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Dijon / Bourgogne

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Billet de blog 13 mars 2010

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Têtes-à-têtes* Régionales 2010 en Bourgogne : Les dessous de... Philippe Hervieu / Julien Gonzales sur le grill

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Neuvième et dernière partie de nos rendez-vous pour les élections régionales des 14 et 21 mars prochains avec Philippe Hervieu et Julien Gonzalez, têtes de liste respectives de "Europe Écologie Bourgogne" et de "l'Alliance Écologiste indépendante". Petit jeu de questions/réponses pour cette deuxième partie de leur interview...

* Philippe Hervieu, tête de liste régionale de la liste "Europe Écologie Bourgogne"

1 - Papiers s'il vous plaît !


- Date de naissance : 21 avril 1953
- Ville et pays d'origine : Blida, en Algérie ; arrivée à Dijon en 1962.
- Situation familiale : remarié ; famille recomposée de cinq enfants.
- Profession / Mandat : vice-président de la région depuis 2004.
- Passé politique : Militant des Verts depuis 1972/73.
- Identité numérique : "J'ai un Facebook et un Twitter mais j'ai arrêté le blog en 2008".

2 - Les "Qu'en pensez-vous?" et "Pour ou contre ?" de l'actualité...

Que pensez-vous des récentes vagues d'expulsions de Roms et de Géorgiens à Dijon?


"Ça m'agace, ce n'est pas acceptable. Nous devons être capables de mettre en place des structures d'accueil décentes dans nos villes et à Dijon en particulier. Les gens voyagent parce qu'ils crèvent de faim et non pas par plaisir : quand on habite quelque part, qu'on y a sa famille, son travail et que l'on y vit bien, on ne s'en va pas. Quand ce n'est pas le cas, on va tenter sa chance ailleurs et on doit l'accepter. La France doit rester une terre d'accueil. Or la manière dont on accueille les gens à Dijon n'est pas acceptable. L'autre jour encore, il y a eu le feu au squat des Roms rue des Creusots... Ça fait peur. En plus, il ne faut pas oublier qu'ils sont Européens...

Le 2 décembre 2009, Greenpeace envahissait l'Assemblée nationale... Si nous n'en sommes pas au coup d'État, c'était en tout cas un coup de force. Dans un autre genre, on a l'impression aujourd'hui que si l'on ose reconnaître publiquement que l'on prend des bains, on risque la flagellation... Que pensez-vous de l'extrémisme écolo ?


Depuis les années 1970, deux stratégies sont utilisées contre les écolos. La première, c'est d'essayer de les diviser : ça a très bien marché dans les années 1980 et 1990 avec la création de partis de toutes pièces comme Génération écologique, financé on le sait aujourd'hui par le cabinet de Rocard puis celui d'Édouard Balladur. L'autre méthode, c'est de les caricaturer : c'est assez facile car c'est rigolo. On nous assimile souvent à des fondamentalistes qui veulent revenir à la bougie. Bien sûr, certains se complaisent là-dedans : c'est la "deep écologie". Ceux-là, si vous allez faire vos courses en bagnole, ils vont vous insulter. Cette frange fondamentaliste permet à nos adversaires de nous assimiler à eux.


Mais nous, nous ne sommes pas pour la décroissance, hormis celle de l'impact sur l'environnement de l'activité humaine. Notre projet est de rendre notre modèle économique compatible avec les ressources de la planète. Or, pour que le bien-être dans lequel nous sommes installés perdure, il faut adapter ce modèle aux possibilités de ressources. Finalement, ce sont ceux qui veulent continuer sur un modèle qui est obsolète et qui nous envoient dans le mur qui sont pour la décroissance.

Pour ou contre les faucheurs OGM : s'ils œuvraient en Bourgogne et que vous étiez président du Conseil régional, vous les aideriez ?


C'est la question de la désobéissance civile : à partir de quand est-il légitime de désobéir ou pas ? Est-ce qu'il était légitime qu'un cheminot, qui conduisait un train emmenant des juifs à Auschwitz, empêche le train de circuler ? C'est un exemple extrême pour démontrer que la désobéissance peut être utile à un moment donné. Nous avons voté pour que la région soit sans OGM, donc la question ne devrait pas se poser... Actuellement, il n'y a pas d'OGM plantés en Bourgogne. D'ailleurs, ça ne serait pas très bon pour le vin...

Comme la co-listière NPA dans le Vaucluse, imaginez que l'une de vos co-listière décide subitement de porter le voile... Vous seriez pour ou contre ?


Premièrement, ça ne risque pas d'arriver... Mais si ça devait arriver, on ne l'accepterait pas : c'est quand même l'enfermement de la femme, enfin, je parle surtout de la burqa. Après, le voile sur la tête me choque beaucoup moins personnellement. Ça fait partie de l'identité culturelle des gens qui nous ont rejoints. C'est la limite entre l'identité culturelle et le statut de la femme. On va pas non plus imposer des codes vestimentaires, ce serait de l'impérialisme culturel !

