans cet inquiétant « piège » ! ). Des « usagers », donc, qui, ne pouvant donc pas, cette fois-ci, se définir « usagers » de quoi que ce soit,  ne pourront – à ses yeux, et pas qu’aux siens – qu’être renvoyés à ce à quoi ils ont cru pouvoir innocemment échapper. À savoir à leur fatal  handicap (à leur déficience ?) « mental(e) » et/ou « psychique ». (Comme vous préférez l'appeler, Guy Baillon ! L’on laisse entier et libre choix à vous et à votre imaginaire...) Eux, si « vulnérables », si facilement «embrigadables » par des promesses (honte à vous, les fous !), eux à qui on a fait « croire » qu’ils pourraient « donner des leçons à des universitaires »( !), eux, encore et encore, à qui les « expériences » de leurs pairs (les fous !) «  ne sont pas communicables », bref ! eux qui ne pourront qu’être abusés : par l’Etat, et/ou par les psychiatres pervers, attelés à la botte de ce même Etat. (De ce même gouvernement ?)

Néanmoins... par chance ! il y a un corps défendant, composé de ces braves infirmiers « psys », qui est durablement en état de remettre tout cela en place. Ou presque...

Or, des 2 choses l’une :

– ou bien, ces « anciens malades » sont devenus tous des « minus habens » (je vous prie de m’excuser, amis écorchés-vifs, mais, au pays de Descartes, il faut s’exprimer en toute clarté !), et (à cause peut-être des nombreux traitements « subis » ?  traitements psychiques, médicamenteux, coercitifs etc. etc. ...) ils en sont tous réduits à un tel point d’«infantilisme » (comme il a été justement noté dans ces mêmes colonnes), qu’ils en ont oubliée toute  forme d’astuce-auto-défensive. Et cela, à un tel point, qu’ils ne pourront qu’être tournés et retournés – tels des girouettes – par ces mêmes omnipotents psychiatres-pervers ;

– ou bien, ils sont des vrais filous, qui n’attendirent de tout temps autre chose que cela. À savoir : devenir – eux aussi ! – des soignants ( !), assoiffés –eux aussi ! – de ce pouvoir, que le corps soignant exerce et a toujours exercé sur leur dos. Eux qui, par conséquent, ne pourront viser qu’à se venger sournoisement, sordidement – tels des modernes, astucieux « inquisiteurs » (ce sont vos propres mots, Guy Baillon !)  – de ce même corps soignant. Bien que celui-ci, ou une de ses « partie » – et cela, aux yeux de tout le monde – n’aie rien à craindre, ayant de tout  temps opéré inlassablement pour leur Bien-Être. (Le Bien-Être, on entend, de ces mêmes patients – devenus à l’improviste, et si fâcheusement impatients !)

Cela, car, dans ces lignes, par vous tracées, Guy Baillon, se niche une très forte et très fière CONSCIENCE des différents « niveaux », nécessairement s’établissant et s’instaurant dans le rapport : soignants/soignés. Les premiers ayant en leur cœur la vérité (révélée ou pas), les secondes ne pouvant, par conséquent, que se remettre à la merci des premiers ! Là où l’on peut (ré)lire, pour ne porter qu’un seul exemple, que ces « surper aidants » malades mentaux sont placés :

[...] à un niveau supérieur aux autres malades et aux soignants. (Souligné par nous.)

Et Guy Baillon, dans sa satisfaction si empressée de voir finalement s’écrouler tout ce dérisoire château en Espagne, va jusqu’à appeler – non sans une certaine candeur – la totalité de cette proposition d’« erreur ». Et même, d’erreur  « reconnue » de la part de « l’Etat » !

Or, si l’on peut convenir, avec Guy Baillon, que dans les HP (et même parmi ses internés) il y a de la compétitivité (: dérisoire, certes, dérisoire ! mise en acte – c’est vrai – la plupart des fois par les fameux « bons patients » !), cela (voudrions-nous lui répondre) n’est qu’un parfait et spectaculaire effet de miroir, réfléchissant la société demeurant au soi  disant «  air libre », et qui ne pourra ne pas comprendre, en son sein, aussi des « soignants ».

D’ailleurs, vous-mêmes, Guy Baillon,  ne redoutez peut-être vous aussi, ce qui vous semble être une dangereuse, car chaotique « prise de pouvoir » ? Sans songer un seul instant, à essayer de créer des passerelles, qui pourraient permettre de travailler ensemble, avec ces « êtres » ? Sans songer (ce n’est qu’une hypothèse) à trouver le moyen d’effectuer d’autres choix, que ceux proposés par ces drôles (c’est vrai !) de psychiatres?

Car, vous semblez oublier que, même parmi les « usagers », l’on décèle des êtres ayant eu une « existence » (avant d’être enfermés) « respectable », pour ainsi dire, ou pour ne pas dire de qualité en leur œuvrer, et ce sont vos HP qui les réduisirent (reconnaissez-le, Guy Baillon !) à ce pitoyable état d’absolue dépendance : déclarée, ou pas.

C’est pourquoi, je voudrais simplement rappeler une remarque qui fut exprimée au cours d’un débat, qui se déroula l’année dernière, sur l’œuvre de Deleuze et Guattari. On parlait d’un fou pour ainsi dire « génial », et  – en écoutant cela – un psy, lui aussi en toute candeur, dressa vite l’oreille,  déclarant haut et fort son amer regret de ne rencontrer, dans le lieu où il exerçait, que des « légumes ».

À quoi (pour ne pas être trop agressifs), il aurait sans doute fallu lui répondre que : si en français l’on pourrait dire  « quelle honte ! », en italien, l’on dirait  « che vergogna ! ». Mais, voici ! que le Tout, recomposé en une seule et unique formule, ne devrait (ne pourrait ?) que s’écrier : – Sans honte et sans vergogne ! À bon entendeur...

(*) (« Pas plus que je ne veux être esclave, je ne veux être maître. »

(Ce sont les mots exprimés par A. LINCOLN, dans l’une de ses lettres.)

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