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Billet de blog 4 décembre 2009

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Le MoDem à l'épreuve du laboratoire dijonnais

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Jeudi 23 août 2007 : François Rebsamen, alors candidat aux municipales, déclare dans Le Point être "favorable à des alliances électorales locales sur la base de propositions communes avec le MoDem". Une mini bombe au niveau national et un statut de laboratoire pour la ville. De cette liste "arc-en-ciel", que reste-t-il aujourd'hui ? Quelle est la place du MoDem dans la capitale des Ducs ?

Genèse d'un parti


Il a le sourire François Deseille, Adjoint au Maire de Dijon. Depuis lundi 30 novembre, 23h14, il est le candidat proposé par François Bayrou aux votes des militants du 6 au 12 décembre prochain, en vue des Régionales 2010. Mais il garde la tête froide et, empreint de nostalgie, se rappelle de son entrée à l'UDF... Flashback : nous sommes en décembre 2000. F. Deseille a tout juste 31 ans lorsqu'il rencontre Danielle Juban et François Sauvadet. Et là, c'est le coup de foudre, le vrai : "Tout de suite, le courant est bien passé", explique-t-il. S'occupant de la section jeune, il se retrouve 3 mois plus tard à la 42ème position de la liste de Jean-François Bazin pour les Municipales de 2001. Le jeune François fait ses preuves et devient très vite le numéro 2 suite au départ de Rémi Delatte...


Jusqu'en 2004 où survient le clash, le divorce, la fin. François Sauvadet, sur une décision collectivement prise par lui-même, retire sa liste au second tour : un "début de trahison" pour F. Deseille, dont l'apothéose sera l'abdication de Louis de Broissia "mettant un premier genou à terre et marquant le début du règne de Sauvadet", qui devient 1er vice-président du Conseil Général. Le divorce se consume totalement lorsqu'en pleine campagne des Présidentielles 2007, François Bayrou déclare son intention de nommer Strauss-Khan Premier ministre s'il gagne les élections. C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase et "l'heure de la seconde trahison" pour François Sauvadet, qui rejoint N. Sarkozy puis le Nouveau Centre. Le numéro 1 actuel du Modem de se demander amusé : "A qui le tour en 2010 ?"...

"Je préfère me balader en tramway plutôt qu'en kayak"


C'est donc sur l'autel de la haine que naît le MoDem à Dijon, faisant une entrée tonitruante dans la sphère politique. Fin aout 2007, François Deseille est en vacances dans le Sud de la France. Bronzage piscine, sieste ... et coup de téléphone. A Dijon, encore un François, mais Rebsamen cette fois-ci, qui vient de lâcher une petite phrase agitant très vite le monde politico-médiatique. En vue des Municipales, il se dit "favorable" à un travail avec le MoDem... F. Deseille reste de marbre : "François-Xavier Dugourd était à genou devant moi ; nous nous reconnaissions davantage dans les valeurs porté par François Rebsamen".


Mais si à l'époque, les deux hommes ne se fréquentent pas, ne tarde pas à s'engager de réunions en réunions, une seconde love story politique. Six samedis de suite, le MoDem participe ainsi à des ateliers destinés à l'élaboration d'un programme, où il apporte notamment des propositions sur la maitrise des finances et de la dette. "Ayant été entendus, nous nous sommes dit : "Pourquoi pas ?", commente F. Deseille. L'opportunité était bonne et la direction n'a pas rechigné, Rebsamen étant "hyper bien perçu" à l'échelle nationale. "De plus, nous précise-t-il, même si j'aime le sport, je préfère faire une balade en tramway plutôt que du kayak". Un tacle non dissimulé à F.-X. Dugourd, Conseiller municipal et chef de file d'Initiatives Dijon, l'opposition officielle, qui portait son projet de rivière pour Dijon...

Un baromètre de la population


Justement, F.-X. Dugourd considère le Modem comme un "faire-valoir" de la majorité, un parti "inexistant, invisible et [qui] n'a aucune force de proposition". Propos tout aussi cordiaux du côté de F. Deseille, qui qualifie le leader de l'opposition de "toutou qui aboie", "de schizophrène" usant "d'un double langage"... avant de partir dans une explication nébuleuse du système de réunion hebdomadaire de la majorité visant à débattre et coordonner les actions. Au final, conclut François Deseille, "le conseil Municipal n'est qu'une pièce de théâtre qui vise à terminer le travail effectué en amont".


Selon F.-X. Dugourd, "cette position clairement à gauche déçoit beaucoup de gens" et "n'apporte aucune valeur ajoutée". Faux ! Rétorque F. Deseille, qui martèle que "l'ambition du parti est de réunir non pas sur l'étiquette mais bel et bien sur les compétences". Une sorte de baromètre pour Benoit Bordas, Conseiller Municipal de Dijon et Président des Jeunes Démocrates de Côte d'Or. Lui voit dans le MoDem une représentation de la population : "Toujours respecté et écouté au sein de la municipalité", le MoDem apporterait du "sang neuf sur les idées", tout en faisant aussi office de force de proposition aussi bien au niveau local qu'au niveau national.