3 - Portraits "Président de région" et "chino-bourguignon"


Si vous êtes élu président de région, quelle sera votre première action symbolique ?


Ce sera de mettre en place des structures participatives qui permettront des co-décisions des politiques publiques, ce que j'ai fait dans l'économie sociale et solidaire. Nous voulons transformer l'économie en Bourgogne dans le but de l'adapter au problème écologique et cela ne peut se faire que dans la concertation. Il faut mettre en place des pôles non pas de compétitivité mais de coopération ; si l'on veut créer des filières bio, la valorisation du bois, la valorisation des déchets, il faut le faire en coopération avec tous les acteurs de la filière : les CCI, les chambres de métiers, les syndicats patronaux et ouvriers, les citoyens, les collectivités locales... On met tout ça dans un bocal, on touille, on fait chauffer à petit feu... et voilà !

Si vous êtes élu président de région, quelle sera la qualité qui vous sera utile et le défaut que vous aurez à combattre ?


Je suis déterminé. Donc sur le versant négatif je suis opiniâtre et sur celui positif je mets tout en œuvre pour arriver à ce que je veux.

Si vous étiez... un lieu bourguignon ?


Les vignes de la côte parce que j'aime bien le vin, que mon grand-père était vigneron et que c'est un métier que j'aurais aimé faire.

Si vous étiez... une personnalité bourguignonne ?


Gustave Eiffel, il a fait de belles choses. C'était quelqu'un de déterminé : il a fait la Tour Eiffel contre l'avis de tout le monde et c'est aujourd'hui un lieu emblématique ! Il a su construire et dans la vie, c'est la construction qui m'intéresse car ça nécessite de la persévérance et de la présence en même temps."

* Julien Gonzales, tête de liste d'Alliance Écologiste Indépendante


Quel bilan tracez-vous de la mandature de François Patriat ?


"Le bilan pour nous est assez contrasté : il y a des progrès qui ont été faits dans certains domaines, notamment dans le développement de l'agriculture biologique, des TER (Trains Express Régionaux) ou des énergies renouvelables. Lors de la précédente mandature, celle de Jean-Pierre Soisson, nous avons touché le fond, on ne pouvait faire que mieux étant donné que l'on partait de zéro. Jean-Pierre Soisson avait notamment coupé les subventions au groupement des agrobiologistes de Bourgogne.


Mais un certain nombre de points sont, pour nous, négatifs : sous sa mandature, François Patriat a continué à soutenir le circuit de Nevers Magny-Cours, il a apporté son soutien au projet d'aéroport de Longvic, à la LiNo, au pôle Nucléaire Bourgogne, aux porcheries industrielles et même au projet, aujourd'hui abandonné, de mine de charbon dans la Nièvre. Le budget de la communication a par ailleurs triplé entre 2004 et 2009 et des gaspillages ont aussi été faits lors de voyages à l'étranger pas forcément nécessaires. Un bilan qui est donc contradictoire car comment faire de la Bourgogne une référence en matière d'environnement en soutenant certains projets totalement anti-écologiques ?

Devant les électeurs se présente deux listes dites écolo : celle de Philippe Hervieu est la vôtre. Qu'est-ce qui foncièrement vous différencie?


Notre programme est pour nous beaucoup plus radical : sur la LiNo, les Verts ont adopté une position mi-figue mi-raisin, le cul entre deux chaises. Une position totalement absurde alors que de notre côté, nous voulons revoir globalement la politique de la circulation en ville en mettant en place des parkings périphériques autour de Dijon pour encourager les gens à utiliser des bus gratuits. Sur d'autres sujets, comme le WiMax, Philippe Hervieu n'est pas intervenu (cf. débat télévisé de France 3 du 14 février 2010). Nous nous opposons à l'implantation du Wimax, qui représente tout de même à 16 millions d'euros, car nous sommes inquiets sur les effets sanitaires des ondes électromagnétiques. Pour supplanter cette technique, nous proposons du 100 % filaire sans terminaison hertzienne.


De plus, lors de discussions que nous avons entamé en octobre, les Verts ne voulaient pas de partenariat mais une dissolution dans la liste avec le principe d'un ralliement à François Patriat au second tour. Selon moi, si l'on fait plus de 10%, c'est pour proposer une alternative à Pavadet et Sautriat, les candidats interchangeables de l'État UMPS. Par dessus tout, Europe Écologie a été malhonnête avec ses électeurs : lorsqu'ils ont quitté la majorité régionale, Philippe Hervieu n'a pas quitté son poste de vice-président. Il souhaitait manifestement garder ses avantages. Dans ces conditions difficiles de partir avec ce genre de personne.

