Billet de blog 25 juin 2011

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Le café-polar et les carnets de lecture

Mon carnet de lecture de l'été. Voilà plusieurs années que j'utilise des carnets de lecture. Simples petits carnets, sur lesquels je note les livres que je lis, ceux que j'aime, ceux qui m'ont fait planer. Je ne fais pas forcément confiance à ma mémoire, parce qu'il m'est arrivé de me trouver à la médiathèque, empruntant un livre et me demandant si je l'avais déjà lu...

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Illustration 1

Mon carnet de lecture de l'été.

Voilà plusieurs années que j'utilise des carnets de lecture. Simples petits carnets, sur lesquels je note les livres que je lis, ceux que j'aime, ceux qui m'ont fait planer. Je ne fais pas forcément confiance à ma mémoire, parce qu'il m'est arrivé de me trouver à la médiathèque, empruntant un livre et me demandant si je l'avais déjà lu...

Il y a quelques mois, ma librairie préférée m'a offert des vrais carnets de lecture. Sobres, pratiques, avec un index et une page pour chaque livre.

Ceux-là sont particuliers, puisque offerts avec un texte de Mario Vargas Llosa sur la littérature et la vie.

« Lecteurs de Cervantès ou de Shakespeare, de Dante ou de Tolstoï, nous nous comprenons et avons l'impression de faire partie d'une même espèce, pour avoir appris dans leurs œuvres ce que nous partageons en tant qu'êtres humains, ce qui est permanent en nous sous le large éventail de nos différences. »

C'est une partie de ces carnets que je vais feuilleter ici pour vous. Peut-être y trouverez vous les polars de votre été.

Franck Thilliez – GATACA – Fleuve Noir

Ce roman fait suite à Syndrome E.

Lucie Hennebelle, rencontrée dans La chambre des morts, est une jeune maman de jumelles adorables. Elle mène difficilement sa vie professionnelle et sa vie personnelle. Elle est forte mais fragile, rebelle et blessée par la vie.

Franck Sharko -Train d'enfer pour ange rouge- est lui un personnage atypique. Flic schizophrène blessé par la disparition de sa femme, et en situation d'échec dans sa vie professionnelle. Il ne survit pourtant qu'à travers le travail et le personnage d'une enfant qui vient le visiter dans ses délires psychotiques.

Ils sont désormais inséparables. Leur passé les rapproche, leur caractère semblable les unit. Il semble que désormais plus rien ne les séparera, sauf qu'à la fin de Syndrome E, l'horreur entre dans leur quotidien par l'enlèvement des jumelles.

GATACA est pourtant totalement indépendant, et peut être appréhendé comme tel par les lecteurs.

Une scientifique, spécialisée dans l'évolution des espèces est retrouvée morte dans la cage d'un primate. Il devient évident au fil des premières pages, que la guenon soupçonnée dans un premier temps n'y est pour rien.

L'enquête s'oriente vers une étrange histoire : onze hommes coupables de crimes barbares ont des points communs : ils sont tous gauchers et dessinent à l'envers.

Une histoire vieille de 30 000 ans est mise au jour : on découvre une famille entière de Néandertaliens assassinée par un Cro-Magnon.

Quels sont les points communs entre toutes ses affaires ? La clé est dans les lettres GATACA (lien).

Extrait :
« - C'est quoi la biologie évolutive ?

- Auparavant, vous savez ce qu'est un génome ?

- Pas précisément.

- C'est la mise bout à bout de l'ADN composant nos vingt-trois paires de chromosomes. Cela donne une séquence de plus de trois milliards de données, qui est en quelque sorte, la notice d'instruction de fabrique de notre organisme. Eh bien, avec ce génome, nous reconstituons l'histoire de la vie. La biologie évolutive, c'est comprendre pourquoi et comment apparaissent les nouvelles espèces, les nouveaux virus, comme le sida, le SRAS, tandis que d'autres s'éteignent. Et aussi, répondre à un tas de questions sur l'évolution de la vie. Pourquoi par exemple, nous vieillissons et nous mourons. Vous avez certainement déjà entendu parler de sélection naturelle, de mutations, d'héritage génétique.

- Dawin et compagnie ? Oui, vaguement.

