« Ça n’engage que moi, mais j’aimerais mieux avoir comme modèle un Nasri fâché et hurlant furieux de perdre, plutôt qu’un opportuniste en quête de spotlights prêt à se vendre pour une dose de célébrité. » Par John Von Sothen, chroniqueur franco-américain.
C’est reparti, on nous rejoue après élimination la tragi-comédie psycho-sociale de l’équipe de foot nationale française, et les foules encore une fois exigent que tombe une tête. On l’a trouvée, et, c’est bien commode, ni dans le jeu globalement pas terrible de l'équipe, ni dans la sélection ou le coaching peu inspirés du manager Laurent Blanc, mais dans la personne du milieu offensif Samir Nasri, dont la sortie contre un reporter après la défaite de l’équipe face à l’Espagne a mis en question non seulement Nasri lui-même, et sa place dans l’équipe dans le futur, mais le manque général de respect des joueurs d’aujourd’hui, leur mauvaise éducation, les salaires indécents qu’ils empochent en “ces temps de crise” et blah et blah et blah.
« Pardon my French » mais putain, arrêtez.
Ce qu’on nous délivre au fond, derrière le refrain de « Les joueurs devraient être sélectionnés sur des qualités humaines » ou « Ce sont des enfants gâtés », c’est le brief corporate auquel les Bleus sont priés de bien vouloir se conformer. On veut du propre, on veut du sage, et on veut du blanc.
La Une du quotidien Le Parisien titrait mercredi « Le débat fait rage ». Mais je ne vois pas vraiment où est le débat. Tous les journaux français de droite ou de gauche, toutes les radios, toutes les émissions sportives, câblées ou non, régurgitent, tout contents d’eux, la même rengaine. Nasri incarne tout ce qui ne va pas dans le sport. Nasri personnifie la déconnexion entre les riches et les pauvres, entre la racaille et l’homme respectueux de la loi. Nasri est un exemple de l’échec de l’intégration et une illustration parfaite de la corruption de la jeunesse française. D’ici à quelques jours, je parie qu’on mettra aussi sur le dos de Nasri la dette de l’Europe et le problème du chômage.
Ce qui est inquiétant dans tout ça, ce n’est pas seulement la mentalité de gang qui s’en prend arbitrairement à une personne, mais sa tonalité chamarrée de nostalgie grinçante du “bon ton à la française”; celle qui nous parle d’un temps où les joueurs étaient des saints, les équipes unies et où c’était un honneur pour les types comme Nasri de porter le maillot bleu et de représenter la France sur la scène internationale.
Je ne suis peut-être pas un pro du foot, mais je sais reconnaître un message corporate ou politique quand il pointe son nez. Deux messages en l’occurrence, dont aucun n’est très joli.
Le premier est une sorte de puritanisme culturel quant au comportement des joueurs, selon lequel non seulement les Bleus doivent être des joueurs hors du commun, mais aussi des “individus exceptionnels”. Ce qui rend le comportement de Nasri si déplorable, nous dit-on, c’est que les jeunes regardent ces joueurs, qui doivent donc être irréprochables.
N’est-il pas ironique que l’argument du modèle de comportement semble toujours s’appliquer aux sports où de nombreux et gros sponsors sont impliqués ? Vous savez, ces sponsors qui paient pour avoir leur logo juste derrière la tête de Laurent Blanc quand il est interviewé après chaque match.
Est-ce qu’on demande à un violoniste virtuose de bien se tenir quand le concert est fini ?
Le problème est qu’on veut tout. On veut des modèles de vertu (des jolis ambassadeurs de marques sponsors) mais en même temps on veut sur le terrain un produit spectaculaire, des supers-athlètes hard-core, ambitieux et compétitifs, prêts à tout pour gagner et à sacrifier leur corps à chaque match à une vitesse démentielle. Et quand cet athlète n’est pas capable de tout débrancher à la seconde, on le considère « incontrôlable », « mal élevé » et « indigne du maillot ». Ça ne me dérange pas que les parents utilisent les footballers comme modèles, mais j’ai des doutes sur une éducation qui ne laisserait pas un enfant voir que les Samir Nasri, les Joe DiMaggio, les Magic Johnson ou les Zidane sont aussi des êtres humains, des gens qui gagnent et perdent et se mettent en colère et ont des moments de frustration, des moments de souffrance, et oui, de faiblesse.
