Au niveau national, les ONG et associations environnementales*, et même les partis écolos*, ne semblent pas tous être d'accord sur le texte de loi dit Grenelle 2 adopté par l'Assemblée nationale mardi 11 mai 2010. Certains se réjouissent des progrès accomplis quand d'autres se sentent frustrés vis-à-vis des promesses qui avaient été faites lors du Grenelle 1. Qu'en pensent les acteurs des associations locales ? Qu'auraient-ils voté s'ils avaient siégé à la place des députés français ? Réponses contrastées...
* Le député qui voit le verre à moitié plein plutôt qu'à moitié vide : Stéphane l fondateur de dijon-ecolo.fr
- Le discours : "Le Grenelle paraît un peu lointain. On ne se sent pas forcément concerné car cela se situe au niveau de l'État et puis cela touche énormément de domaines... Tout cela manque un peu de transparence en fait."
- Les moins : "Le moins est que cela a fait miroiter pas mal de choses... Et des domaines très importants, comme le nucléaire, ont d'office été écartés."
- Les plus : "Le bon, c'est que cela a permis de démocratiser le terme d'écologie. Aujourd'hui, cela ne paraît plus farfelu d'être écolo. Et il n'y a jamais eu autant d'articles de presse depuis l'apparition du Grenelle. De plus, au niveau politique, le Grenelle a permis indirectement la création du parti Europe Écologie, qui mélange les Verts et des membres d'ONG ou d'associations diverses."
- Le vote : "J'aurais voté contre pour signifier que le projet ne va pas assez loin."
* Le député qui ne négocie pas : Alain Fognot l co-responsable du groupe Greenpeace à Dijon
- Le discours : "La prise de conscience n'est pas assez forte encore. Nos députés ne sont pas prêts à changer une économie et c'est pour cela que tout a été revu à la baisse."
- Les moins : "A Noter que le plus important symbole du Grenelle s'est retiré du projet : la Fondation Nicolas Hulot. C'est bien le signe que ça ne tient pas debout comme texte de loi."
- Les plus : "On ne peut pas dire que tout soit négatif. C'est comme pour Copenhague, certains disent que c'est bien parce que c'est la première fois que tout le monde se réunit autour de l'écologie. On peut toujours trouver quelque chose de positif : par exemple, la diminution de la consommation d'électricité dans les bâtiments, c'est très bien, même si là aussi, il existe une régression puisque la barre a été mise moins haut que prévu."
- Le vote : "Des associations sont pour la négociation à long terme mais à Greenpeace, nous préférons souvent le bras de fer... Donc je ne l'aurais pas voté ; trop de choses ont été jetées à la poubelle. Si le texte n'était pas passé d'ailleurs, on aurait peut-être pu faire les choses autrement. "
* Le député qui dégaine son dictionnaire plus vite que son ombre : Thierry Deiller l président de Relais Planète solidaire - Fruimalin à Dijon
- Le discours : ""Ce qui me perturbe dans tout cela, c'est l'impression que les mots perdent de leur sens. Derrière le terme de bio, c'est le petit producteur local qui a du mal à s'en sortir contre les produits distribués dans les grandes surfaces. C'est le même mot mais ces produits n'ont pas la même charge sociale et des entreprises comme EDF ou Renault tentent de se les approprier. Donc comment trouver des solutions quand les problèmes sont mal énoncés ? Comment énoncer correctement un problème quand les mots ont un sens à géométrie variable ? Comment préserver le sens des mots quand des forces contraires s'en saisissent ? Trop de com' tue la com'."
- Les moins : "Du Grenelle 2, c'est vrai qu'il ne reste pas grand-chose du Grenelle 1 car il a été rattrapé par le principe de réalité ; on se doute à qui profite ce principe... Il est probable que le facteur humain ne soit pas au cœur de tout cela."
- Les plus : "Ce qui compte c'est ce qui chemine et a déjà cheminé dans l'esprit des gens ; ce qui les amènera à agir, même un peu. Mais la question est : quelle sera la qualité de leurs mouvements ?"
