Billet de blog 7 décembre 2008

Pierre Masselin

Ingénierie des industries graphiques, porteur du projet: "Développer l"économie locale à partir du patrimoine".

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Un nouvel espoir pour la presse de réenchanter le monde

Pierre Masselin

Ingénierie des industries graphiques, porteur du projet: "Développer l"économie locale à partir du patrimoine".

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Contribution EtatsGénéraux presse - Médiapart 291108
Professionnellement ayant travaillé longtemps au service des industries graphiques et d'entreprises de presse en particulier, après avoir occupé la rédaction d'une revue technique, permettez une modeste contribution à ce débat capital concernant l'information et la formation des opinions.
Il serait singulier que dans un monde "en crise", seule la presse puisse tirer son épingle du jeu. C'est un lieu commun de constater que la presse se vend mal, que les lecteurs s'éloignent de la chose écrite, et que les structures éditoriales visent les économies.
Si l'on y regarde de plus près, hors polémique ou analyse partisane, les moyens d'information se sont multipliés, diversifiés, parallèlement aux habitudes de vie de chacun, qui ont aussi changé, tant par contraintes, que nécessités, ou par goût. Les journées n'ayant toujours que 24 heures, et l'année 365 jours. Les temps de lecture ou de télévision sont redistribués. Notamment à l'avantage de cette dernière.
Or la presse, mis à part l'adjonction de couleur (de qualité moyenne, non déterminante) et de la publication de photos facilitée par le procédé offset, les bases structurelles sont demeurées strictement semblables à celles du XIX° siècle.
A cette époque, formidable période d'expansion avec l'industrie naissante, l'impression est devenue continue sur rotative, simultanément à l'invention française de Nicolas Robert pour fabriquer le papier en continu "qui va avec". Enfin et surtout, des auteurs polémiques, s'expriment alors avec convictions, tandis que "l'instruction publique" génère des lecteurs, et qu'il y a peu ou pas de publicité.
Aujourd'hui, la presse courtise la publicité, jusqu'à distribuer gratuitement l'information, financée par .... les annonceurs publicitaires dont elle est dépendante. Les imprimés sont toujours routés par les transports terestres à l'heure de l'internet, et les 20 minutes moyennes de lecture, condamnent à la corbeille 80 à 96% du travail des entreprises de presse.
Il m'apparaît que la solution pour sortir ce merveilleux moyen d'expression et les femmes comme les hommes qui y travaillent, ne réside pas dans des subventions ou des aides de nature diverses, mais dans une stratégie fondamentalement en phase avec les moyens et les besoins de notre temps.
Jusqu'alors, on a privilégié les "centres" de production, et confié la distribution aux transports, en "forçant" la vente de ce que l'on produit avec des moyens centralisés de plus en plus performants. La manifestation quadriannuelle DRUPA de juin 2008, confirme ce fait, puisque des machines énormes sont en fabrication pour des journaux du monde entier. Mais on pouvait aussi percevoir d'autres possibilités.
Or avec l'internet, l'écrit est précisément un des rares sinon exceptionnel produit à pouvoir être transmis instantannément et simultannément à divers endroits de la planète. Conséquemment aux objectifs de développement durable, il n'y a pas lieu de déforester pour jeter le papier, ni de polluer par les transports.
Une solution s'offre, à l'inverse des entreprises centralisées de production, c'est l'impression "à la demande" mutualisée sur les lieux de consommation. Depuis le domicile, on peut choisir ses articles, dans plusieurs publications si nécessaire, et contre paiement incluant les droits de chaque acteur de la chaîne d'édition, recevoir ou aller chercher à quelques mètres d'une petite entreprise réceptrice, ce que l'utilisateur a choisi. Ce dispositif n'étant plus dévolu à un éditeur, mais étant une "piste d'atterrissage" pour tous les imprimés de vie éphémère concernant la ville ou la zone d'activité (annuaires, guides, informations locales, formulaires, cours, etc..... Et en sens contraire, cette unité devenant émettrice à destination du monde entier, pour promouvoir les activités locales.
En france, pour une trame de répartition de 5000 habitant, il y a un potentiel de 10000 unités, pouvant employer jusqu'à 100000 personnes. Lesquelles assumeraient une véritable industrie de services.
Ce projet, soumis à l'Union Européenne en 1995, a été déclaré éligible. Mais des "vents contraires" ont soufflé, et aujourd'hui, ce n'est encore qu'un espoir.
Ainsi seraient débloquées les forces vives de l'information, pour dégager de la valeur ajoutée tant pour celui qui vend que pour celui qui achète. On précise bien ici, qu'il s'agit d'une structure fondamentalement différente, où la production est "tirée" par le lecteur (l'imprimé papier ou CD trouvera sa place dans le concert des médias, à l'instar des moyens de transport qui ne se sont pas auto-détruits à mesure des progrès), à partir des lieux de consommation qui mutualisent les moyens de production au service de tout éditeur. Pour les livres, imprimés divers, etc... L'imprimerie traditionnelle demeurant pour les ouvrages de références de moyenne et longue durée.
Suite à un colloque à l'UNESCO pour la réintroduction de la philosophie de la maternelle à l'entreprise, et à l'ouvrage de Bernard Stiegler, la presse ainsi re-dynamisée parceque efficace, pourrait "réenchanter le monde".

Pierre Masselin

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