Alors que depuis 2007 la politique de "lutte contre l'immigration" se poursuit et s'intensifie, dans la réalité et les symboles, la politique en faveur des Français émigrés est de plus en plus protectrice. La création éphémère d'un ministère de l'identité nationale et de l'immigration a montré une volonté d'afficher le nationalisme comme fondement des politiques publiques. Celles-ci ont permis de stigmatiser l'autre, l'étranger, en situation irrégulière ou non, comme un ennemi, un être à pourchasser et à renvoyer à plus ou moins long terme, au nom d'un droit administratif contraire à l'esprit des Droits de l'Homme. Cette logique trouve son apogée lors du discours de Grenoble, scandaleux au point de vue du Droit, où le président français menace d'expulsion les Français d'origine étrangère, catégorie disparue depuis l'époque du régime de Vichy. Les garanties constitutionnelles ont heureusement évité l'application de tels projets. L'effet d'annonce reste.
En contrepoint, le traitement réservé aux français de l'étranger a fait l'objet de toujours plus d'attention. La gratuité du système scolaire français à l'étranger a été accordée, malgré le coût exorbitant que cela représente, principe d'égalité mis en avant. Pendant ce temps RESF dénonce le fait que l'on vient de plus chercher les parents des enfants étrangers scolarisés à la sortie des écoles, que l'obligation scolaire cède le pas, en tant que droit, devant les ordres d'expulsion et la politique inhumaine du chiffre.
Toujours au nom de l'égalité, les Français de l'étranger vont désormais avoir des représentants spécifiques au Parlement. Ils vont pouvoir faire entendre la singularité de leur voix depuis les autres continents. En France, les étrangers non ressortissants de l'UE n'ont aucune instance officielle les représentant. Ils n'ont pas le droit de vote, même pour les élections locales, alors qu'ils résident pour certains en France depuis plusieurs dizaines d'années, que leurs enfants sont parfois Français. Ce ne sont pas des citoyens de seconde zone, ils n'ont simplement pas d'espoir de devenir citoyens, sauf à mendier une hypothétique naturalisation.
C'est bien d'une France à deux vitesses dont nous parlons. La France protectrice et jalouse de ses ressortissants partout dans le monde, et, en parallèle, méprisante et méfiante vis à vis de ceux qui vivent sur son sol en ayant le tort de ne pas avoir de parent Français. Le droit du sang a pris le pas sur le droit du sol. La tradition française d'une communauté solidaire cède la place à une vision de tradition germanique où l'hérédité domine. les Allemands sont pourtant revenus depuis longtemps de cette nationalité inaccessible qui crée à jamais des habitants parias qui restent exclus de la communauté nationale. La France y court, à rebours du prestigieux héritage des droits de l'Homme ou encore de celui du CNR.
Jacques Chirac disait que "ce n'est pas rien d'être Français", sans doute. Aujourd'hui, si l'on voyage, surtout en Afrique et dans le monde arabe, cela est sur le point de devenir infamant. Nos compatriotes expatriés peuvent certainement en témoigner.