- Le vote : "Je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il y aura des gens pour se saisir de ce texte de loi, peut-être dans les collectivités locales, pour en faire des choses bien. Donc si j'avais été député, j'aurais voté pour. J'aime mieux qu'il y ait quelque chose que rien du tout. Cela a le mérite d'exister."
* Le député qui a l'esprit de synthèse : François Jacquet l président de Côte-d'Or nature environnement (filiale de France nature environnement)
- Le discours : "Avec la crise, ce n'est plus l'environnement qui est passé en tête des priorités."
- Les moins : "D'après ce que j'en ai lu, il semble qu'il ne reste pas grand-chose du Grenelle 1. C'est le squelette du Grenelle qu'il reste. Les pesticides ne sont plus limités, la taxe sur les camions est reportée à 2012..."
- Les plus : "Tout ce qui peut intervenir en faveur de l'environnement, on peut le considérer comme positif."
- Le vote : "Je pense que je m'orienterais dans l'abstention : tout ce qui peut être considéré comme des avancées est bien mais là, il y a eu trop de recul."
* Le député à qui on ne la fait pas : Gabriel Vaudray l président départemental de Nature et progrès
- Le discours : "C'est une vaste fumisterie et je le pense depuis le début. Je ne vois pas comment Nicolas Sarkozy aurait mis du vert dans sa politique... Rappelons que sa campagne présidentielle était basée sur la croissance ! Il avait besoin de ratisser large et maintenant il doit donner du grain à moudre."
- Les moins : "Ils n'ont rien fait en agriculture puisque les pesticides ne sont pas limités. De toute façon, l'agriculture devrait être intégrée au ministère de l'Écologie comme le sont les transports. Elle y a toute sa place."
- Les plus : "Franchement, je ne vois pas..."
- Le complot : "Les lobbys sont tellement puissants que l'on ne peut rien faire..."
- Le vote : "Contre !"
* Le député qui a séché les cours : Pascal Grondin l responsable de l'antenne WWF de Nevers (Nièvre)
- Le discours : "Je connais bien le Grenelle 1 mais je n'ai pas encore eu le temps de m'intéresser au 2. Le communiqué que j'ai reçu de WWF est un aperçu global de la question. En réalité, c'est assez éloigné de mon terrain de travail. Je crois que ce sera différent une fois que les décrets d'application seront sortis..."
- Le vote : Ne se prononce pas.
Résultat des votes :
Avec 3 votes contre, 1 pour et 2 absentions, le texte de loi Grenelle 2 est rejeté ! Les articles à revoir en commission : limiter les pesticides, ne pas être un frein au développement des éoliennes, avancer la taxe poids-lourds à 2011, se pencher sur la question du nucléaire (en invitant le Réseau sortir du nucléaire à travailler dessus), faire passer l'agriculture au ministère de l'Écologie, contenir les lobbys anti-Grenelle...
*Les députés Verts et socialistes ont voté contre la loi dite Grenelle 2 alors qu'ils avaient voté pour le Grenelle 1 en 2009. Le député Vert Noël Mamère a affirmé ne pas être déçu, car "on n'est déçu que lorsqu'on attend quelque chose des gens". Pour la députée européenne Corinne Lepage, ancienne ministre de l'environnement (1995-1997) et présidente du parti écologiste Cap21, "c'est un espoir qui s'achève : celui d'imaginer que la France pouvait faire sa mue écologique, ou tout au moins celui d'un gouvernement a fortiori de droite, qui prenait la responsabilité historique de cette mue". En revanche, le député européen Europe Ecologie Daniel Cohn-Bendit a dénoncé ceux qui "refusent en bloc" le Grenelle II alors qu'il comporte "des mesures justes".
En ce qui concerne les ONG et associations qui ont participé à l'élaboration du Grenelle environnement, Greenpeace se sent trahi d'avoir participé aux débats : "Novateur en matière de gouvernance, le processus du Grenelle a finalement accouché d'une souris". Pour France Nature Environnement (FNE), qui a appelé à voter en faveur du texte, ce dernier comporte "des avancées trop importantes pour être négligées, malgré des faiblesses incontestables". WWF, de son côté, affirme sur son site internet que le "Grenelle 2, c'est déjà ça !". Source : l'Express.fr et les communiqués des ONG.
