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Billet de blog 14 octobre 2009

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« Après le Pacs, à quand le mariage homosexuel ?... »

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Depuis mardi 13 octobre, Christine Boutin est l'invitée de tous les plateaux télé à l’occasion des 10 ans du Pacte Civil de Solidarité (Pacs) le mois prochain. Ainsi, dans une interview sur France Info, la présidente du parti chrétien-démocrate lance de façon très « Peace and love » : «Moi, les homosexuels, je les aime autant que les hétérosexuels : ils doivent avoir des droits identiques». Droits identiques... Plus loin que le Pacs, soutiendrait-elle la légalisation du mariage ? En effet, le Pacs, initialement destiné aux homosexuels, est aujourd'hui signé à près de 95 % par des hétérosexuels. dijOnscOpe a rencontré des membres de la communauté homosexuelle pour avoir leur avis sur la question...

Premier constat : « Le Pacs est beaucoup moins avantageux que le mariage »
Interrogé sur le PACS, Jean-Louis Rougemon, responsable de la commission LGBT (Lesbiennes, Bisexuels, Gays, Transgenres) d’Amnesty International France, estime que l’égalité de traitement devrait être la même entre tous les citoyens : « Amnesty International considère que la loi ne devrait pas faire de distinctions lorsque deux personnes veulent s’unir. Notre commission suggère aux États de prendre des mesures pour que les personnes de même sexe puissent s’unir. Le Pacs est une forme d’union qui n’apporte pas les mêmes avantages que le mariage». Et de rappeler ainsi que lors du mariage le beau-parent est reconnu. Le responsable de la commission soulève ainsi la cruciale question de l’homoparentalité.

Adoption impossible

Romain Chapaz est l’un des dirigeants de CIGaLes, "association dijonnaise militant pour la reconnaissance sociale de l’homosexualité, la bisexualité et la transidentité, et pour obtenir l’égalité des droits". Il rappelle que le Pacs est un droit républicain accessible à toute la société mais qui répondait initialement à une attente des couples homosexuels. Il souligne que le Pacte Civil de Solidarité n’éteint nullement les revendications homosexuelles pour l’accès au mariage. Pour lui, le problème de cette légalisation est simple mais concret : « ce qui pose problème dans cette question de la légalisation du mariage, c’est le problème de la filiation. Le mariage permettrait probablement la légalisation de l’adoption par les homosexuels ».

Pension de réversion conditionnée

Autre lacune soulevée par le jeune homme : la pension de réversion, destinée au conjoint en cas de décès. « Le partenaire pacsé ne peut pas prétendre à ce droit, ni dans le régime général d’assurance vieillesse ni dans le régime de la fonction publique ». Certes, cette pension est effective dans certains cas mais le couple doit alors prouver ses deux ans de vie commune. Cela constitue, selon le membre de CIGaLes, une discrimination par rapport au mariage. Par ailleurs, chose assez méconnue, le jeune militant rappelle que le Pacs n’est pas appliqué dans certains territoires des Dom-Tom. Ce qui constitue de nouveau une discrimination. Romain Chappaz insiste néanmoins sur ce qui lui semble le plus important : « Le vrai problème politique du Pacs c’est l’homoparentalité. Un couple homo ne peut ni adopter ni faire appel à la procréation artificielle. » Et le jeune militant d’ajouter : « le Pacs ne répond pas aux revendications d’égalité des droits».

"Le Pacs a montré ses limites"

Concernant le Pacte Civil de Solidarité, les homosexuels sont généralement assez nuancés et critiques. Mathieu, jeune éducateur et membre de CIGaLes nous avoue son scepticisme : « en 1999, je pensais que le Pacs était une avancée pour les homos. Mais aujourd’hui, je ne suis pas super enthousiaste à l’idée des 10 ans du Pacs. Il a montré ses limites et a peu évolué. De nos jours c’est une union majoritairement hétérosexuelle. Il ne répond nullement aux revendications en termes de mariage et d’adoption. Certes le Pacs s’est banalisé mais il y a une forme d’homophobie dès qu’on parle de famille et de filiation. Il est clair que le Pacs est « en dessous » du mariage. »

Un moyen de faire taire les revendications homosexuelles ?

Dimitri a 32 ans. Lorsqu’il s’est pacsé en 2006, c’était surtout par amour. Il pensait également que cela permettrait à son ami d’origine asiatique de bénéficier d’une carte de séjour plus facilement : « il voulait vivre en France, on pensait que ce serait plus simple pour lui une fois que nous serions pacsés. Finalement, ça n’a rien changé. Pour avoir une carte de séjour, nous devions prouver que nous avions eu un an de vie commune. Or, il ne pouvait obtenir qu’un visa de trois mois. Finalement il est reparti dans son pays. Nous étions malheureux, pleins de désillusions. Je peux dire que cet échec a accéléré notre rupture. Aujourd’hui, Avec le recul, je pense que le Pacs a surtout été un moyen de faire taire les revendications homosexuelles. »

Rétrograde la France ?...

Pierre-Yves, jeune professeur de 29 ans s’est pacsé en Angleterre en 2003. Problème : si le mariage à l’étranger est reconnu partout, le Pacs lui, n’a de valeur juridique qu’en France. Il pointe le manque de possibilité des gays et lesbiennes : « les homos n’ont pas les mêmes choix que les hétéros. Ils n'ont le choix qu'entre l’union libre ou le Pacs, ce qui est insuffisant. Cela montre combien le poids culturel judéo-chrétien est important. Rappelons-nous des manifestations suscitées par le Pacs il y a 10 ans et du discours de Christine Boutin brandissant sa bible à la tribune de l’Assemblée. »
Pierre-Yves estime que le mariage permettrait la reconnaissance officielle des unions homosexuelles : « les homos veulent que leur couple soit reconnu afin que la société les reconnaisse enfin. » Sarah est allemande. Dans son pays d’origine, le régime de partenariat institué pour les homosexuels se rapproche en de nombreux points du mariage. Si la jeune fille trouve que le Pacs est « une première avancée », elle estime toutefois que la France n’accepte pas suffisamment les homos.
Rappelons qu’en 2008, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme pour discrimination envers les adoptants homosexuels. Celle-ci avait souligné qu’en ouvrant l’adoption aux célibataires, la législation française ne pouvait créer une distinction selon l’orientation sexuelle du demandeur...

Pour info :
CIGaLes prépare une action publique le samedi 14 novembre prochain, soit une distribution de tracts pour interpeller le grand public, demander l’amélioration du PACS et revendiquer le mariage homosexuel.

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