dijOnscOpe

Abonné·e de Mediapart

Billet publié dans

Édition

Dijon / Bourgogne

Suivi par 18 abonnés

Billet de blog 27 mars 2010

dijOnscOpe

Abonné·e de Mediapart

Côte-d'Or: "L'Education nationale est en faillite"

dijOnscOpe

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.


"Donnons à l’école les moyens de ses ambitions", "Notre échelle de valeur ne sert pas à monter mais à grandir"… Les slogans placardés dans le local du Syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et professeurs d’enseignement général (SNUIPP) illustrent bien le message qu'ils ont souhaité exprimer lors d'une conférence de presse, mardi 23 mars 2010 : En Côte d’or, l’éducation nationale serait en faillite...

Comment enseigner aux enseignants ?


Olga Jacques, secrétaire départementale du SNUIpp, est alarmée par "la situation inquiétante de l’éducation nationale". L’un des désaccords majeurs du SNUIPP avec la politique actuelle concerne la réforme de la formation des professeurs des écoles, porteuse d’un certain nombre de dangers selon le syndicat majoritaire des enseignants du premier degré. Jusqu’à maintenant, les aspirants instituteurs devaient obtenir une licence (bac +3) pour pouvoir tenter le concours d’entrée à l’IUFM, pour deux ans (avec une deuxième année en alternance : 1/3 en poste dans une école, 2/3 en formation), qui leur apportait une formation spécifique à l’enseignement en école élémentaire : un cursus généraliste, abordant largement les sciences de l’éducation. «Maintenant, on va demander aux étudiants d’obtenir un master (bac+5) pour ensuite les mettre directement en situation, devant une classe, sans être formé à l’enseignement.»


La «masterisation», selon le terme en vigueur, prévoit notamment que le professeur des écoles fraîchement diplômé passe directement 2/3 de sa première année devant les élèves avant de devenir enseignant à part entière. La formation théorique serait donc réduite à portion congrue. Un scandale selon les enseignants : «L’enseignement ne s’apprend pas sur le tas ! Heureusement qu’ici l’Université de Bourgogne a prévu des formations spécifiques pour les étudiants qui se destinent à ce métier. Mais elle le fait par choix : dans d’autres académies, ce ne sera peut-être pas le cas.»


Et alors que la formation initiale sera, de l’avis du SNUIPP, de moindre qualité, la formation continue ne pourrait même plus corriger ces carences puisqu’elle serait actuellement en voie de disparition pour des raisons budgétaire : «Les formations dans l’académie sont supprimées ou leur nombre de places extrêmement réduit alors qu’elles sont essentielles pour que les enseignants s’adaptent aux changements et effectuent au mieux leur mission. Le rectorat refuse de nous communiquer des chiffres de budget mais nous avons le sentiment qu’ils sont catastrophiques.»

L’argent, nerf de la guerre


Est donc abordée la question des moyens, qui semblent pâtir de la Révision générale des politiques publiques, la si décriée RGPP. Le SNUIPP reproche au gouvernement «une gestion purement comptable de l’éducation. On cherche à faire des économies en supprimant des postes sans se soucier des conséquences», déplorent les enseignants présents. Le résultat : les classes de trente élèves sont légion, les intervenants en informatique, musique, dessin et autres activités d’éveil sont menacés, les personnels spécialisés ne sont plus défrayés pour leurs déplacements, les départs en retraite ne sont pas tous compensés...


«Clairement, cette politique équivaut aussi à sacrifier la scolarisation des enfants de 2 et 3 ans», explique les profs. A ce sujet, on se souvient de la polémique lancée en 2008 par Xavier Darcos, alors ministre de l’éducation, qui réduisait le rôle des enseignants en maternelle à «faire faire des siestes à des enfants et leur changer les couches». Des études indiquent pourtant que plus un enfant va tôt à l’école, plus sa réussite future est favorisée, en particulier dans le cas d’enfants issus des catégories sociales défavorisées. Toutefois, si les craintes exprimées par le syndicat sont fondées, il se pourrait que ce débat de l’âge de scolarisation n’en soit bientôt plus un, faute de place à l’école publique.

Une lutte entre deux modèles de société


Au début de la conférence, les enseignants affirmaient leur soutien à la journée de grève interprofessionnelle et aux revendications des autres salariés du public et du privé au nom de la défense d’un autre modèle de société. «Nous ne sommes pas contre les réformes. Notre syndicat se rend bien compte qu’il faut faire évoluer le système mais pas dans le sens voulu par le gouvernement. Il y a des choix politiques à faire pour que l’éducation redevienne une priorité nationale et pour en finir avec les inégalités d’accès au savoir.»


L’intention est louable mais reste le problème du projet alternatif qui reste à l’heure actuelle peu lisible. De ce fait, l’image véhiculée par les mouvements sociaux des enseignants se résume bien souvent par un combat pour plus de moyens. A qui revient la tâche de bâtir ce modèle alternatif à la politique du gouvernement en la matière ? Sans doute à la gauche politique et syndicale qui, si elle souhaite promouvoir ses valeurs, doit inventer le système qui les portera.


En attendant, la résistance est organisée. Selon le syndicat, 50% des enseignants du premier degré en Côte d’or ont participé à la grève du 23 mars, «une mobilisation très suivie, davantage que ce qu’on a constaté lors des derniers appels à manifester», se félicite le SNUIPP. Le rectorat, qui ne donne plus de chiffre par département, a évoqué quant à lui un taux 25% de grévistes du premier degré sur l’ensemble de l’académie et n’a pas souhaité commenter les revendications syndicales.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.