Entrons alors directement dans le vif du sujet, c'est-à-dire votre programme et plus particulièrement sur le volet des transports. Contre la LGV mais pour le développement du rail, expliquez-nous en quoi réside la différence?


Le rôle de la région, c'est le développement du TER et non celui du TGV. Il reste un certain nombre de mesures à prendre sur le réseau TER bourguignon comme la modernisation de certaines lignes (Dijon > Auxerre, Dijon > Nevers) mais aussi l'ouverture d'une nouvelle ligne alternative : le tronçon Nevers > Clamecy. Un axe qui permettra d'éviter d'investir 1, 5 milliards d'euros dans le projet autoroutier Bourges-Auxerre-Troyes.


En lieu et place de la LGV, nous proposons la mise en place du TGV pendulaire qui permettrait de le faire passer sur les lignes existantes et de gagner ainsi 20 minutes sur le trajet Dijon-Mulhouse sans pour autant détruire les terres agricoles. Nos dirigeants ont fait le choix du plus coûteux et du plus pharaonique car c'est la seule chose qu'ils ont à proposer. De notre côté, nous proposons la gratuité des transports dans les villes : au lieu de gaspiller l'argent dans ses projets, le conseil régional pourrait investir pour rendre les transports gratuits.

Sur un autre plan, vous souhaitez faire de la Bourgogne une "région pilote en matière de développement des énergies renouvelables, d'habitat et d'agrobiologique". En matière d'emploi, comment ceci pourrait se traduire et dans quelles filières ?


L'agriculture biologique ne représente aujourd'hui que 2% de la surface agricole bourguignonne alors que le Grenelle de l'environnement prévoit qu'il y ait dans chaque région 20% de terres biologiques en 2020... Il y a donc du travail. Il faut inciter les jeunes à s'installer en agriculture biologique, pour développer l'agriculture de proximité notamment par le biais des AMAP ou encore par la valorisation des circuits courts entre producteurs et consommateurs. Au niveau de l'habitat, dans les bâtiments qui sont de la compétence de la région, c'est-à-dire les lycées par exemple, il faut développer des modes de chauffage écologique : photovoltaïque ou chaufferie bois.

Vous parlez beaucoup d'agriculture mais la Bourgogne, c'est aussi l'industrie. Quelles sont vos propositions dans ce domaine et par extension, dans le domaine de la recherche ou de la formation ?


Vous me posez une colle, je dois avouer que l'on n'y a même pas réfléchi pour être honnête. La région n'est pas vraiment compétente pour intervenir dans ce domaine... D'ailleurs, dans le débat télé, ils ont rappelé que la région ne finançait pas les grandes entreprises.

Autre question alors: dans votre programme, vous proposez d'éco-conditionaliser les subventions attribuées par la région. Selon quels critères et vers quel public ?


Nous voulons fixer des cadres pour ne pas donner les aides régionales à n'importe qui. Il faut fixer des critères pour donner des subventions aux entreprises, aux associations ou collectivités territoriales : non-renouvellement des subventions à Nevers Magny-Cours ou encore la nécessité d'un engagement concret en terme d'emplois de la part des entreprises demandeuses avec la garantie de ne pas délocaliser dans les années qui suivent l'attribution.

Pour demain, quel avenir voyez-vous pour la Bourgogne? Quelle image devra-t-elle exporter, vendre pour pouvoir se développer et devenir attractive tant au niveau national qu'international ?


Nous ne sommes pas spécialement dans ce principe pour notre part, nous ne cherchons pas à faire rayonner la Bourgogne. Nous voulons être au plus près des préoccupations des Bourguignons tout en faisant de cette région un modèle sur les différents points que je vous ai cités précédemment : énergies renouvelables, agriculture biologique, éco-habitat, ce qui serait créateur d'emplois. Il faut, sous 30 ans, préparer une nouvelle génération, pour sortir du nucléaire.


En 2004, vous vous étiez retirés au second tour, sans donner de consigne de vote. Quel sera votre stratégie au soir du 14 mars ?


Si l'on ne fait pas les 14 %, on se retirera sans donner de consigne de vote. Le programme des deux candidats est totalement interchangeable. L'un a un peu pris en compte les questions écologiques tout en menant des actions contradictoires. Le deuxième, lui, est à 20.000 lieues sous les mers en matière d'écologie, c'est totalement inexistant de son programme."

* Têtes-à-têtes : La Rédaction entre dans le cœur des Régionales et organise un face-à-face entre chaque tête de liste régionale et deux journalistes de dijOnscOpe. Objectif ? Les confronter aux questions directes du journal sur les thèmes d’actualité et surtout, aux exemples concrets impliquant l’action du Conseil Régional.

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