- Eh bien nous sommes en plein dedans. »

 

 

Illustration 3
© evene


Le Sang des Pierres – Johan Theorin – Albin Michel

 

« C'est vrai, j'ai beaucoup lu Mankell, je l'admire énormément et en un sens, j'écris en réaction contre lui »Johan Theorin

 

Le Sang des pierres est le troisième volet de la quadrilogie consacrée à l'île d'Öland. L'heure trouble et L'écho des morts nous avaient déjà fait découvrir cet auteur suédois, jonglant avec le surnaturel et le lyrisme.

 

Nous retrouvons le vieux Gerlof et l'île d'Öland, avec ses paysages de paradoxe, entre l'affluence estivale et la solitude de l'hiver.

 

Dans la nuit de Walpurgis, célébrant la fin de l'hiver, rôde la mort, les drames du passé de l'île, et la couleur rouge sang de la falaise réapparaît.

C'est un roman chargé d'une atmosphère opaque, comme la nuit. Difficiles à décrire, les personnages traversent l'histoire, laissant une trace dramatique et lourde, bien spécifique aux huis-clos des îles nordiques.

Illustration 4
le pont de l'île d'Öland

 

Extrait :

Un quart d'heure plus tard, le pont d'Öland franchi, ils se dirigèrent vers le nord de l'île plate, à travers un paysage aux tons bruns et jaunâtres, hésitant entre hiver et printemps. Le soleil couchant éclairait les anémones qui pointaient sur le talus, alors que des congères étincelantes bordaient encore la route. La neige fondue au soleil avait commencé à former de grandes mares sur la lande. De petits ruisseaux en coulaient, se frayant un chemin vers la mer.

Un monde aquatique. Personne d'autre que des troupes de vanneaux et de rouges-gorges.

 

 

Andrée A. Michaud – Lazy bird – éditions roman noir Seuil

 

Illustration 5

C'est le huitième roman d'Andrée A. Michaud, mais le premier publié en France.

 

Dans ce roman noir, venu du froid, nous faisons la connaissance d'un animateur radio trainant sa solitude et son ennui dans une petite ville tranquille et calme du sud-est québécois. Son seul ami est le chien des voisins, Jeff.

Sa vie est rythmée par le jazz de Charlie Parker et de John Coltrane, mais aussi par le rock de Gene Vincent ou des Doors.

 

Un jour pourtant, il est contacté par WZCZ, une station de radio de Solitary Mountain, dans le Vermont, pour animer une émission de nuit. Il est prévu qu'il remplace au pied-levé l'animateur précédent, disparu sans préavis, et sans laisser de traces.

En seulement trente secondes, le temps d'un coup de fil, sa vie va basculer. Il décide de prendre le poste offert.

Le voilà dans un hôtel sans charme, toujours solitaire, mais séduit par son travail, qui lui permet de s'adonner à sa passion de la musique.

 

La cinquième nuit, alors que s'achève Blue Moon de Billie Holliday, en hommage à Jeff, son seul ami, une mystérieuse inconnue l'appelle. Le message est sibyllin et intensément inquiétant :

« Play Misty for me » murmure la voix, après avoir explicitement menacé Jeff.

 

Cet appel, il semble qu'il l'ait attendu toute sa vie. La référence au film dont le titre vient de lui être murmuré par cette voix sensuelle et rauque, lui donne des sueurs froides. Folie meurtrière, brûlante, malades du couteau, viennent d'entrer dans sa vie, sans espoir que ce ne soit qu'un film ou bien un rêve.

 

Ce roman est absolument passionnant par le foisonnement et les connaissances de l'auteur sur le jazz et la musique en général. Une multitude de titres, de noms ci et là dans les pages, avec des références précises et des traductions en fin de livre de citations de Jim Morrison dont est parsemé le roman.

Un plus : les savoureuses expressions québécoises, et le ton plein d'humour. Un régal.

 

Extrait :

Elle avait une voix suave, habituée aux alcools forts qu'on ingurgite en doses non diluées après le coucher du soleil, semblable à celle de Billie. Malgré les évidentes traces de bourbon réchauffant cette voix, ses accents n'étaient pas naturels. Ils se réverbéraient en un écho provenant de trop loin pour être vrai, de derrière une espèce de voile, de rideau battant au vent de la nuit. La femme qui chuchotait au bout du fil aimait l'aura trouble du mystère et ne voulait pas être reconnue.

« Qui est Jeff ? » a-t-elle demandé.

 

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