Billet de blog 6 février 2013

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Marc Tertre

Education populaire (science et techniques), luttes diverses et variées (celles ci qui imposent de "commencer à penser contre soi même") et musiques bruitistes de toutes origines

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Contre la violence éducative institutionnelle

La Violence Éducative Ordinaire, est celle qui est pratiquée à l’encontre des enfants. Celle qui est punitive, que les parents considèrent comme un droit et un moyen d’éducation pour leurs enfants, celle qui ne choque personne, qui est considérée comme acceptable  et tolérée par notre société, pour les faire obéir. Mais ce n'est pas de celle là dont nous parlerons le plus, mais celle de la violence institutionnelle permise par l'école, la créche ou  l'organisation des séjours de vacances pour ne citer que les principaux exemples. Dans ce cas, les cas de violence réelle, pour choquant qu'ils soient, s'effacent devant les cas bien plus nombreux de violence symbolique qui s'exercent a l'encontre des enfants.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La Violence Éducative Ordinaire, est celle qui est pratiquée à l’encontre des enfants. Celle qui est punitive, que les parents considèrent comme un droit et un moyen d’éducation pour leurs enfants, celle qui ne choque personne, qui est considérée comme acceptable  et tolérée par notre société, pour les faire obéir. Mais ce n'est pas de celle là dont nous parlerons le plus, mais celle de la violence institutionnelle permise par l'école, la créche ou  l'organisation des séjours de vacances pour ne citer que les principaux exemples. Dans ce cas, les cas de violence réelle, pour choquant qu'ils soient, s'effacent devant les cas bien plus nombreux de violence symbolique qui s'exercent a l'encontre des enfants.

Etude de cas

De nombreuses études constatent cette violence institutionnelle. Par violence institutionnelle, on entend deux choses : d'une part toute violence qui découle de l'institution même, mais aussi toute violence tolérée par l'institution. Les cas suivant découlent de mon expérience professionnelle. Quand ils interviennent dans le cadre de l'éducation spécialisés, les cas sont anonymisés comme le veulent les usages de la profession.

Le premier cas qui me vient à l'esprit est celui d'une structure d'insertion dans le cadre d'une action de plusieurs associations dans le cadre d'une ville confronté a de lourds problèmes de déstructuration du tissus social. Une des racines de l'ambiance pesante qui régnait dans ce contexte était justement le fait du pilotage tripartite de l'action. De nombreux professionnels étaient confrontés a un déni de responsabilité dés lors qu'il y avait conflit, les trois associations se renvoyant joyeusement la balle. Ce qui entraînait un sur investissement personnel de chacun de ceux ou celles qui géraient au quotidien la situation.

J'ai également rencontré la violence éducative dans le fonctionnement « normal » d'un centre social (pour lequel je travaillais) Ce centre social était placé au centre d'une cité « à probléme » bien qu'il relevait par ailleurs d'une ville à dominante « bourgeoise » (et qui était d'ailleurs géré par la droite) Il y régnait une ambiance peu propice à l'épanouissement des jeunes dont elle avait à s'occuper, et qui étaient regardé systématiquement avec suspicion. Toute une série de jeunes étaient « d'office » exclus du fonctionnement normal du centre, en raison de leur comportement (supposé) hors normes. Le fonctionnement de l'institution était que c'était aux usagers à se faire au centre, et pas au centre à se faire aux usagers. Cela entrainait une violence, cachée du coté de l'institution, mais bien réelle auprés de certains jeunes.

J'ai également rencontré nombres de structures qui n'étaient pas en elle meme « violentes », mais qui toléraient ou acceptaient fort bien celle de leurs salariés vis a vis du public jeunes dont elles avaient la charge. Alors que la violence des usagers n’est jamais toléré (et ce à juste titre) nombres de structures quelque soient leur status (qu’elles soient associatives ou dépendante de collectivités locales, par exemple) minimisent ou passent sous silence les cas de violence, surtout celles ou l’accusation de maltraitance n’est jamais portée…

La violence éducative institutionnelle

La violence éducative est le processus d'une force physique et mentale mis en place par les parents ou éducateurs de l’enfant, pour l’utiliser contre lui, dans le but de le "neutraliser", et lui faire croire que cette action violente à son encontre est une action éducative.

La Violence Educative est aussi le fait de le manipuler et le formater pour lui faire accepter cette action de " bien ou bon pour lui", comme quelque chose d’Ordinaire, de normal, d’autant que pour être acceptée par l’enfant, il faut qu’elle soit acceptée et utilisée par quasiment tout le monde dans son entourage, que personne ne la voit comme telle et ne la remette en question.

La question de la violence institutionnelle est l'enjeu d'un non dit significatif. On commence à prendre (timidement) en compte l'ensemble des dimensions de la violence éducative, mais on limite souvent celle là au cadre familial (et avec des préjugés sociaux assez fort qui limitent son impact aux classes sociales les plus basses) Pourtant la thématique de la violence est devenue courante dans les problématiques posée dans les institutions éducative, et particuliérement de celle de l'éducation nationale.

