En ce deuxième jour du 3° forum pour la démocratie, on est vraiment entré dans le vif du sujet. Rappelons qu’il s’agit cette année de s’interroger sur les moyens que les jeunes peuvent mettre en œuvre pour redynamiser la démocratie.
Le lab 5 s’est penché sur 2 expériences, toutes deux nées en Allemagne, pour dire « non aux néonazis, non à la haine ». Le lab affiche complet, preuve que les jeunes, qui composent l’essentiel du public, peuvent encore se mobiliser.
Madame Marietta De Pourbaix-Lundin, membre de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, et très impliquée personnellement dans cette lutte contre les discours de haine, est la modératrice du lab. Elle rappelle, en introduction, que les jeunes, présents en nombre sur les réseaux sociaux, ne savent pas y déceler les discours de haine et se laissent tentés, d’où la nécessité de trouver des parades efficaces à ce fléau. Les 1° intervenants, Julian Barlen et Robert Patajol, présentent leur action : ils font une entrée tonitruante, déguisés et accompagnés d’une cigogne géante en peluche ! Ils veulent répondre aux discours de haine, émanant le plus souvent des néonazis, par un humour caustique : leur fondation a comme emblème une cigogne, « Stork Heinar », ils font des jeux de mots, parodient le vocabulaire, les symboles, les emblèmes, les héros, des néonazis ; ils lancent ces ripostes humoristiques sur le web ; ils sont aussi présents aux manifestations culturelles, dans les media classiques : presse, radio, tv, font des interventions dans les écoles et organisent des conférences pour les jeunes. Leur but : contrecarrer le discours néonazi, qui tente souvent les plus jeunes, en étant plus attractifs que les néonazis, proposer une alternative, être présents là où les néonazis sont présents ; ils ont même tenté une candidature aux élections. Sur les réseaux sociaux, ils sont très bien suivis : 80 000 « like » !
Malte Switkes Vel Wittels présente ensuite sa fondation : « Amadeu Antonio fundation », du nom d’un jeune noir assassiné en Allemagne fin des années quatre-vingts. Lui aussi est parti du constat que de nombreux jeunes ne connaissent de la politique que ce qu’ils lisent sur les réseaux sociaux ; or le plus souvent ils se laissent attirer par les discours néonazis, qui leur paraissent une alternative à la morosité du monde actuel. Il propose alors d’intervenir « en ligne », dans le but d’éduquer, de prévenir, de mettre en relation ceux qui luttent contre la radicalisation. Sa fondation entre aussi en contact avec les hommes politiques pour agir ensemble .
Ces 2 actions sont ensuite discutées par des intervenants : en premier, Nils Muiznieks, commissaire aux droits de l’homme au Conseil de l’Europe : il trouve les 2 projets intéressants, mais reste tout de même hésitant sur leur efficacité réelle. Il faut aborder d’abord les causes du succès de ces mouvements d’extrême droite pour pouvoir mieux les combattre.
Simon Burkatzki, de la « LICRA », pose lui aussi des questions : l’humour est efficace, mais suffit-il ? Il rappelle que les racistes eux-mêmes occupent ce terrain, comme Dieudonné, qu’il ne nomme pas, en France ; il précise aussi que l’intervention dans les réseaux sociaux est nécessaire, mais pas suffisante, il faut trouver d’autres moyens ; il donne en exemple une appli pour smartphone, élaborée par la LICRA, pour alerter les municipalités sur les tags racistes. Enfin, il estime que la meilleure action se situe sur le plan judiciaire, en France c’est possible : nouvel exemple avec la « quenelle » de D. Mais il estime aussi que les magistrats ne sont pas assez formés pour lutter sur ces points. Enfin, Konstantinos Triantafyllos pose à son tour des questions : pourquoi les jeunes sont-ils attirés par ces idées ? la crise est-elle seule responsable ? La propagande sur le net attire des milliers de personnes, difficile de lutter.
S’en suit un débat animé, où des représentants de différents pays, comme Ukraine, Arménie, Russie, Serbie, et autres, parlent de leur expérience et s’interrogent sur les moyens de lutter.Enfin, on rappelle qu'interdire ces mouvements ne sert à rien, ils renaissent aussitôt sous d’autres noms.
Pour conclure, tous sont d’accord pour souligner l'intérêt d'actions comme celles prsentées dans le lab; ils insistent sur la nécessité de vigilance, sur le rôle important mais insuffisant de l'intervention sur le web, sur la nécessité de la prévention et de l'éducation sur les dangers des discours de haine.
Ce lab s'est avéré fort intéressant et on ne peut que se réjouir du succès qu'il a obtenu aujourd'hui.
Geneviève Baas.