
Lundi 7 décembre, un militant Greenpeace s'est enchaîné à une voie ferrée pour protester contre l'envoi d'uranium en Russie. La semaine dernière, c'est l'Assemblée Nationale qui était envahie pour attirer l'attention des politiques et du public sur le sommet de Copenhague. Mais à Dijon, Philippe Hervieu se couchera-t-il sur les rails pour empêcher le tram de rouler ? Chrisitine Durnerin* applaudira-t-elle les militants envahissant le Conseil Municipal de Dijon ? Rien n'est moins sûr... Comment sont coordonnées les actions de Greenpeace au niveau local et quel en est l'impact ?
Leur fierté : une attitude "musclée"
Sur le toit du palais Bourbon durant la matinée, envahissant l'hémicycle l'après-midi, Greenpeace a réussi son coup d'éclat la semaine dernière. Alors, quand une semaine après, les militants réitèrent leur exploit à Cherbourg pour empêcher un convoi d'uranium de se rendre en Russie, ils continuent de déranger... Cette attitude "musclée", Greenpeace la revendique et la cultive depuis 1977 en France. A Dijon, ils sont une trentaine à relayer le message parisien, dont une dizaine de membres actifs et une autre dizaine de "mobilisables". La dénonciation des ventes de poissons originaires des grands fonds, les "villipendeurs" de l'impact des changements climatiques sur le vin, les 700 personnes nues dans les vignes du Chalonnais : c'est eux, chantres de la politique par le spectacle, de l'utilisation des médias à outrance. Et pourtant, nous assure le "responsable par intérim" du groupe local de Dijon, ces actions spectaculaires ne sont que le dernier maillon d'une chaine parfois longue : "Une équipe de scientifique enquête en aval et remonte les filières", un moyen de justifier et d'appréhender des missions qui font souvent polémique. Une fois l'enquête achevée, des discussions s'engagent ainsi que des rencontres plus diplomatiques...
N'est pas activiste qui veut...
La polémique est un secteur porteur, surtout pour Greenpeace. Mais n'est pas activiste qui veut. Ainsi, "une formation spéciale est délivrée aux militants à leur demande", explique Alain Foignot, histoire de respecter quelques règles qui font la notoriété de la structure comme la non-violence. La formation revêt alors un côté physique pour apprendre notamment à escalader un bateau,ou descendre en rappel la tour Eiffel, mais aussi un fort côté psychologique. "Avant de s'enchaîner pendant 24 ou 48 heures sur les grilles du magasin, il faut s'assurer que la personne soit forte", commente ainsi le responsable du groupe. Il en est de même pour l'apprentissage de l'attitude envers les forces de l'ordre : "Comme on le voit à la télé, les activistes ne doivent pas répondre aux violences qu'ils subissent, qu'elles soient policières ou autres." Une attitude de dévotion à la cause qu'ils défendent... tout en respectant l'autorité. A Dijon, aucun activiste n'est à dénombrer mais "plusieurs jeunes de 18 et 20 ans ont demandé à suivre la formation". De fait, les actions sont moins spectaculaires et beaucoup plus portées sur le symbolique. "Notre objectif est de décliner au niveau local les actions nationales", commente Alain Foignot. Ce doit être un prolongement du national et chaque action doit être validée par Paris auparavant."
Le soutien des Verts
A la rescousse d'une politique écologiste qui a le vent en poupe, Greenpeace a reçu la semaine dernière le soutien des députés Verts dans l'hémicycle. Au niveau local, c'est Philippe Hervieux, patron des Verts à la région Bourgogne, qui approuve ce genre d'action : "Greenpeace est une association appréciée et non violente, estime-t-il, réputée pour ses actions spectaculaires et animée par des personnes respectables". Alors, quand l'organisation s'attaque à l'Assemblée Nationale, Philippe Hervieux y voit le signe que "la planète a rendez-vous avec son avenir", que "c'est donc sur un sujet porteur que Greenpeace a souhaité marquer les esprits". Taclant au passage le "régime présidentiel", il souligne l'avantage de ces "actions flashs" ainsi que la nécessité d'une "mise en scène spectaculaire". Et Alain Foignot n'est pas peu fier de rappeler l'affaire Lapeyre, où l'ONG est parvenue à faire céder la multinationale et à lui imposer la norme FSC (Forest Stewardship Council) : "Pour une exploitation durable de la foret". Celle-ci importait du bois pour la confection de ses meubles depuis des forêts brésiliennes via des filiales et autres sous-traitants qui ne respectaient pas toujours le label. Alors, quand François Sauvadet, député Nouveau Centre, qualifie de "voyous" les représentants de l'association, Philippe Hervieux, considère la réaction excessive et les termes peu appropriés. Du côté de l'organisation elle-même et au niveau local, la réaction est plus mesurée : "On va dire que ça ne me surprend pas", conclut Alain Foignot, un brin blasé...
* Christine Durnerin est Maire-Adjoint de la ville de Dijon au cadre de vie, à l’environnement, aux parcs et jardins, Conseillère communautaire au Grand Dijon, Présidente du S.M.E.B.O.A. Présidente de la Commission locale de l’Eau et du Comité de rivière du S.AG.E. et du Contrat de Rivière de l’Ouche.
