"J’ai envie de remplacer un défilé militaire par un défilé citoyen". Par cette simple phrase prononcée jeudi 14 juillet 2011, Eva Joly, candidate Europe écologie Les Verts (EELV) à la Présidentielle de 2012, semble avoir remué une vieille blessure... À considérer les réactions de la classe politique, il semblerait que la candidate écologiste d'origine norvégienne ait touché un point sensible. Ouvrant le bal des polémiques à droite, François Fillon a en effet réagit brutalement, comme le rapporte Le Post.fr : "Je pense que cette dame n'a pas une culture très ancienne de la tradition française, de l'histoire française et des valeurs françaises". En une phrase lancée contre Eva Joly, Fillon a basculé dans le camp des dirigeants UMP qui font leurs les campagnes et obsessions du Front National. Il symbolise ainsi la dérive d'une droite à bout de souffle, dont le seul ressort semble être l'escalade xénophobe" (Lire ici l'article).

De son côté, le Parti socialiste se montre "embarrassé" depuis le début de la polémique résume Europe 1.fr : "Je pense que le 14 juillet, c’est d’abord un hommage donné à la République donc à notre armée, qui se bat aujourd’hui sur beaucoup de terrain", a estimé Martine Aubry. "Je pense qu’il faut garder ce défilé de l’armée pour représenter notre nation. Mais rien n’empêche en même temps de faire une fête de l’égalité chaque 14 juillet. Je crois que les deux vont bien de pair". (...) "Ségolène Royal a aussi estimé que "ce serait une très mauvaise idée que de remettre en cause nos traditions, le 14 juillet, c'est notre fête nationale, c'est la fête de la République, de nos trois valeurs, la liberté, l'égalité, la fraternité, et n'oublions jamais (...) que si nous sommes un peuple libre, c'est parce que justement des hommes et des femmes ont donné leur vie pour que nous (le) soyons". (...) Laurent Fabius s'est dit lui aussi "attaché au défilé du 14 juillet" (Lire ici l'article).
La gauche, si elle ne semble pas de l'avis d'Eva Joly, ne l'a néanmoins pas attaquée sur ses origines étrangères, contrairement à la droite et l'extrême droite dont les propos ont fait réagir l'intéressée dimanche 17 juillet dans le journal Le Point : "Prétendre défendre la République en agitant le démon des origines est une hypocrisie dangereuse". (...) "De tels excès n'étonnent guère quand ils proviennent des habituels matamores de l'identité nationale", a ajouté l'ex-juge d'instruction. "Je ne permets pas que l'on mette en doute mon patriotisme. Je ne suis pas moins française que ceux qui me refusent le droit de m'exprimer" (Lire ici l'article).
Le même jour, à Libreville au Gabon, le Premier ministre se félicitait pourtant de "la polémique" créée par ses propos selon Le Figaro.fr : "On me dit qu'il y a une polémique en France sur les propos que j'ai tenus en réponse à Mme Joly qui proposait de supprimer le défilé militaire du 14 juillet. Je vais vous dire : je m'en félicite parce que je suis en colère" (Lire ici l'article).
> Dans divers communiqués reçus vendredi 15 et samedi 16 juillet 2011, la classe politique régionale réagit également aux propos d'Eva Joly relatifs à la suppression du défilé militaire du 14 juillet.
- Communiqué des Jeunes Actifs de Côte-d’Or (UMP)
"Eva Joly / 14 juillet : une stigmatisation honteuse et irresponsable"
"Les Jeunes Actifs de l’UMP de Côte-d’Or condamnent les propos d’Eva Joly qui a stigmatisé de manière honteuse et irresponsable la Fête nationale, alors que 6 soldats français viennent de donner leurs vies en Afghanistan. Il est inadmissible qu’un responsable politique, qui plus est candidat à une élection présidentielle, puisse tenir de tels propos.
Le défilé du 14 juillet est bien plus qu’un symbole ; c’est la reconnaissance et l’hommage de tout un pays pour celles et ceux qui se battent pour porter à travers le monde les valeurs de la République française et pour défendre la démocratie. C’est précisément, contrairement à ce que laisse entendre Mme Joly, l’expression de notre citoyenneté, d’un devoir collectif de mémoire, de gratitude et de fierté."
