Billet de blog 31 août 2010

Stéphane Alliès
Journaliste
Journaliste à Mediapart

Fignon en pleine tronche

Laurent Fignon est mort. L'annonce de son cancer, il y a un an, nous avait déjà renvoyé à un spleen infini. Nous republions donc notre hommage nostagique à un grand champion de notre adolescence.

Stéphane Alliès
Journaliste
Journaliste à Mediapart

Laurent Fignon est mort. L'annonce de son cancer, il y a un an, nous avait déjà renvoyé à un spleen infini. Nous republions donc notre hommage nostagique à un grand champion de notre adolescence.

Illustration 1
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Pourtant, pour être franc, "l'intello du peloton" (avec pour seule intelligence des lunettes et un bac), il ne nous a jamais vraiment séduit. Comme tout bon fan de Lucho Herrera, Bernard Hinault ou Stephan Roche qui se respecte, Fignon c'était un peu le gars gonflant de service, Parisien en prime. Le mec qui suintait la suffisance du débutant qui claque d'entrée deux Tours et qui avait humilié le Blaireau en 84…

En plus, le mec, il se faisait choper pour dopage et il assumait presque la position du laisser-faire. Mais peu à peu, le binoclard hautain a imposé chez l'enfant que nous étions encore l'idée d'une certaine complexité. Enervant, mais classe quand même. Parfois. Comme quand il remporte une étape cultissime de l'histoire de la Grande Boucle, celle de La Plagne en 87, en réglant l'horrible suceur de roue ibère Anselmo Fuerte dans un sprint sublime…

Et puis un an plus tard, le winner blondinet est devenu tellement humain, en incarnant le cauchemar du supporter patriote, bien avant France-Bulgarie. Et l'on se souvient encore de notre stupeur en voyant la détresse du Lolo, tout en se réjouissant secrètement de la victoire de Lemond. C'était le temps des 8 secondes d'écart, du contre-la-montre sur les Champs et de nos premières blagues potaches… sur les fameux "problèmes de selle" de Fignon, bien sûr…

© yannhay

Au début des 90's, Fignon est carrément devenu un Yannick Noah à deux roues: fin de carrière laborieuse marquée par les blessures, moqueries pas sympas et "séquences déchéances" à foison. Comme sur le Passo Giau, lors du Giro'92…

© vacanzecaluri

Mais comme les héros ne meurent jamais, même quand ils ont mauvais esprit, Fignon a aussi touché la rédemption, lors de Strasbourg-Mulhouse: sa dernière victoire d'étape sur le Tour, peu avant la retraite. Crépuscule des (o)dieux, en terre alsacienne. Et le souvenir d'une petite larme écrasée, comme pour saluer la fin d'une époque…

© yannhay

Alors, quand on a appris le cancer de Fignon, eh ben ça nous a fait quelque chose. Et ce, alors même qu'il nous irritait à nouveau au micro d'Eurosport puis de France 2, où il ne pouvait pas s'empêcher de se la ramener face à not' Jaja d'amour. Mais face au plaisir de revoir son bandeau, son maillot Peugeot puis Système-U, son super Giro de 89 et Cyrille Guimard, on avoue quand même une sacrée émotion nostalgique…

© lamagliarosa
© lamagliarosa

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