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Billet de blog 1 septembre 2011

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Les agences immobilières pointées du doigt...

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Honoraires trop élevés, demande de documents interdits aux futurs locataires, manquements dans l'affichage des étiquettes énergétiques... Dans son enquête consacrée au marché locatif, publiée vendredi 23 août 2011, l'UFC-Que choisir n'est pas tendre avec les agences immobilières de l'Hexagone. Qu'en est-il à Dijon et en Bourgogne ? Mise au point avec Jean-François Buet, président de la Fédération nationale de l'immobilier de Côte-d'Or (Fnaim) et Pierre Guille, président de l'UFC-Que choisir en Bourgogne...

Location = Litige ?

"Des pratiques bien peu louables" : le titre est sans appel. L'étude publiée vendredi 23 août 2011 par l'UFC-Que choisir, listant les dérives du marché locatif en France, dénonce en effet les nombreux manquements législatifs qui entourent les transactions entre agences et locataires (Voir document joint)... Les faits parlent d'eux-mêmes : dans le domaine du logement, la masse la plus importante des litiges concerne des problèmes liés à la location (40%), loin devant les problèmes de construction (17%) ou encore de copropriété (9%). Selon l'étude de l'UFC-Que choisir, ces litiges concernaient particulièrement les travaux à réaliser par le propriétaire, la régularisation annuelle des charges ou encore la facturation illégale des quittances de loyer. "Par ailleurs, les litiges concernent souvent la fin du bail - 14% de l’ensemble des litiges en logement - et en particulier l’état des lieux et la récupération du dépôt de garantie", précise Pierre Guille, président de l'UFC-Que choisir en Bourgogne.

Pour Jean-François Buet, président de la Fédération nationale de l'immobilier de Côte-d'Or (Fnaim), le constat mérite plus de nuances. "Les propriétaires-bailleurs ne savent pas toujours ce qu'il peuvent - ou n'ont pas le droit - de faire. Je dis cela car en réalité, les agences immobilières ne gèrent que 30% du parc locatif. Autrement dit, seulement trois propriétaires sur dix donnent leur appartement en gestion à une agence : les litiges ne sont pas à mettre exclusivement sur le compte de ces dernières", souligne-t-il. Pour ce professionnel de l'immobilier, "certains litiges sont plutôt des réclamations - quand un locataire demande à réaliser des travaux et que cela traîne un peu - ou des interrogations, dans le cas d'une régularisation de charges par exemple, qui est une question compliquée". Selon lui, les litiges les plus importants sont essentiellement liés à l'état des lieux de sortie avec retenue sur le dépôt de garantie. "Aujourd'hui, nous avons des locataires toujours plus assistés, qui prennent de moins en moins soin des logements qu'ils occupent. Par exemple, dans les salles de bain ou les cuisines, on trouve souvent une ventilation mécanique avec une petite bouche en plastique qu'il faut nettoyer deux fois par an à l'eau savonneuse - cela prend trente secondes. Cela n'est jamais fait. Et lorsqu'elles se bouchent, des taches noires se forment dans les coins... Et il faut refaire le plafond. Coût des travaux : 450 euros. Il est compliqué de faire comprendre ça aux locataires... A l'image de cet exemple, de plus en plus de litiges sont donc parfois simplement liés au nettoyage de l'appartement !".

Litiges ou simples réclamations ? Dans tous les cas, l'UFC-Que choisir a tenu à mener l'enquête pour jauger des pratiques et rapports des agences immobilières avec leurs futurs locataires. "Sept agences ont été enquêtées à Dijon entre le 12 mars et le 02 avril 2011. Principalement des agences appartenant à des grandes centrales comme Orpi, Lamy ou encore Century 21, ainsi que des indépendants", explique Pierre Guille. Le principe ? Des bénévoles se présentaient comme aidant un membre de leur famille dans la recherche d’un appartement à louer. Le candidat locataire présentait un dossier correct et ses revenus couvraient trois fois le montant du loyer exigé. Seul bémol : le locataire n'avait pas de garant. "Les visites avaient pour but de vérifier le respect des règles relatives à l’affichage des informations obligatoires - étiquette énergétique et montants des honoraires -, la qualité du conseil ou encore la légalité des papiers demandés pour la constitution du dossier", détaille-t-il. Outre les sept agences visitées à Dijon, 1.056 professionnels de l'immobilier ont ainsi été enquêtées à l'échelle de la France.

Des manquements dans l'affichage de l'étiquette énergétique

Premier constat : l'affichage du Diagnostic de performance énergétique (DPE) des biens à louer n'est pas systématique, malgré l'obligation légale fixée depuis le 1er janvier 2011. "Seules 72% des agences affichent systématiquement l'étiquette énergétique, 18% ne le font que parfois et 10% ne le font encore pas du tout", constate Pierre Guille. "Certaines agences notent "en cours d'élaboration" lorsque le DPE n'est pas effectué. Ce contournement n'est pas légal : l'étiquette énergétique doit être à disposition dès la mise en location et son affichage est obligatoire. Dans ces cas, nous avons bien évidemment considéré que l'étiquette n'était pas affichée. Cette absence d’affichage dans plus d'une agence sur cinq est d’autant plus dommageable que, compte tenu de l’explosion des tarifs de l’énergie, cette information devient primordiale", souligne également l'enquête.