Je ne crois pas que mon père se soit jamais inquiété que l'image que j'avais d’un type comme Michael Strahan des NY Giants soit complètement détruite parce que je l’aurais vu s’en prendre à un reporter dans les vestiaires après une défaite. Il aurait même été content que je puisse voir Strahan comme un commun mortel, énervé au boulot comme 99% d’entre nous tous les jours, à devoir faire face à une question idiote d’un journaliste plein de rancœur.
Dans le vacarme de la chasse aux sorcières, personne (pas un journaliste sportif que j’aie lu) ne parle du fait que Nasri a joué blessé contre la Suède et contre l’Espagne.
C’est peut-être l’américain vulgaire qui parle en moi, mais il faut quand même rappeler que Nasri et ses coéquipiers ne sont pas payés pour leur participation à l’Euro. Et on pourrait faire valoir que courir avec un mauvais genou pendant 90 minutes équivaut à courir un risque sérieux pour le reste d’une carrière qui dure en moyenne 2 à 4 ans. Oui, vous pouvez vérifier.
Dwayne Wade, le basketteur champion de la NBA de Miami, a candidement fait remarquer ça le mois dernier quand il a suggéré que peut-être les athlètes qui représentaient leur pays pour les Jeux olympiques devraient être payés.
Est-ce que Wade sera exclu de l’équipe américaine à Londres pour sa remarque ? Est ce que la NBA l’a condamné à une peine de deux ans ? Non, et non.
Pendant ce temps, la presse française déblatère sur la façon dont Nasri est incontrôlable, sur le fait que ce n’est pas la première fois qu’il fait ça, et combien son coup de gueule post goal pendant le match contre l’Angleterre – où il a lancé son fameux « Ferme ta gueule » à un reporter sur le côté – était éminemment agressif.
Mais qu’est-ce qu’il y a de si agressif ? Franchement.
A New York, pendant les play-offs de 1994 (auxquels j’ai assisté à Madison Square Garden), Reggie Miller, le joueur de l’équipe de basket de l’Indiana, a fait la même chose à Spike Lee après chaque panier marqué.
Miller était un jeune sportif bourré d’adrénaline et jouant coup incroyable sur coup incroyable et il voulait fermer le clapet d’un critique (Lee) qui l’avait descendu dans la presse. Est-ce que les fans de New York l’ont détesté ? Bien sûr que oui. Est-ce que les fans de l’Indiana l’ont adoré ? Bien sûr que oui. Est-ce qu’il a été suspendu par la ligue ? Bien sûr que non. Et la colère de Reggie Miller contre Spike Lee n’a jamais provoqué de discours sur l’identité nationale ou le rôle des joueurs dans la société ou le prix du pain.
Et c’est là qu’on arrive au deuxième, et plus inquiétant, message. Où l’affaire Nasri a des relents politiques et sociaux, avec une touche insidieuse et nauséabonde de racisme.
Il y a un an, Mediapart a révélé des échanges où Blanc ruminait avec les officiels du football français à l’abri d’une porte fermée sur la question de savoir si la fédération devrait commencer à imposer des quotas basés sur la race.
Blanc lui-même a été pris à dire, je cite : « Qu'est-ce qu'il y a actuellement comme grands, costauds, puissants? Les blacks (...) Je crois qu'il faut recentrer, surtout pour des garçons de 13-14 ans, 12-13 ans, avoir d'autres critères, modifiés avec notre propre culture (...) Les Espagnols, ils m'ont dit: “Nous, on n'a pas de problème. Nous, des blacks, on n'en a pas”. »
Comment Blanc n’a pas été viré immédiatement après ça, cela reste un mystère pour moi. Mais le plus choquant est que le message semble être passé. L’équipe choisie pour représenter la France pour l’Euro 2012 a l’air bizarrement plus blanche qu’auparavant. Coïncidence ? Peut-être. Mais j’ai des doutes, quand on voit par exemple qu’un joueur comme Mapou Yanga-Mbiwa, le capitaine de Montpellier HSC, n’a pas été sélectionné en dépit d’une année formidable. Yanga-Mbiwa, qui d’ailleurs a toujours refusé dans les compétitions internationales de jouer pour son autre pays, la Centrafrique, parce qu’il voulait jouer pour la France.