Vers un squelette d'opposition


Alors, quand le 14 novembre dernier, le PS, les Verts, le MUP et le MoDem se réunissent à Dijon, il y a de quoi faire jaser. Marie-Ségolène, la dame du Poitou, trouve même moyen de se déplacer, s'accaparant les débats. Mais Rebsamen et Peillon résument très bien la question de fond lors du point presse du matin, : "Pourquoi ce qui fonctionne dans une ville, une agglomération, une région, ne fonctionnerait-il pas au niveau national ?". Pour Laurent Grandguillaume, Conseiller général de Dijon V et adjoint au maire délégué à la jeunesse et la vie associative, l'équation est "logique".
Il faut dire qu'il a été l'un des premiers à ouvrir les portes au MoDem. Citant les villes de Grenoble, Lyon et même Lille, il considère "qu'avoir un discours inverse serait retomber dans les travers de la SFIO (Ancêtre du PS de 1905 à 1958)" à savoir le localisme et le régionalisme. "Aujourd'hui, ajoute-t-il, le PS est en difficulté (...) mais peut devenir un grand parti pour fédérer autour de lui une sorte de colonne vertébrale avec tous les acteurs qui souhaitent une nouvelle majorité progressiste".


Après la "claque salutaire" de Bayrou aux dernières élections Européennes en juin 2009, le MoDem espère rebondir. A Dijon, l'assise électorale est bien présente mais au niveau national, il faut encore convaincre. Alors quand F. Deseille explique que s'il cautionne le travail d'Alain Suguenot à l'échelle locale, il est plus circonspect quand à ses œuvres nationales, l'opposition crie "au retournement de veste". Erreur de jeunesse ou analyse des compétence ? "Il faut savoir ce que l'on veut, avance L. Grandguillaume : rester enfermés pendant encore 20 ans dans l'opposition et rester tout seul dans son coin, ou s'ouvrir pour devenir majoritaires."

Qui s'y Frot s'y pique


Cette "majorité", F.-X. Dugourd ne la voit pas d'un bon œil. Pour le chef de file d'Initiatives Dijon, "l'opposition systématique du MoDem à Nicolas Sarkozy démontre clairement les ambitions du parti pour 2012." Et cette attitude se reflète aussi au niveau local comme il l'explique en prenant l'exemple de Marc Frot "écarté pour avoir eu le malheur de s'allier avec la droite". Chaque parti à son transfuge ; Marc Frot, conseiller général du canton de Baigneux-les-Juifs, est celui du MoDem en Côte d'or. Pour François Deseille, ce nom a du mal à passer. "Qui ça ?" plaisante-t-il alors que nous abordons ce point. Il faut dire que le conseiller général de Baigneux les Juifs a subi toutes les pressions, tenant dans ses mains la bascule ou non du Conseil Général à gauche en mars 2008.


Un programme et une profession de foi clé en main, M. Frot a été élu lors des dernières élections cantonales avec les voix du MoDem et du PS... avant de finalement céder à l'appel de la droite. Le choix était difficile pour F. Deseille : "Je ne pouvais pas soutenir François Sauvadet, dont la volonté était de détruire Bayrou. j'ai donc demandé à Marc Frot de voter pour une présidence de gauche." Le chantage sur son canton et la pression des élus auront eu raison de la décision de Frot, qui a finalement donné sa voie à François Sauvadet du Nouveau Centre. Tout jeune détenteur de la carte MoDem, il a finalement été exclu du parti.

Des jeunes à la conquête d'une image

Ainsi le MoDem cherche une assise définitive et se définit comme "le parti des compétences". Et pour y arriver, plus qu'ailleurs, il compte sur le renouvellement de la génération. En Côte d'or, c'est Benoit Bordas qui s'y colle. En 2002, alors qu'il a 18 ans, il s'engage en politique entre les deux tours de la présidentielle, y voyant le meilleur moyen d'exprimer sa désapprobation avec le résultat du 1er tour et l'accession de Jean-Marie Lepen. "A l'époque, François Sauvadet me présentait comme le plus jeune adhérant". De bête de foire, il est aujourd'hui devenu président des Jeunes démocrates de Côte d'Or. A son arrivée, l'UDF comptait 150 adhérents, dont une dizaine de jeune. Désormais, ils sont 80 jeunes à jour de cotisations, dont 15% d'actifs ; le jeune conseiller municipal l'affirme : "La mobilisation des jeunes pour les régionales, on s'en charge !" Déçu par la perte du côté "poil à gratter" qui définissait le parti dans les années 90 (rappelez-vous les débats sur le mariage homosexuel et les distributions de préservatifs UDF au centre-ville de Dijon), il se réjouit du départ de "tous les vieux de l'UDF".


Finalement, toujours en quête d'identité, le MoDem doit prouver qu'il n'est pas une constellation éphémère dans la galaxie de la politique mais qu'il peut compter sur le soutien d'un électorat fidèle. Réponse en mars 2010 tandis que le parti nous promet une campagne déroutante et surprenante...

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