
Les supporters français partis en Afrique du Sud soutenir les Bleus pratiquent-ils un tourisme solidaire ? Quelles seront les retombées économiques de leur voyage pour les populations locales et notamment pour les plus déshéritées d'entre elles ? Toujours est-il que ces temps-ci, les interrogations sur les méfaits du tourisme de masse sont nombreuses. Exploitation des populations locales, atteintes à l'environnement, "bétonisation" des côtes... En réaction, a émergé le concept de tourisme solidaire. Son but : réorienter les bénéfices de l'activité touristique vers les populations locales. Hyper tendance, cette nouvelle pratique est en plein "boom". A quelques jours des grandes vacances, peut-être certains d'entre vous sont-ils tentés de voyager autrement, pour partir véritablement à la rencontre de l'autre, de son pays et de sa culture. Du Maroc à l'Inde en passant par le Burkina, le choix abonde...
Être acteur de son voyage
"Nous pratiquons le concept du commerce équitable appliqué à l'activité touristique, explique Julien Buot, coordinateur de l'Association pour le tourisme équitable et solidaire (ATES), premier réseau du tourisme solidaire en France. Nous faisons le constat que l'activité touristique internationale profite peu aux pays pauvres. Et même, plus le pays est pauvre, plus le taux de fuite de l'argent est important. Dans le cas du Sénégal, plus de 90% de l'argent retourne dans les pays riches. Les animateurs sont Américains, Canadiens ou Français ; la viande est argentine et le mobilier suédois".
Sur le plan économique et humain, le tourisme est l'une des activités les plus importantes au niveau mondial. Ces dernières années ont vu l'explosion du tourisme dans les pays du sud, souvent à grands renforts de publicités racoleuses, d'offres de séjours alléchants à des prix imbattables et de vols dégriffés. Avouons que quitter Dijon pour quelques jours et s'envoler pour Djerba ou la République dominicaine au mois de décembre, c'est plutôt tentant ! D'autant plus quand ce n'est pas cher... Mais quelles sont les conséquences pour la population locale et l'environnement ?
Pour inverser la tendance, l'ATES s'engage à établir un partenariat équilibré entre son activité de voyagiste et ses partenaires dans les pays du sud. "Nous signons des conventions et nous veillons à ce que nos partenaires du sud aient une juste rémunération. Ensuite, nous appliquons le principe de solidarité internationale au tourisme : une partie du prix du voyage sert pour des projets d'intérêt collectif. Nous effectuons aussi un travail de sensibilisation des voyageurs, notamment aux us et coutumes des populations locales", résume le coordinateur de l'ATES.
Des voyages plus chers ?
"Bien sûr, lorsqu'on rémunère correctement les gens sur place, cela a un coût. Pour autant , nous proposons des voyages au Maroc à 500 euros". Burkina, Pérou, Bulgarie, ... les offres existent sur tous les continents. L'an dernier, 6.000 personnes sont parties avec nous mais c'est encore faible quand on pense aux dix millions de Français qui partent chaque année à l'étranger", rapporte Julien Buot. Mais tous les touristes ne passent pas par des voyagistes pour pratiquer un tourisme solidaire. Les globe-trotteurs, par exemple, peuvent s'informer auprès de l'association Echoway, qui recherche les lieux solidaires de par le monde.
Pour Julien Buot, "l'intérêt pour ce type de tourisme remonte au début des années 2000. Les gens sont de plus en plus sensibilisés au problème. Le tourisme solidaire se démocratise". Les personnes qui partent attachent également beaucoup d'importance à la relation sociale qu'elles peuvent nouer avec les habitants. Autrement dit, l'idée est d'éviter la coupure avec le pays d'accueil "façon Club Med", avec des grands complexes fermés sur eux-mêmes, où les touristes se retrouvent entre eux et dans un univers occidentalisé, y compris pour la nourriture, sans parler de l'utilisation bien souvent abusive de l'eau pour la piscine ou le golf, parfois au détriment de l'agriculture locale.
Ce n'est donc pas un hasard si parallèlement et en lien avec le tourisme solidaire ou équitable, se développe le tourisme durable ou responsable, qui veut appliquer les principes du développement durable à l'activité touristique. Autre variante : le tourisme "humanitaire", qui se rapproche en fait davantage du volontariat, du moins lorsqu'il est pratiqué sérieusement. Là encore, reste à faire le tri entre les différentes organisations car certaines n'hésitent pas à orchestrer des campagnes de vaccination en Afrique, effectuées par des personnes sans formation médicale. La bonne volonté, parfois doublée d'à priori, n'est pas suffisante et l'humanitaire est un vrai métier, en plus être d'un engagement fort.
Faire de l'humanitaire pendant ses vacances ?
A l'instar de Projects Abroad, plusieurs organisations de volontariat international proposent des séjours à l'étranger. "Mais attention, ce ne sont pas des vacances, prévient Élisa Glangeaud, directrice adjointe de l'association en France. L'idée est de voyager utile et de découvrir un pays autrement. L'an dernier, nous avons envoyé 5.000 volontaires de par le monde, dont 700 Français, dans 26 pays", se félicite la jeune femme.
Concrètement, ce type d'association travaille en étroite collaboration avec tout un réseau de partenaires locaux. "Selon les motivations et le profil du volontaire, nous proposons une grande variété de missions et de stages d'aide à l'enfance défavorisée, d'écovolontariat, ou d'encadrement sportif. Chaque mission dure un mois, au minimum ; les volontaires sont accueillis dans des familles et les frais sont à la charge du volontaire. Pour leur mission, les volontaires peuvent par exemple se rendre au Népal pour moins de 1.400 euros.
Au-delà de la dimension humanitaire, cette expérience est aussi une opportunité pour connaitre vraiment un pays et être en contact direct avec les populations. "Le week-end, nous proposons des sorties et des visites. Et puis beaucoup de nos volontaires choisissent de prolonger leur séjour à la fin de la mission pour prendre des vacances, une fois qu'ils connaissent bien le pays", précise Élisa Glangeaud.