Je suis sûr que Blanc et la FFF peuvent fournir des tonnes de raisons pour lesquelles Mapou Yanga-Mbiwa n’a pas été choisi ; en commençant peut-être par la stratégie qu’ils avaient mise en place, les performances lors des matchs préliminaires, et blah blah blah. Et avec les beaux résultats de cette compétition, comment pourrait-on ne pas être d’accord ? Quand j’évoque le cas de Yanga-Mbiwa avec mes amis, je suis considéré comme un parano ou pire comme un novice qui ne comprend rien au football français, qui ne comprend pas comment les équipes sont choisies (c’est pas du baseball, John), et on me rappelle que Yann Gorcuff (qui est blanc) n’a pas été choisi non plus. Tu vois – aucun racisme.
Malheureusement Pape Diouf, l’ex-président de l’OM, parlant sur RMC, n’est pas d’accord. « La réalité est que le football français est à l'image de sa société. Le football français est raciste, il exclut. Quand on prend la proportion de joueurs noirs, des garçons qui ont une grande capacité de réflexion : quand ces garçons là veulent un jour embrasser la carrière d'entraîneur ou de dirigeants, on n'en veut pas. »
On a beaucoup spéculé dans la presse sur le fait que la tirade verbale de Nasri montrait que les joueurs devaient être mieux éduqués, mieux « débriefés », mieux « coachés » – mais pas pour le football, non, pour les médias. Nasri, dit-on, devrait savoir comment se comporter avec un journaliste, même aussi agressif que celui de samedi soir, un journaliste qui balance « Casse-toi, alors » à un joueur frustré et blessé juste après l’humiliation d’une défaite.
Pourquoi est-ce que personne n’évoque la question de l’éducation de ce journaliste ? Je suis journaliste. Est-ce mon intérêt de provoquer et de m’aliéner les gens qui doivent me fournir la matière de mon information ? Non. Mais je peux essayer d’embusquer mon sujet si je pense que ça le poussera à un commentaire qui vendra du papier. Ce journaliste a un nom. Paparazzi.
Oh, et au fait – la bagarre journaliste/joueur ou journaliste/coach a vécu. J’ai grandi en regardant le sport. Ces explosions étaient souvent le deuxième acte spectaculaire d’après match, et fonctionnaient en général comme celle de Nasri – un coach ou un joueur furieux vient de perdre un match et un journaliste (qui est souvent un fan et est donc énervé aussi) va trop loin ou pose la mauvaise question ou est trop agressif et provoque une vilaine et pourtant bien humaine explosion.
C’est arrivé un nombre de fois incalculable avec Bob Knight, l’entraîneur de l’Indiana pendant 30 ans, numéro 1 dans l’accumulation de victoires.
Ça arrivait tout le temps avec Jim Calhoun, le coach adulé du Connecticut, qui tout comme Knight a eu une longue et brillante carrière.
Ça arrivait souvent avec le coach de football Jim Mora.
Ça arrivait avec le manager de l’équipe de baseball des Kansas City Royals, Hal McRae, qui a carrément jeté un fax à la figure d’un journaliste.
Sans parler, bien sûr, du coach de l’équipe de football des Chicago Bears, Mike Ditka, dont les colères mémorables dans les vestiaires atteignaient à la performance de stand up.
Est-ce qu’aucun de ces entraîneurs a été suspendu ? Attaqué pour ne pas savoir tenir son rôle de modèle moral ? Je crois que McRae l’a été, mais la plus part sont toujours coachs. Les autres jouissent d’une longue carrière à la télé comme – oui – ambassadeurs d’une marque. Et tiens tiens, les journalistes les aiment toujours.
Les explosions de colère de ces hommes naissaient de la frustration à son zénith et de l’humanité la plus nue, et c’est drôle, les chaînes ont tout de suite compris que ça passait bien à la télé.
