
Ils ont entre 18 et 25 ans. La télévision ? Très peu pour eux : ils préfèrent les livres. Les soldes ? A consommer avec modération : tout excès est nuisible. L’apéro entre copains le week-end ? Moins plaisant qu’un déjeuner en famille. Les petites amies à l’essai ? Jamais ! Une fiancée ou rien. Bref, ils sont très loin des autres jeunes gens du même âge : ils sont nationalistes et catholiques. Pratiquants à temps plein.
Les refoulés du débat sur l'identité nationale
Tout a commencé mercredi 16 décembre dernier, lors du "débat" sur l'identité nationale organisé à la préfecture de Dijon. Tandis que le Front de gauche regroupe quelques sympathisants, histoire de dénoncer la mascarade, le rassemblement se voit perturbé par l’arrivée de jeunes nationalistes catholiques (sic), déçus de ne pas avoir pu assister à la rencontre officielle. Très rapidement, l’ambiance devient électrique devant les portes de la préfecture, les deux factions arborant des avis divergents sur la notion d’identité nationale et l’intérêt d’un tel débat. Mais qui sont véritablement ces adolescents, qualifiés de "jeunes fachos" par les militants du Front de gauche ? dijOnscOpe a tenté de mieux les connaître...
Rendez-vous est donc donné dans un salon de thé du centre-ville. Dès leur arrivée, Thibaut, 23 ans, et François, 27 ans, posent naturellement les jalons de notre échange : "La société actuelle repose sur la destruction du catholicisme comme culture. Pourquoi l’infosphère n’évoque-t-elle jamais ce problème ?" Me voilà interviewée avant même d’avoir pu poser une question. Et de me faire damer le pion sur la réponse : "Peut-être parce que les journalistes n’ont pas le niveau intellectuel pour aborder de tels problèmes." Inutile d’avancer que le manque d’intérêt peut également être un argument ; je le sens peu recevable... Bien, expliquez-nous alors !
Contre la mort constatée de l'Etat-nation (catholique)
Notre entretien débute ainsi par une conversation sur les évolutions de notre société et leur constat de déliquescence des valeurs traditionnelles : "La France est une famille de familles, soudées par une continuité historique, souligne Thibaut. Le problème aujourd’hui est que les élites nous ont trahis avec l'avènement du capitalisme acharné et de l'Etat laïc, le mépris de la religion, la mondialisation excessive. Tout ceci a entrainé la mort progressive de l’Etat-nation." François acquiesce : "La démocratie n’a de sens que si les citoyens sont formés à son usage, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui." Voilà pourquoi ces jeunes nationalistes passent la majeure partie de leur temps libre à se cultiver, rejetant ce qu’ils considèrent comme étant le modèle d’homme en vigueur aujourd’hui : "l’individu consommateur déraciné".
L’un et l’autre enchaînent les citations d’auteur, faisant constamment référence à des ouvrages étudiés. Incontestablement, ces jeunes gens pensent que le savoir est source de pouvoir : "L’appauvrissement intellectuel et culturel des personnes est quasiment une conspiration des élites pour mieux les manipuler et ainsi, préserver les rapports de force et maintenir la domination sur les populations." Contrôle du territoire, contrôle des populations : ces jeunes érudits pensent fermement que le capitalisme forcené est une source de décadence, de même que l’obéissance aveugle des populations et les théories de sécurité globale, telle la militarisation de la police.
Contre la passivité de "l’individu consommateur déraciné"
Thibaut est catégorique : « Je n’élèverai pas mes enfants pour qu’ils reviennent un jour à la maison avec des piercings sur la langue en disant que vomir au concert de Lady gaga est génial. » Malgré son jeune âge, il revendique haut et fort ce désir de lutte en faveur d’un absolu qui le dépasse. Même engagement du côté de François, qui résume au nom de tous : "Nous servons notre pays sous l’angle nationaliste ; nous servons notre foi sous l’angle catholique". Ainsi, les élections et tout autre moment de la vie politique ne sont qu’une étape et n’ont aucun poids véritable sur la société : seul importe de savoir comment faire perdurer la modèle de culture française à plus longue échelle.
De fait, leur pensée pratique s’articule autour d’un axe : "Notre monde, et plus particulièrement la France, est en train de s’effondrer : est-ce qu’on attend ? Non. Est-ce qu’on regarde ? Non." L’éducation religieuse semble donc au cœur de leur préoccupation, clé de voute permettant ensuite à leurs enfants d’incarner à leur tour cette continuité historique. A Dijon, ces jeunes nationalistes catholiques sont regroupés en réseaux de militants : groupes de travail (catéchisme, soutien scolaire), associations (religieuses, humanitaires), groupement politique (Renouveau Français). Une constante toutefois : un besoin de radicalité et une quête d’absolu dont les racines sont ancrées au-delà de l’éducation bourgeoise et catholique qu’on leur prête souvent.
A suivre :
Partie 2 : Témoignages personnels
Partie 3 : Les valeurs du nationaliste catholique
