Aujourd'hui, dijOnscOpe vous présente deux nouveaux auteurs locaux : Bruno Lemoine et Jean-Luc Bourdon. Tous deux sont des écrivains confirmés, l'un romancier et poète, l'autre, auteur et metteur en scène. Deux hommes de lettres qui affichent deux conceptions différentes de l'édition...
Tandis que Bruno souligne l'importance d'avoir des "passeurs" dans le monde de l'édition, Jean-Luc Bourdon préfère aujourd'hui penser que l'édition n'est plus nécessaire à son métier d'écrivain. Mise en lumière de ces deux auteurs par eux-mêmes...
Bruno Lemoine : La théorie des "passeurs" dans le monde de l'édition
Auteur et professeur de Lettres et de Littérature étrangère, Bruno Lemoine n'a pas voulu faire le choix de l'auto-édition, ni celui de l'édition régionale comme Georges Thiéry et Chloë Malbranche (cf. Épisode 1). "L'auto-édition ne m'intéressait pas ; le travail de l'édition ne doit pas être à la charge de l'auteur. Cela fait 15 ans que j'écris. La première fois que j'ai publié, c'était en 2002 aux Éditions Rafaël de Surtis (en région Midi-Pyrénées). C'était une nouvelle fantastique "Judith". Ce qui était intéressant, c'est que c'était dans une anthologie. Or les anthologies concernent les morts alors que je suis bien vivant ! Quand on écrit, ce qu'il faut, ce sont des "passeurs", comme François Dominique (auteur et éditeur dijonnais qui a dirigé les éditions Ulysse Fin de Siècle, devenues en 2000, Les Éditions Virgile). Car c'est difficile d'être édité ! J'aurais pu l'être chez Virgile mais je n'étais pas très intéressé par les éditions locales.
En 2006, mon premier roman "Matachine" a été publié par Al Dante, une petite maison d'édition sur l'art et la poésie contemporaine. C'est un roman noir, le journal d'un homme qui a tué une femme dans le métro, lynché par un homme qui a vu la scène. Il pose le problème du mal, de la justice et du milieu carcéral. Après, comme Al Dante est une maison d'édition assez connue, j'ai eu plus de contacts. En 2008, j'ai publié "L'après-journal Nijinski" (Al Dante) et, en 2009, j'ai publié un texte dans la revue littéraire Nioques.
Actuellement, avec François Dominique, nous menons un projet de textes sur des poètes contemporains. En fait, c'est souvent comme ça que ça se passe dans le milieu de la poésie. On découvre que les gens que l'on rencontre nous montrent les voies qui nous correspondent. Cela devient surtout intéressant à partir de la 2e édition. J'ai pu travailler avec l'artiste Éric Madeleine, lié au Body Art et à l'école artistique d'Orlan".
Aujourd'hui, Bruno travaille sur la question de l'identité et sur différents thèmes : la métamorphose, Protée, l'homme-élastique. Il a également participé à un très beau projet sur le net : le Runbook. "C'est un livre aléatoire sur le paysage, réalisé par des poètes et des photographes des quatre coins du monde. Je figure d'ailleurs au mois de septembre, après le poète Jean-Marie Gleize, ce dont je suis très fier !"
Jean-Luc Bourdon : "L'écriture doit être un acte amoureux !"
A l'inverse des jeunes auteurs rencontrés, Jean-Luc Bourdon ne s'inscrit pas dans une logique d'édition. Son parcours d'auteur et de metteur en scène l'amène aujourd'hui à privilégier l'instant de la création artistique au livre. "J'ai publié quelques textes dans des œuvres collectives avec des éditions du coin et aussi chez Nykta ("La Mort au bord d'une pierre blanche"). J'ai commencé à écrire pour le théâtre, donc je travaillais avec des acteurs et la nécessité d'être édité ne se présentait pas. Il n'y avait pas de projet d'écriture qui viserait une reconnaissance à tout prix. Il y avait une sorte de rejet à tout ça. J'avais surtout envie d'écrire pour mettre en scène, travailler sur un texte, sur scène, avec des comédiens. Dans le théâtre, il y a l'idée d'une parole collective, il y a des univers qui se confondent. C'est le rapport direct que je préfère : rechercher dans la poésie ou la parole, l'action directe. Le livre est comme un objet qui serait là en plus, il ne m'obnubile pas, même si j'aime beaucoup les livres bien sûr.
Je recherche d'autres formes, pas du tout pour révolutionner mais surtout pour trouver ma propre forme. Parfois, on a besoin de se prouver des choses alors que pour moi, l'écriture devrait se séparer des choses, de ce moi, de ce culte de la personne. L'écriture est un chemin plus spirituel, quelque chose dans lequel on a foi, quelque chose qui permet de vivre ou de changer quelque chose en soi-même, ou dans les autres. Je recherche une "spiritualité" au sens fort du terme. Ce n'est pas écrire avec des idéologies mais avec la passion du moment, être avec soi-même et essayer de toucher d'autres personnes".
Pour preuve, l'action littéraire qu'il mènera en duo avec Karine Amiot, "Les Fiancés, corps inquiets des épousailles", samedi 28 novembre à la galerie Nü Köza. Lorsqu'on lui demande de nous expliquer plus en détails ce projet, il préfère ne pas trop en parler pour privilégier la magie de la rencontre. Il ajoute seulement : "Je préfère en parler après la lecture, curieux de savoir ce qui va se passer..."
Ainsi se termine notre rencontre avec ces auteurs locaux, une rencontre riche en conversations et en découvertes littéraires !
