dijOnscOpe

Abonné·e de Mediapart

Billet publié dans

Édition

Dijon / Bourgogne

Suivi par 18 abonnés

Billet de blog 30 mars 2010

dijOnscOpe

Abonné·e de Mediapart

Des parlementaires en prison…

Dans le cadre de la quatrième édition des "Journées Parlement-Prisons" les parlementaires d’Ile de France et de Bourgogne étaient conviés par le Genepi (Le groupement étudiant national d'enseignement aux personnes incarcérées) à visiter des prisons.

dijOnscOpe

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.


Dans le cadre de la quatrième édition des "Journées Parlement-Prisons" les parlementaires d’Ile de France et de Bourgogne étaient conviés par le Genepi (Le groupement étudiant national d'enseignement aux personnes incarcérées) à visiter des prisons. À Dijon, Claude Darciaux, députée socialiste, Rémi Delatte, député UMP de la Côte-d’Or, et Alain Millot, 1er adjoint au maire de Dijon, ont accepté l’invitation. Interrogés par dijOnscOpe, ils ont accepté de donner leur vision du milieu carcéral, un univers qu’ils connaissent bien et qui les intéresse...

Pourquoi ces journées ?


L’initiative est originale : proposer aux parlementaires de visiter une prison. Cette visite a trois objectifs selon Laure Lamoise, déléguée régionale du Genepi : "Sensibiliser nos élus aux questions carcérales afin de permettre une meilleure saisine par ceux-ci du débat sur l'évolution de la justice pénale ; permettre une autre forme de contrôle extérieur des établissements pénitentiaires*. Permettre aux citoyens, par l'intermédiaire de leurs élus, de se rendre compte des réalités carcérales, éclaircir cette zone d'ombre que la prisons représente pour la population. Les députés et sénateurs faisant ainsi le lien entre la prison et la société."


C’est aussi leur rappeler leur droit, rappelle Lucie Laupretre, présidente du Genepi à Dijon : "Les parlementaires ont un droit de visite des prisons qu’ils n’utilisent pas forcément. Ces visites sont utiles pour une prise de conscience du milieu carcéral. Certains députés ont besoin qu’on leur fournisse les moyens de se lancer, d’autres le font de manière inopinée." Le Genepi espère donc faire réagir pour susciter des améliorations du système carcéral.

Des règles européennes pour changer les choses


Il faut dire que la France fait parti des mauvais élève de l’Europe des 15. Dans le domaine carcéral, elle est l’un des quatre pays - parmi lesquels la Turquie, l’Italie et la Russie, épinglé par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) au 1er janvier 2010. Des règles pénitentiaires communes aux membres du Conseil de l’Europe permettraient une harmonisation des politiques et des lois. Le Genepi invite cette année les parlementaires à s’interroger sur ces règles.


"Notre objectif est de faire en sorte que soient appliquées les 108 règles pénitentiaires européennes ; mais cela est difficile de les appliquer du jour au lendemain", confirme Bruno Maitre du Genepi d'Ile-de-France. "Concernant ces règles pénitentiaires, il y a une marche vers l’avant, déclare pourtant Claude Darciaux. En deux ans et demi, il y a eu beaucoup d’évolutions positives ; la création du poste de Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté en est une. Les observations au niveau mondial, les rapports des parlementaires et des associations permettent de changer les choses."

Une reconnaissance du milieu associatif et du personnel pénitentiaire


Rémi Delatte et Claude Darciaux se sont dit "mobilisés" sur la question des conditions carcérales. Preuve en est, leurs visites régulières à la maison d’arrêt (une à deux par an). Des démarches qui leur permettent d’avoir une vision plus juste de l’univers carcéral et d’agir en conséquence. "Lors de ma première visite, j’avais observé qu’il manquait du matériel sanitaire pour les femmes qui venaient d’accoucher. Peu de temps après, cela a été amélioré. Nous réagissons et je pense que ce que nous disons est pris en compte. Nous visitons aussi les prisons afin de voir si les amendements que nous souhaitons proposer sont pertinents. Après une visite, il m’est arrivé de constater que cela ne l’était pas tout à fait, témoigne Claude Darciaux.


Cette démarche est également l'occasion pour les députés de remercier le personnel pénitentiaire ainsi que les membres du Genepi. "Notre objectif est aussi d’améliorer les conditions des personnels de prison qui ont un métier très difficile, souligne Rémi Delatte. Cette visite permet d’exprimer notre soutien au personnel et notre reconnaissance vis-à-vis du travail du Genepi. Sans le milieu associatif, la réinsertion des détenus serait bien plus difficile. Ce que fait le Genepi, c’est super."

Un combat de tous les jours


Les deux élus sont bien conscients qu’il reste beaucoup à faire. Claude Darciaux en établit la liste : "Au niveau des améliorations de la maison d’arrêt de Dijon, je pense qu’il y a le suivi psychiatrique : beaucoup de prisonniers ne relèvent pas d’une maison d’arrêt**. Il Faut aussi assurer un suivi pour préparer la sortie. Enfin, faire en sorte que les détenus travaillent pour préparer la réinsertion professionnelle. C’est un vrai problème national car les entreprises ont du mal à leur confier du travail."


Malgré tout, tous deux soulignent les avancées obtenues ces dernières années. Selon Claude Darciaux, "l’accueil des familles s’est amélioré ; il y a désormais des cellules pour les femmes et leurs enfants." "Il y a une vraie prise en compte des cadres qui fait que la personne est prise en compte dans sa dignité et respectée. La surpopulation existe mais grâce au personnel et aux associations qui aident, le quotidien se voit amélioré", relate encore Rémi Delatte.


A leur sortie de prison, les élus se sont d’ailleurs dit satisfaits et conscients des améliorations des conditions de détention. Tout n’est pas fini pour autant et la France a encore fort à faire pour que les prisons sortent de l’ombre dans laquelle on les a confinées...

* "La prison, comme toute institution de la République, est soumise à des inspections régulières : elle fait ainsi l'objet d'un contrôle interne, exercé par elle-même sur elle-même. Cependant, si écoles, hôpitaux ou autres établissements ouverts sont aussi sujets à une observation et un contrôle extérieurs permanents, la prison constitue au contraire un monde cloisonné, fermé, souvent relégué loin de tout regard. Ces visites parlementaires et celles du contrôleur général des lieux de privation de liberté permettent d'instaurer un réel contrôle extérieur."


**Entre un cinquième et un quart des prisonniers peuvent être considérés comme psychotiques selon F. Rouillon et Alii, Étude épidémiologique des troubles psychiatriques chez les personnes détenues en prison, 2004.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.