Avance rapide : France, 2012, Nasri risque une suspension de DEUX ANS pour son coup de colère, ce qui semble excessif quand on voit que Ron Artest, un joueur de NBA qui a poursuivi un fan dans les gradins et distribué des coups de poings à pas mal d’autres au passage, n’a eu qu’une suspension d’un an.
Gilbert Arenas, qui a amené un pistolet dans les vestiaires et demandé à son coéquipier d’en choisir un, a été suspendu une saison.
Myke Tyson a même dit à un journaliste d’aller se faire foutre en direct devant les caméras. Est-ce que le combat a été annulé ? Non.
Et pourtant Samir Nasri (rare joueur au passage à avoir marqué pour les Bleus pendant cet Euro) est devenu dans la nuit le symbole de tout ce qui ne va pas dans le sport français, et oui, allez, en France en général. Il est riche, il est arabe, et manifestement ça agace beaucoup de monde. Et pas seulement dans la « France profonde », mais aussi dans le Xe arrondissement de Paris, où j’habite, et où j’ai entendu les mêmes clichés qui commencent en général par le salaire. Benzema est trop payé. Ben Arfa est trop payé. Peut-être qu’ils sont trop payés, mais personne n’en dit autant de Johnny Hallyday par exemple, qui est pourtant beaucoup moins intéressant à regarder si je peux me permettre, que Karim Benzema. On me dit aussi qu’il y en a 1 000 qui seraient très contents de prendre la place de Nasri. (Malheureusement pour ces 1 000 il y a un quota en place qui barrera la route à presque tous). Récemment, quelqu’un du monde de la mode über-hip était même tout à fait à l’aise de dire à un dîner que « au moins les joueurs de l’équipe maintenant savent parler français ».
Mais puisqu’on parle de langage, apparemment celui de Nasri était « impardonnable ». Oui, d’accord, il a mal parlé. Mais c’est malheureusement un langage que j’entends beaucoup en France, et qui n’est pas particulier à Samir Nasri. Est-ce que je suis content que mes enfants entendent ça ? Non. Mais c’est un langage qu’ils ont entendu quand j’ai regardé avec ma femme le film césarisé Un prophète l’autre jour. Le même langage que j’entends dans la bouche des cons de pères en scooter qui essaient de me dépasser dans le couloir Vélib le matin.
La machine Relations Publiques de la FFF et ses partenaires médias étiquettent promptement Nasri comme ingérable, ajoutant qu’il n’est pas aimé de ses coéquipiers, et qu’il est un « contrevenant récidiviste », comme s’il était un genre de prédateur sexuel.
Et où est Laurent Blanc pendant ce temps-là ? Blanc à mon avis aurait fait preuve de plus de courage s’il avait défendu son joueur à tout prix, même si Nasri avait tort. Comme le coach Mike Gundy de Clemson University l’a fait quand un de ses joueurs a été maltraité à tort par un journaliste bien peu professionnel dans un article aux trois quarts faux. « Ecrivez ce que vous voulez sur moi, a-t-il crié. Mais foutez la paix à mes joueurs ! »
Au-lieu de ça, Blanc a proclamé que Nasri avait déjà été averti quant à son comportement et que « apparemment le message n’a pas été reçu ». Merci, coach. Blanc est manifestement plus soucieux de prolonger son contrat et d’adhérer aux vœux exprimés par la FFF en 2011 que de défendre ses joueurs.
Et en parlant de coach, l’épisode de vestiaire le plus choquant, et où le manque d’éducation a été le plus criant, est quand même d’après moi celui de Raymond Domenech juste après l’élimination des Bleus au dernier Euro en 2008, profitant de l’occasion et de l’antenne pour demander à une journaliste de l’épouser. Une demande en mariage ? Juste après une défaite ? Vraiment ?
Si j’étais la FFF, j’aurais viré Domenech sur le champ. Est-ce qu’une demande en mariage est une marque de respect envers son équipe ? Et une telle proposition était-elle professionnelle pour la petite amie journaliste qui couvrait l’équipe ? Pour moi, Domenech montre exactement autant de manque de respect vis-à-vis du maillot et du sport que Nasri, et en plus, comme spectateur, ça m’a montré que la défaite n’avait pas affecté Domenech plus que ça. Ça n’engage que moi, mais j’aimerais mieux avoir comme modèle un Nasri fâché et hurlant furieux de perdre, plutôt qu’un opportuniste en quête de spotlights prêt à se vendre pour une dose de célébrité. Vince Lombardi, le célèbre joueur des Green Bay Packers a dit un jour : « Montrez moi un joueur qui aime perdre et je vous montrerai un loser. » Au fait, après ça, Domenech a bénéficié d’une prolongation de deux ans. Nasri risque une suspension de deux ans.