- Communiqué Laurent Bourguignat, président du Cercle Gaulliste et conseiller municipal de Dijon (UMP)
"La proposition de Madame Joly est une insulte"
"La proposition de Madame Joly de remplacer le défilé militaire du 14 Juillet par une « grande parade » est une insulte à notre pays, à ceux qui se battent pour lui, à ceux qui lui ont donné leur vie. Chaque jour, nos soldats se battent, non pas par instinct guerrier, mais pour défendre les valeurs de la Liberté, protéger les Français, affirmer la place de la France dans le monde. Ils le font au péril de leur vie. La mort tragique de 6 militaires en Afghanistan cette semaine nous le rappelle cruellement.
L’armée, pilier de notre République, contribue à préserver l’indépendance nationale, à maintenir l’équilibre du monde, à le rendre plus juste contre les dérives extrémistes et la loi du plus fort. Le 14 Juillet est un rendez-vous incontournable pour que la Nation lui exprime son soutien, sa gratitude et sa reconnaissance."
- Communiqué de presse du Mouvement démocrate de Côte-d’Or (Modem)
"Le Mouvement Démocrate de Côte-d’Or, par la voix de son président François Deseille et de son porte-parole Pierre-Louis Monteiro, souhaite réagir aux propos tenus par la candidate Eva Joly (Europe-Ecologie Les Verts).
"Le Mouvement démocrate de Côte-d’Or est consterné par les propos tenus par Eva Joly concernant la suppression du défilé militaire du 14 Juillet. Le Mouvement Démocrate de Côte-d’Or souhaite rappeler à la candidate à l’élection présidentielle Eva Joly que le défilé du 14 Juillet est un symbole républicain, qui rend notamment hommage aux millions de Français qui ont servit sous les drapeaux pour assurer l’indépendance de notre pays et défendre nos idéaux démocratiques.
De plus, le Mouvement Démocrate de Côte-d’Or trouve ces propos particulièrement malvenus alors que six soldats français sont morts ces derniers jours aux combats en Afghanistan. Leurs sacrifices, tout comme ceux de leurs ancêtres, méritent d’être reconnus et commémorés par la nation au moins un jour par an.
Localement, le Mouvement Démocrate de Côte-d’Or rappelle également l’importance qu’ont nos armées dans notre département de la Côte d’Or. Les Côte-d’Oriens bénéficient grandement de l’implantation de base aérienne (BA 102), des casernes (Auxonne,...) et de leurs retombés économiques. Dès lors, les défilés du 14 Juillet sont aussi des moments de communion et de reconnaissance entre la population locale et nos différents corps d’armées. Enfin, si une réflexion devait être menée sur notre armée, le Mouvement Démocrate de Côte-d’Or privilégierait plutôt une réflexion quant à la réalisation d’une armée européenne de premier rang, capable de faire exister dans les faits une Europe politique et diplomatique efficace et écoutée."
- Communiqué d'Édouard Ferrand, président du groupe Front national au conseil régional de Bourgogne
"Contre la double nationalité"
"La candidature à l’élection présidentielle française de la franco-norvégienne Eva Joly, née en Norvège, est une aberration politique. Par comparaison, l'article II de la Constitution américaine et les amendements qui s'y rattachent fixent les critères d'éligibilité pour le président et le vice-président : pour être éligible à l'élection présidentielle américaine, il faut notamment être citoyen des Etats-Unis à la naissance. De plus, on s'assimile plus facilement à une nation lorsqu'on fait l'effort de renoncer à la nationalité de sa première patrie. C'est une décision difficile, bien sûr, incompréhensible peut-être pour les élites mondialisées, mais c'est surtout un acte magnifique, qui laisse envisager une parfaite assimilation à la nation française.
Sur un autre plan, Eva Joly est en retraite de la fonction publique depuis 2006. Mais d’une manière plus large, le cas Eva Joly met en lumière un sacré dilemme : comment peut-on agir en fonctionnaire de l'Etat de façon éthique, impartiale et responsable et se présenter aux différentes élections politiques ? Il convient de respecter la séparation des pouvoirs ; la fonction de candidat à une élection semble incompatible avec la fonction publique. Pratiquement dans toutes les démocraties du monde, l'exercice de la fonction publique et de la fonction politique est constitutionnellement incompatible ! Au travers de cette confusion des genres, politiciens et hauts fonctionnaires ne sont que les deux parties d’une même caste qui a mené la France aux déficits abyssaux que l’on connaît aujourd’hui et que nous allons léguer aux générations futures.
Tant qu’un fonctionnaire, national ou territorial pourra, à son gré, exercer un mandat sans avoir à démissionner, puis retourner dans son corps d’origine après son aventure politique, la France restera cette machine infernale aux mains de ceux, qui, prétendant la servir, pense en réalité qu’à se servir !"