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Billet de blog 14 novembre 2009

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14-18 : où sont les Descendants de poilus à Dijon?

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Depuis le décès de Lazare Ponticelli, dernier poilu français, le 12 mars 2008, la "Der des Der" ne recense plus de témoins directs. Seuls subsistent les efforts de leur descendance pour que le devoir de mémoire continue d’être perpétué auprès des générations futures. Marcel Mesnard, membre de l’UNC (Union Nationale des Combattants) de Dijon et petit-fils d’une famille dont les grands-parents ont vécu la Grande Guerre (1914-1918), est l’un d’eux. Pour dijOnscOpe, il évoque cette période tragique à travers ses souvenirs de famille...

Une famille de combattants de la Grande Guerre (1914-1918)


« Mon grand-père maternel, Marcel Baudon, faisait partie du 8ème régiment de cuirassiers. Il est décédé le 21 avril 1917 à Berry-au-Bac, en Picardie, pour avoir sauté sur une mine avec d’autres camarades de régiment. Du côté paternel, mon grand-père, Alfred Mesnard, ouvrier civil de profession, a combattu lors de la Grande Guerre et a eu la chance, en plus d’y avoir survécu, de n’avoir été blessé que légèrement, bien que le traumatisme psychologique soit réel. Son frère, Joseph, mon grand-oncle, a lui aussi connu l’enfer des tranchées. Il a également survécu, bien qu’il ait été déclaré mort prématurément et qu’on lui ait décerné la médaille militaire à titre posthume. Toutefois, il l’a obtenu à nouveau quand la rumeur de son décès s’avéra fausse. Il a néanmoins été gazé, a perdu un œil et a été réformé en 1917. Mais se voir accorder deux fois la médaille militaire, voilà qui n’était pas courant. Il a rédigé ses mémoires au sortir de la guerre.
Un travail louable jugé « ingrat »
Joseph était tambour major au 27ème RI. Les officiers ne voulaient des gens de la musique car ils les considéraient « inutiles ». A vrai dire, leur tâche était à la fois louable et ingrate. Ils servaient d’infirmiers, ramassaient les morts, les blessés et les chevaux sur le terrain. Ils risquaient leur vie autant que les soldats eux-mêmes. Comme eux, ils devaient lutter contre la boue et les rats. De nombreux soldats ont eu les pieds déchirés par ces derniers alors qu’ils étaient encore vivants mais les rongeurs s’attaquaient également aux blessés et aux cadavres.

D’étonnantes retrouvailles


Cinq ou six ans avant sa mort, mon grand-oncle lut dans le Bien Public que quelqu’un de Savigny-lès-Beaune en Côte d’Or recherchait celui qui l’avait jadis sauvé sur le champ de bataille, je ne sais plus où exactement. Plusieurs décennies auparavant, lors d’une opération destinée à rechercher d’éventuels blessés sur le terrain, mon grand-oncle aperçut quelqu’un qui gisait gravement blessé. Les infirmiers qui l’accompagnaient refusèrent de s’en occuper car ils le considéraient comme perdu. Il l’a néanmoins pris sur son dos pour le ramener au poste de secours le plus proche. Cinquante ans plus tard, tous les deux se retrouvaient dans de meilleures circonstances. Pour anecdote, ils n’habitaient qu’à une dizaine de kilomètres l’un de l’autre !
Dès son retour du front en 1917, mon grand-oncle remonta sur Paris où il reprit sa profession de coiffeur. Il avait pour clients des gens qui travaillaient au Ministère de la Guerre. Notamment, un compatriote de Vigny-sur-Ouche, qu’il avait rencontré par hasard, lui annonça début novembre 1918 : « Attention, le 11 novembre à 11 heures, tu vas entendre toutes les cloches sonner ». Ainsi, mon grand-oncle fut l’un des premiers à connaître l’imminence de l’armistice alors que rien n’était encore officiel.

« La guerre lui avait fait aimer la vie »


Joseph avait su vivre son sursis après cette expérience traumatisante. Plus que jamais, la guerre lui avait fait aimer la vie car il savait à quel point elle était fragile. Il s’est éteint à 94 ans, il y a maintenant près de vingt ans. Comment perpétuer aujourd’hui le devoir de mémoire collectif ?
Bien qu’il n’y ait plus de témoins directs de la Grande Guerre, il reste néanmoins leurs descendants et les amis de ces derniers. Dans toutes les familles françaises, il est des membres qui ont vécu cet épisode sanglant de l’histoire de notre pays. Aujourd’hui, de nombreuses associations d’anciens combattants comme l’UNC et autres associations patriotiques, continuent de célébrer le 11 novembre. Certains, comme le Souvenir français, se chargent d’entretenir les tombes des poilus morts au combat.
Ce devoir de mémoire est enseigné annuellement lors de préparations militaires. De jeunes garçons et de jeunes filles de 20 à 30 ans sont ainsi informés des conflits qu’a connu la France de la guerre franco-prussienne (1870-1871) à la Guerre d’Algérie (1954-1962), en passant par la guerre de 39-45 et l’Indochine (1946-1954). Jacques Blay, président du Souvenir français, m’a chargé de leur parler de la guerre de 14-18.
Ce devoir de mémoire ne doit pas s’arrêter aux militaires mais concerne l’ensemble de la population française. C’est grâce au sacrifice de nos aînés que les générations actuelles peuvent vivre libres et en paix».

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