Billet de blog 6 avril 2024

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André Smolarz

Retraité de l'enseignement supérieur

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Pauvreté, vieillesse, IVV, ne nous trompons pas de cible !

Les personnes opposées à l’IVV soulignent souvent le risque d’eugénisme du droit à mourir en arguant que les « pauvres » pourraient être tentées par ce choix pour mettre fin à leur misère et que les « vieux » pourraient choisir cette solution pour ne plus être une charge, etc.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Il est vrai qu’au XXIe siècle, en France, il y a de plus en plus de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté (8 % de la population, soit 5,3 millions), ayant besoin de l’aide alimentaire (2,4 millions) et même mourant de froid en pleine rue, mais le problème est la pauvreté et non l’IVV ! Refuser une loi sur l'Interruption Volontaire de Vie (IVV) ne changera donc rien à la situation insupportable des plus fragiles et des plus démunis.

Il est vrai aussi qu’actuellement 10 % de la population française a plus de 75 ans et qu’on recense 30 000 centenaires en 2023 (soit 30 fois plus qu’en 1970), et que cette tendance va s’accentuer. Faut-il pour autant regrouper, comme nos opposants le font, toutes les personnes âgées derrière le qualificatif de « vulnérable » ?

Non ! Ces femmes et ces hommes, certes peut être diminués physiquement, fatigués, voire usés par leur vie professionnelle, sont majoritairement tout à fait aptes à décider pour eux-mêmes ce qui est bien, pour peu qu’on les laisse s’exprimer, qu’on les écoute et qu’on veuille bien tenir compte de leur souhait. D’ailleurs, le rapport du Haut-Commissariat au plan de février 2023 plaide en ce sens « En faisant masse de situations pourtant différentes, la société fige la vieillesse en un temps de la vie uniforme et identique pour tous, qu’elle perçoit d’autant plus négativement qu’elle exalte les valeurs de compétition et d’innovation, au détriment de la transmission, de l’expérience ou de la pondération. Or l’hétérogénéité des étapes et des modes de vieillissement justifie que l’on ne regroupe pas les personnes âgées dans une seule catégorie. » Rappelons aussi que la France est le pays d’Europe qui compte le plus de suicides de personnes âgées de plus de 65 ans : 3000 par an (28 % des suicidés).

Le problème est donc le regard que porte la société sur la vieillesse et non l’IVV. Sortons les personnes de la tombe sociétale que sont les EHPAD (qui a envie de finir sa vie en collectivité, cerné par des « vieux » et des soignants ?), rendons-leur leur rôle dans la société (mémoire, sagesse, expérience…) et le droit de la personne qui va avec ; laissons-les définir la fin de vie qu’elles veulent, sans leur imposer un choix quelconque.

Une loi sur l’aide active à mourir ne changera pas la réalité de notre société (pauvreté, suicides, vieillesse, maladies mortelles…), mais permettra à chacun de choisir librement, en toute conscience sa fin de vie. Car la mort n’est pas un problème d’expert, de médecin, de religion ou de politique ; elle concerne chacun au plus haut point dans l’exercice intime de son libre arbitre et de sa liberté à disposer de son corps. C’est le dernier acte d’un vivant.

Nous militons au sein de l'antenne Finistère de l’association Ultime Liberté qui a pour objectif principal de faire évoluer le droit des personnes vers l’autodétermination : droit de disposer de sa personne, de sa vie, de son corps et donc de sa mort où, quand et comme on veut, au moyen d’un produit létal accessible selon un protocole légal.

Dans la future loi sur la fin de vie, l’IVV est conditionnée à un pronostic vital à 6 mois, à des conditions de souffrances insupportables, excluant les souffrances psychiques et enfin, elle est subordonnée à la décision du monde médical, lui conférant ainsi un statut d’autorité sur nos vies. Une telle loi ne laisse aucune place à l’autodétermination de la personne et elle ne nous convient donc pas.

Rejoignez-nous pour faire évoluer la loi vers une fin de vie librement choisie !

Bruno Grall, Erick Ducret, Danielle Poirier, André Smolarz, membres actifs de l'Antenne Finistère d'Ultime Liberté

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