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Je me souviens....

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Billet de blog 24 septembre 2009

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la rue des oubliés

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Je me souviens - mais je n' y ai pas grand mérite, car cela ne date que d'un mois - d'être passé en vélo par une rue de Saint-Sauveur, sur l'île d'Yeu, qui s'appelait la rue des Oubliés. C'est ce que j'ai lu, en tout cas, et je me suis réjoui de la générosité des édiles du coin qui avaient dédié ce petit bout de rue à tous ceux qui auraient pu, à juste titre, à plus juste titre même que beaucoup d'autres, donner leur nom à une rue, ruelle, venelle de leur village natal, mais que la nature ingrate et oublieuse de leurs concitoyens avaient maintenu dans un purgatoire d'indifférence. Une manière de se racheter que cette mention collective et pourtant anonyme de ceux qui n'avaient pas suffisamment marqué la mémoire de leurs contemporains pour qu'on leur rende cet ultime hommage - Pourtant, des noms plus précis n'éveillent souvent aucun souvenir - et il est bien utile de préciser, rue X, propriétaire ou rue Victor Hugo, poète français.

A la réflexion, j'allais vite, - j'ai toujours peur de me casser la figure en freinant - et peut-être ai-je mal lu ; peut-être ai-je vu un accent là où il n'y en avait pas. Ce serait alors la rue des Oublies, qui sont, si je me souviens bien, des sortes de gâteaux recouverts de sucre, donc un peu poisseux, que l'on vendait dans les jardins parisiens - que viendraient-elles faire sur cette île ?- en vérité, je ne m'en souviens absolument pas, n'ayant pas passé mon enfance à Paris, mais à Bordeaux ; je veux dire que ce n'est pas un de mes souvenirs propres - moi, ce serait plutôt de ces gâteaux qu'on appelle ici des chichis, longs tortillons de pâte frits à l'huile, passablement gras et que ma mère refusait d'acheter pour que je ne me salisse pas - et je ne connais pas ,ici ou ailleurs, une rue des Chichis - mais un souvenir de Proust qui doit l'évoquer dans un Amour de Swann -.

C'est extrêmement complexe cette histoire de souvenirs, cet inextricable mélange de mémoire et d'oubli, ce continuel passage de ses souvenirs à ceux des autres au point qu'on ne puisse plus distinguer le mien du tien. On en viendrait presque à rêver de n'avoir plus de souvenirs du tout et de n'en laisser aucun après soi.

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