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Billet de blog 8 juillet 2010

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Bourgogne : une université autonome... mais pauvre?

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Valérie Pécresse, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, a annoncé jeudi 08 juillet 2010 que vingt-quatre universités passeront à l’autonomie en 2011. Les présidents des universités autonomes étaient réunis ce même jour par la ministre afin de partager leur retour d'expérience sur la pratique des nouvelles compétences offertes par la loi sur l’autonomie. L'occasion de faire le point avec la présidente de l'université de Bourgogne, Sophie Béjean, sur la situation de l'université bourguignonne depuis son passage aux Responsabilités et compétences élargies (RCE) le 1er janvier 2010...

Sophie Béjean, bonjour. Pouvez-vous rappeler la situation actuelle de l'université de Bourgogne (uB) et expliquer clairement le changement qui s'est produit au 1er janvier 2010?


"L’uB est, comme on dit, "passée aux responsabilités et compétences élargies" (RCE) depuis le 1er janvier 2010. Cela signifie globalement qu’elle assume désormais de nouvelles responsabilités, en particulier en matière de politique et de gestion des ressources humaines, mais aussi sur le plan budgétaire : gestion de la masse salariale de l’ensemble des personnels de l’université, gestion d’un budget désormais global de près de 220 millions d’euros, dont les deux-tiers environ sont dédiés à la masse salariale. Cela permet à l’uB d’orienter son budget en fonction de ses choix politiques, même si les marges sont peu importantes dans notre université historiquement sous-dotée...

Quel est le degré d'autonomie de l'uB en matière de stratégie de développement?


L’université maîtrise désormais une grande partie de ses leviers de développement, dans le cadre de ses missions de service public en direction de ses usagers, les étudiants (27.400 en 2010), en matière de recherche également, de transfert de technologie et d’innovation, de diffusion des savoirs, ou de coopération internationale. Ces leviers sont plus souples et plus importants : son autonomie permet à l’uB d’effectuer les choix stratégiques en fonction de l’évolution de son activité : création de nouveaux diplômes, augmentation des besoins dans certains secteurs - comme la santé par exemple, dont les effectifs de première année sont en hausse, ou renforcement de certains laboratoires de recherche par exemple.

... en matière de politique de recrutement des étudiants?


L’université continue d’assumer pleinement sa mission de service public : l’accueil de tous les bacheliers, dans toutes ses formations (plus de 400 dans tous les domaines). Nous pouvons tout faire pour améliorer les conditions d’accueil de nos étudiants, leur donner les meilleures conditions de réussite, d’études et de vie, les accompagner tout au long de leur cursus : c’est donc une politique au bénéfice de nos étudiants et de l’attractivité de notre université.

... en matière de maitrise du budget ?


L’université maîtrise bien sûr son budget et cela est très cadré : le recteur assure le contrôle de nos décisions en matière budgétaire et désormais, l’université doit aussi faire certifier ses comptes. C’est aussi l’occasion d’une maîtrise de la masse salariale même si l’université doit gérer prudemment... particulièrement cette année car l’université de Bourgogne, comme je le disais, est historiquement sous-dotée, en emplois comme en budget, ses marges sont donc très minces. Nous espérons que le ministère reconnaîtra mieux cette sous-dotation et assurera une compensation pour notre établissement.

... en matière de recrutement et gestion des personnels ?


C’est dans ce domaine que l’université a beaucoup de responsabilités nouvelles et importantes : l’uB peut mieux orienter sa politique de recrutement, mettre en œuvre des mesures en faveur des personnels et donc parfois faire plus et mieux, en matière d’action sociale ou de politique indemnitaire par exemple, en complément des droits et garanties apportées par l’appartenance à la fonction publique. Ce n’est encore pas idéal, mais nous avons progressé en la matière, et nous le ferons encore. En matière de recrutements, l’université les assure dans le cadre légal de la fonction publique. Cela dit, l’université peut désormais avoir une politique plus attractive et être plus réactive dans le cadre de règles parfois plus souples, par exemple pour attirer des enseignants-chercheurs étrangers.

... en matière de maitrise de l'organisation pédagogique ?


L’organisation pédagogique de l’université n’a pas fondamentalement changé même si le passage à l’autonomie et les autres réformes universitaires récentes ont aussi permis à l’université de se tourner encore plus vers ses usagers, vers les étudiants, vers leur réussite avec le plan réussite en licence - encore insuffisant mais pour lequel l’université de Bourgogne a été très innovante et volontaire, vers leur insertion professionnelle en particulier avec notre plate-forme d’insertion professionnelle très dynamique pour laquelle l’uB a été précurseur, vers la qualité des formations en améliorant toujours les parcours, avec un meilleur appui à la recherche ou au monde professionnel, selon le cas ; une meilleure qualité provenant aussi de l’obligation désormais d’évaluer – et auto-évaluer – nos formations.

... Et enfin, quel est le degré d'autonomie de l'uB en matière d'investissement et gestion des biens immobiliers ?


Dans ce domaine, rien de nouveau pour l’uB qui n’a pas demandé la dévolution de son patrimoine (ndlr : les locaux universitaires appartiennent actuellement à l’Etat et ils sont affectés à l’université, la dévolution rendra les universités propriétaires de leur patrimoine). Cela dit, l’uB se doit de bien gérer ses locaux. Elle le fait grâce à un pôle patrimoine très compétent et efficace.


Dans le cadre du label Campus innovant, nous préparons par exemple des investissements qui vont être très importants pour notre campus, aménagement du campus, transport grâce au Tramway, espace multiplex pour les étudiants, maison internationale des chercheurs, nouveau bâtiment pour le transfert de technologie, isolation du bâtiment Mirande... tout cela sera encore des atouts pour notre université et pour son attractivité.

Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, reçoit les présidents des universités autonomes, jeudi 8 juillet, afin de partager leur retour d’expérience sur la pratique des nouvelles compétences offertes par la loi sur l’autonomie. De votre côté, quel est le retour d'expérience que vous pouvez faire au bout de six mois ?


Je suis au courant de cette démarche intéressante. Les universités autonomes avaient d’ailleurs pris une telle initiative : un séminaire a eu lieu entre les premières universités autonomes le 25 juin 2010 à Clermont-Ferrand (63) à l’invitation du président Philippe Dulbecco. Les partages d’expériences, le bilan, les interrogations et le constat aussi de certaines incomplétudes ont été présentées à cette occasion à Bernard Belloc, conseiller du président de la République pour l’Enseignement supérieur.


Globalement nos échanges ont montré tous les atouts de l’autonomie et des réformes en cours pour dynamiser nos universités, pour les tourner vers les usagers, vers les étudiants et vers leurs personnels, pour leur permettre de devenir de vrais opérateurs de recherche. Ils ont aussi montré qu’il fallait rester vigilant pour que l’autonomie soit un vrai levier positif pour les universités. En particulier, l’articulation entre règles nationales et autonomie doit perdurer mais s’accompagner de régulation et notamment de financements lorsque les mesures nationales ont un impact sur les universités. Et si parfois des risques sont évoqués, ils concernent plus l’engagement de l’Etat qui doit rester fort, en particulier pour les universités qui en ont le plus besoin, ou la clarification des règles du jeu, en particulier ce qui concerne la dévolution du patrimoine."

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