
Plus de 500 morts et 1.500 personnes hospitalisées pour des problèmes cardiaques : tel est le bilan provisoire du médicament Mediator depuis sa commercialisation sur le marché français en 1976... En Côte-d'Or, l'inquiétude grandit parmi les personnes ayant suivi ce traitement tandis qu'une plainte collective est en cours de rédaction, à l'initiative de l'association des diabétiques du département (ADCO). Retour sur ce scandale sanitaire avec Robert Yvray, président de l'association...
Robert Yvray, bonjour. Comment l'association des diabétiques de Côte-d'Or (ADCO) a-t-elle réagi lors de la révélation de "l'affaire Mediator", en décembre 2010 ?
"Tout d'abord, il convient de rappeler que le Mediator n'était pas, à l'origine, un médicament pour lutter contre le diabète. Ce traitement était avant tout prescrit comme coupe-faim pour des personnes rencontrant des problèmes de surpoids. La pratique s'en est étendue au fil des ans à beaucoup de diabétiques d'où, in fine, notre implication à ce sujet.
Concernant le scandale qui a éclaté ces dernières semaines, notre réaction a d'abord été une grande colère. En effet, en 2000, notre association nationale avait lancé un message d'alerte auprès des autorités de santé et des praticiens, après avoir constaté que le médicament avait été retiré de tous les marchés, sauf la France... Personne n'avait pris en compte cet appel !
Aujourd'hui, notre discours tend plutôt à calmer les esprits : des millions de personnes ont consommé ce médicament et n'auront pas de complications. Il ne faut pas faire une fixette irraisonnée sur le Mediator.
Combien de personnes ont suivi ce traitement en Côte-d'Or ? Quelle est leur réaction ?
On estime à 14.500 le nombre de diabétiques en Côte-d'Or. Parmi eux - ce chiffre est à nouveau une estimation -, on peut considérer sans grande marge d'erreur que 20 à 25% ont, dans leur vie, consommé du Mediator.
Aujourd'hui, l'inquiétude est réelle parmi la population. A titre personnel, je tiens une permanence tous les matins dans les locaux de l'association et sept ou huit personnes me téléphonent systématiquement pour avoir des renseignements... Souvent, la peur pousse même certains diabétiques à vouloir arrêter complètement leurs traitements ! Nous insistons alors sur le fait que certains produits ont fait leurs preuves, comme l'insuline, et qu'il serait très dangereux de stopper la prise de tous les médicaments.
Quelles actions sont mises en place au niveau local pour faire face au scandale ?
Tout d'abord, une "cellule Mediator" permet de collecter auprès des diabétiques les informations relatives au traitement et ses effets éventuels. Un questionnaire est ainsi disponible sur demande à l'association ou par internet sur www.afd.asso.fr, qui pose les questions suivantes : quand avez-vous utilisé le Mediator ? A quelle dose ? Avez-vous constaté des effets indésirables ? Si oui, à partir de quand ? etc.
Ces questionnaires, regroupés avec ceux d'autres départements, seront ensuite envoyés au ministère de la Santé pour appuyer notre demande d'une analyse scientifique complète des risques liés au Mediator. D'autre part, ils nous permettront de soutenir une plainte collective, aujourd'hui en cours de préparation...
Des efforts ont déjà été consentis par les autorités. Suite aux premières actions menées par l'association, les utilisateurs du Mediator peuvent aujourd'hui consulter un cardiologue sans dépassement d'honoraires. C'est d'ailleurs notre première recommandation : les personnes qui ont suivi ce traitement ont tout intérêt à consulter leur médecin-traitant, puis un cardiologue.
Les maladies de longue durée sont dans le viseur du gouvernement à cause de leur coût (Lire ici notre article) : l'inquiétude des diabétiques pourrait ne pas retomber de sitôt...
Effectivement, le risque de ne plus être remboursé à 100% pour les soins liés au diabète est de plus en plus grand... Récemment, le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoyait par exemple de réformer le remboursement des bandelettes d'analyse. Je m'explique : un diabétique de type A a besoin de surveiller son taux de glycémie trois fois par jour à l'aide de bandelettes. Sur les trois nécessaires, le gouvernement prévoyait de n'en rembourser plus qu'une, alors que toutes sont prises en charge aujourd'hui ! Heureusement, cette mesure n'a pas été retenue dans le texte final.
D'une manière générale, nous constatons que le remboursement des soins par les mutuelles est de plus en plus mis en avant. Seulement, tout le monde n'a pas les moyens de s'assurer cette couverture, dont le coût risque par ailleurs d'augmenter en fonction du nombre de remboursements ; encore une fois, le patient sera le premier pénalisé. Pour les diabétiques, le problème va donc bien au-delà du Mediator... Ne l'oublions pas !".
- infOs pratiques
Contacts. L'association des diabétiques de Côte-d'Or est joignable par téléphone au 03 80 41 74 20 ou par mail à acotedor@aliceadsl.fr.
Permanences. Les bénévoles de l'association tiennent une permanence du lundi au vendredi, de 9h à 11h45, et le samedi, de 10h à 11h30, à la maison des associations de Dijon, 2 rue des Corroyeurs.