Mais comment se caractérise une institution violente ? Quels facteurs contribuent à son développement et à sa propagation ? Où se situe la limite entre un acte violent et un acte non-violent ? Comment lutter contre cette violence ?

Dans un ouvrage collectif très important pour la question générale des violences éducatives,. L’enfant maltraité. FLEURUS, 1993. Stanislaw Tomkiewicz propose une définition courte et synthétique de cette notion  : il s’agit de “ toute action commise dans ou par une institution, ou toute absence d’action, qui cause à l’enfant une souffrance physique ou psychologique inutile et/ou qui entrave son évolution ultérieure” La difficulté de cette question tient en particulier au fait que les limites de cette violence sont difficiles a tracer : ou commence la violence, surtout quand elle est psychologique ou symbolique

Violence réelle et violence symbolique

L’interdiction des châtiments corporels dans l’école de la république ne date pas d’aujourd’hui, même si des cas de sanctions diverses (fessées, claques, et diverses punitions plus ou moins humiliantes) peuvent toujours y être constatés, en particulier dans les écoles des classes populaires. Mais une catégorie particuliére de violence peut aussi être rencontrée, celle qui n’use pas de coups ou de physiques, celle qui est d’abord psychologique ou symbolique.

Une plaquette réalisée par les CEMEA nous permet d’en prendre conscience : en listant les formes de violences que les professionnels qu’elle forme risquent de rencontrer, elle montre bien l’importance des violences « sans coups »

 Maltraiter un enfant, ce n’est pas forcément agir avec brutalité, donner des coups. C’est aussi le négliger, l’ignorer ou le singulariser parce qu’il est différent ; lui faire subir des humiliations, utiliser un vocabulaire visant à le dévaloriser ; lui imposer des rythmes inadaptés ; le forcer à faire des activités contre son gré ; prendre un enfant pour cible et le persécuter par des moqueries, des brimades ; créer une ambiance de peur voire de terreur ; exercer une autorité exagérée en criant ou en menaçant de punition ; instaurer un climat ambigü : tentes et douches mixtes, langage et comportement déplacés, attouchements d’ordre sexuel ou attentats à la pudeur. 

Une des violences symboliques les plus utilisés par les institutions c’est l’exclusion pure et simple. Il suffit de montrer à un enfant qu’il n’a rien a faire dans le centre social, l’école ou l’activité de loisir pour lui faire subir une violence réelle, mais jamais prise en considération. J’ai encore en mémoire un gamin que j’avais dans une activité de découverte des sciences en coordination avec une école et qui était sans cesse rappelé a son échec inévitable, alors qu’il n’avait que 8 ans. Cet enfant était considéré comme « ingérable », alors que j’arrivais pourtant à l’intéresser aux petites expériences de chimie et de physique, et où il arrivait parfaitement à rester calme et à suivre les consignes.

Des outils contre la violence

Un des meilleurs outils pour lutter contre toute forme de violence, celle éventuelle des jeunes, mais tout autant celle de l’institution est selon moi l’instauration d’une véritable démocratie pédagogique dans l’école en s’inspirant des méthodes mises au point par la pédagogie institutionnelle développée par Fernand Oury

La pédagogie institutionnelle élaborée par Fernand Oury fixe et fait respecter des règles de vie dans l'école, en impliquant les élèves dans le quotidien de la classe.

La vie scolaire fait l’objet d’une gestion participative par le biais d’un "conseil" qui se réunit régulièrement. Le conseil est un lieu de parole où chacun peut proposer des projets ou des sorties et où l’on règle par la négociation les conflits entre élèves.

D’autres "lieux de paroles" sont mis en place dans les classes, notamment le "quoi de neuf ?", un temps de parole prévu chaque matin où l’élève peut dire à la classe ce qu’il a envie de lui faire partager.

Les élèves sont évalués par des ceintures de couleur inspirées du judo : ces ceintures permettent aux enfants d'évaluer leur réussite dans tel ou tel domaine (comportement et compétences). Grâce au tableau des ceintures affiché en permanence dans la classe, les enfants savent toujours où ils en sont.

Ce qui compte c’est que les problémes rencontrées soit débatus collectivement et explicitement, selon des régles établies et reconnues. Le non dit fait toujours basculer dans la violence.

Bibliographie :

TOMKIEWICZ Stanislaw, VIVET Pascal. Aimer mal, châtier bien. Enquêtes sur les violences dans des institutions pour enfants et adolescents. SEUIL, 1991.

GABEL Marceline, JESU Frédéric, MANCIAUX Michel. Maltraitancesinstitutionnelles, accueillir et soigner les enfants sans les maltraiter. FLEURUS,1998.

IFREP. Violences et institutions. Prévenir la répétition. Editions Jeunesse et droit,2001.

STRAUS Pierre, MANCIAUX Michel et d’autres collaborateurs. L’enfant maltraité. FLEURUS, 1993.

TOMKIEWICZ Stanislaw. L’adolescence volée. CALMANN-LEVY, 1999.                                  

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