Sur ce point, Jean-François Buet, également patron du groupe Buet immobilier à Dijon, rejoint les conclusions de l'UFC-Que choisir. "On a le DPE ou on ne l'a pas. Ne pas l'avoir, c'est être en défaut de la loi. Je vais vous dire : dans les agences immobilières, il y a quelques brebis galeuses, d'une part, et des gars qui bossent très bien toute l'année et souffrent de l'image des brebis galeuses. A la Fnaim, nous avons fait plusieurs choses : premièrement toutes les annonces de location sans DPE n'apparaissent pas sur notre site internet ; deuxièmement, si des gens ne le font pas, nous avons mis en place un comité d'éthique et de déontologie qui peut être saisi afin de rappeler à l'ordre les agences contrevenantes. Régulièrement, je vois des vitrines d'agences qui n'affichent pas le DPE : ce n'est pas possible. Il y a une loi, on se doit de la respecter. Sur ce point je suis en accord avec la position de l'UFC", souligne-t-il.

Une quête excessive de garanties

Au-delà du manque de transparence sur le diagnostic énergétique des biens en location, l'enquête de l'UFC-Que choisir met en évidence la quête excessive de garanties par les agences. "Après la visite d'appartements, les enquêteurs se sont enquis des documents exigés pour la constitution du dossier et il ressort que nombre d'entre elles demandent une attestation d'employeur en plus du contrat de travail et des derniers bulletins de salaire, une attestation du précédent bailleur ou encore une copie de relevé du compte bancaire", note Pierre Guille. Des documents pourtant interdits par la Loi du 06 juillet 1989, régissant les rapports locatifs... Selon l'enquête, sur l'ensemble des agences proposant des locations, 62% demandent au moins un document interdit pour la constitution d’un dossier et chez près de la moitié des professionnels (46%), une attestation d'employeur est exigée en plus d’un contrat de travail.

Des demandes que Jean-François Buet tient à expliquer. "L'attestation du précédent bailleur n'a pas à être demandée, c'est vrai, mais le problème est que nous avons des assurances qui couvrent les loyers impayés et certaines compagnies, pour garantir le propriétaire, nous demandent des documents que le locataire n'est pas obligé de fournir. L'attestation du précédent bailleur ou l'attestation d'employeur par exemple", précise-t-il. Et d'ajouter : "Demander l'attestation d'employeur est illégal à partir du moment où le locataire peut fournir son contrat de travail et trois feuilles de salaire. Mais parfois, il est plus facile pour le locataire de fournir l'attestation d'employeur que le contrat et les bulletins de salaire. Il peut très bien refuser mais cela ne nous interdit pas de le demander. Ce qui est interdit est d'obliger le locataire à le fournir".

Des honoraires trop élevés ?

Dans son enquête publiée vendredi 23 août 2011, l'UFC-Que choisir estime également que les honoraires des agences immobilières sont "prohibitifs". "Dans 70% des cas, les honoraires d'agence ne sont pas calculés en fonction d’une prestation de service mais sont indexés sur le montant du loyer. Le locataire se voit ainsi appliquer le principe de la double peine : quand les prix de l’immobilier s'envolent, les honoraires d’agence qui lui sont demandés s’envolent en parallèle !", note le compte-rendu de l'enquête. "En général, les honoraires sont équivalents à un mois de loyer. Mais l'on constate que les grandes centrales ont tendance à pratiquer des tarifs plus élevés que les indépendants, de 16% en moyenne", souligne Pierre Guille.

Là encore, le point de vue diffère selon que l'on se place du côté des agences ou du locataire... "Les prix de location sont libres depuis le 1er janvier 1987 et cette liberté permet de faire marcher la concurrence - je trouve que c'est plus sain ainsi. Ensuite, effectivement, les honoraires sont généralement indexés sur le prix des locations. Ceci étant, quand on loue un appartement plus grand, les agences y passent également plus de temps pour les travaux, l'état des lieux etc. Notons également que certaines agences proposent plutôt des forfaits, ne prenant pas en compte le prix du logement mais le nombre de pièces. Par exemple : 150 euros pour un T1 ; 180 euros pour un T2 etc. Donc effectivement, l'UFC-Que choisir pense que les honoraires sont élevés et pas toujours justifiés mais de notre point de vue, je peux vous dire qu'il y a des maisons où, entre l'état des lieux du jardin, des pièces ou encore les assurances, les honoraires sont peu chers payés !".

Un marché à réformer

Mais l'UFC-Que choisir veut aller plus loin que les constats dressés par l'enquête. "Tout d'abord, nous avons demandé à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de procéder à des contrôles pour que les pratiques illicites relevées soient sanctionnées", note Pierre Guille.

Plus largement, l'UFC-Que choisir appelle à une réforme du logement locatif autour de trois axes, à commencer par le plafonnement des honoraires pour la rédaction du bail. "Rappelons-le, les honoraires pour l'établissement d'un acte de location sont les seuls qui doivent être partagés à parts égales entre le bailleur et le locataire. Pour éviter que les honoraires ne continuent à être payés de façon indirecte par les locataires en augmentant artificiellement les honoraires de rédaction de bail, il est indispensable que, parallèlement à une application stricte de loi, un plafonnement des honoraires pour la rédaction d'un bail soit défini", précise l'enquête. Pour conclure, l'association de consommateurs invite également à une meilleure information concernant l'état des lieux et propose de placer les garanties auprès de la Caisse des dépôts et consignations pour "financer des aides à destination de locataires en difficulté", plutôt que de les laisser à disposition des agences...

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