C’est dommage parce que j’étais super fier de l’équipe nationale de mon pays adoptif, un peu comme un chauffeur de taxi haïtien adore les New York Yankees – et surtout dans les compétitions de l’Euro. Comparée aux équipes de l’Espagne, de l’Allemagne ou de l’Italie, l’équipe de France semblait joyeusement diverse – une équipe d’immigrants ou de doubles nationalités et pendant deux semaines, j’étais ravi que ces types soient les icones d’un pays qui semblait beaucoup plus moderne et conforme au monde réel que les autres équipes de la “vieille Europe”. On avait aussi l’impression que la France avait un avantage parce qu’on avait un terreau de talents tellement plus vaste, riche et varié. Et les Bleus étaient bons, bien meilleurs que maintenant. Et ils ont marqué !
Apparemment, la France corporate et ses vieilles biques politiques ne voient pas les choses comme ça. Et elle a réussi à imposer son schéma de modèle de moralité aux Bleus. Blanc, Beur, et Black a été remplacé par Blanc, Boring et Bad.
En 2006, l’homme politique socialiste George Frêche, qui est je pense celui qui a laissé le génie sortir de la bouteille, a dit (je cite) : « Dans cette équipe, il y a neuf blacks sur onze. La normalité serait qu’il y en ait trois ou quatre. Ce serait le reflet de la société. Mais, là, s’il y en a autant, c’est parce que les blancs sont nuls. J’ai honte pour ce pays. Bientôt, il y aura onze blacks. »
Tu as raison George. Moi aussi j’ai honte de ce pays.
J’ai honte aussi de ceux aux PS qui ne t’ont pas viré le lendemain à coups de pieds au cul.
J’ai honte de ceux qui se sont engouffrés dans la brèche de Frêche et ont mené des efforts concertés pour dégager les blacks et les arabes de l’équipe ou ne pas les sélectionner du tout, pour atteindre au chiffre magique des trois ou quatre de Frêche.
J’ai honte de ceux qui n’ont pas viré ceux qui ont ne serait-ce qu’osé évoquer une telle politique ; une politique qui apparemment a bien été mise en place pour commencer à sélectionner des joueurs à 12–14 ans selon leur âge et leur race pour qu’ils puissent représenter le pays avec quoi ? une lumière plus seyante ?
J’ai honte de mes confrères dans la presse qui ont besoin d’exciter les joueurs pour nourrir leurs tweets ou de ceux qui font résonner la grosse caisse des condamnations sans y regarder à deux fois, ou de ceux simplement qui ne peuvent pas regarder un putain de match sans bâtir des théories stupides pseudo socio-économiques sur chaque chose qu’un joueur dit après le match.
Et enfin honte à ceux qui croient que ce Samir Nasri de 25 ans est le plus gros problème de la France. Parce que ce n’est pas le cas.
Le foot français a perdu l’euro, oui, mais il perd encore plus quand on fait les comptes, chaque jour que se poursuit cette “affaire Samir Nasri”. Et ce qui est troublant est non seulement de voir en temps réel un lynchage médiatique collectif s’emballer sans aucune pause pour réfléchir, mais aussi comme un message corporate aseptisé qui prétend nous dicter comment vivre et parler, travailler et jouer, gagner et perdre (et qui au passage n’a rien à voir avec la façon dont vous, moi, et beaucoup de nos amis vivons), a insidieusement envahi notre conscience collective pour refaire les droits et devoirs du contrat social d’aujourd’hui.
Mais qu’est-ce que j’en sais ? Je suis juste une grande gueule d’immigrant qui n’y connaît pas grand chose en football, qui ne parle même pas correctement le français, et qui ne sait pas quand il faut « fermer sa gueule ».
Un vrai manque d’éducation, quoi.