LE GRAND RETOUR
Revenir à sa racine c’est la Quiétude
C’est accomplir son destin
(Lao Tse)
Non pas le Grand Retour.
Tout simplement : le retour.
Oui.
Pour retrouver la Quiétude, ( : pour revenir de nouveau à la Quiétude ?), et accomplir son destin.
Voilà.
Mais qu’est–ce, que ce retour ? Je ne sais plus. Avant, avant cette recherche en moi de cet abîme inouï de si Hautes Souffrances, je le savais, ou je croyais le savoir. Je le vivais, ce retour, (je croyais le vivre ?) – et sans m’interroger à son sujet. Je le quêtais et le vivais : naturellement, pour ainsi dire.
Or, à ce moment–ci, à ce moment de cette Nuit qui m’entoure, à l’écoute de ces Nocturnes de Chopin joués par Barenboïm, et avec autant de douceur, je reviens à ce/à mon récent passé : si tragique ! Et je le parcours, et ré–parcours : des yeux de mon esprit. Mais aussi des yeux de mon cœur. De ce cœur, que je n’ai aucune honte, ni gêne aucune, à appeler vaillant.
De ce cœur, qui a recommencé à pulser courageusement dans ma poitrine, suivant mon souffle. Mieux : respirant ce Souffle qui m’habite si puissamment, et qui a recommencé à me dicter ma destinée.
Oui ! Car, après qu’elle m’a été si violemment, si cruellement arrachée de mes propres doigts désespérés, doucement, et petit à petit, j’ai appris à l’amadouer sa Panique : la Panique de ma Destinée, et enfin ! j’ai appris à la reconquérir. De nouveau ! Comme après avoir subie la « honte » d’un Esclavage. Et je l’ai reconquise, et rétablie : à l’intérieur, et même tout autour de moi. Comme ces êtres si sensibles, qui s’entourent – les aimant de toute leur âme – d’émouvantes végétations fleuries, ou d’objets rares : car, précieux et fragiles…
Je l’ai reconquise, donc : ma Destinée. Et je me suis de nouveau assise vis–à–vis de cet écran lumineux, pour y tracer ces paroles, qui sont paroles de vie mais également de mort : tout ensemble ! Car, moi aussi je suis arrivée à ce Grand Tournant, où il faut faire de la lumière, autour de soi. Une « clarté obscure », comme dirait le si sage Lao Tsé.
C’est pourquoi, après qu’on m’eut donné la mauvaise nouvelle (que dans mon for intérieur j’avais déjà pressentie), je crus – et de toutes mes forces – devoir faire face à la Mort. Et cela, pour bien lui démontrer que je ne la redoutais pas, et que si le moment était réellement venu, pour moi, de « partir » de ce Monde, j’aurai incliné mon front, et j’aurai suivi mon chemin. Obéissante.
C’est bien pourquoi (dans un premier moment) j’avais refusé toute idée d’une éventuelle opération chirurgicale, sans écouter, ou en écoutant si peu, ce qu’on me disait, autour de moi. Comptant suivre ma route.
Et c’est toujours pourquoi, ce fut un rêve (un songe, plutôt ? oui… peut–être...), qui réussit à me déciller les yeux sur la nouvelle réalité qu’il me proposa.
Je rêvai de mon père, décédé depuis longtemps, qui – au moment de l’Armistice – ouvrait grand les grilles du camp nazi, laissant fuir tous les prisonniers de guerre. (Ce qu’il avait fait réellement : dans le réel, j’entends, et c’est pourquoi il fut recherché par les Allemands pour être pendu. Mais, nazis et fascios, eurent à lutter (vainement !) contre les ruses des paysans des Abruzes, qui te protégeant, père, eurent gain de cause.)
Or, à cette sorte de heureuse « vision », un souffle de vie et de liberté, m’envahit. Puissant. Et, toujours entre la veille et le sommeil, je me souris doucement. Je souris très doucement à mon cœur.
Le lendemain, je contactai mon médecin, si respectueux du désir de l’autre ! et que j’avais précédemment réussi à convaincre sur mon premier « choix » (à savoir : ne pas me soumettre à aucune opération chirurgicale), et lui annonçai ma – si vivante ! si libre ! – nouvelle décision.
Voilà.
Il faut peut–être ajouter que – dans tout cela – j’ai eu à mes côtés, ces que j’appellerai mes 2 anges gardiens. Mon médecin généraliste, Jean–Pierre Naudon, et mon analyste, Michel Guibal ; si attentifs, et encore et encore, si respectueux de l’autre ! De cet autre qu’ils découvriront tout à coup, vis–à–vis d’eux : si désireux de disparaître de cet obscur Monde, et de rayer sa présence, de la Planète–Terre, ne s’y sentant pas assez aimé. (Se tromperait–il, cet autre ? Mieux : se tromperait–elle ?)
(Nuit entre le 10 et le 11 mars 2013)