La récente enquête publiée par le Cevipof, en montrant la désaffection croissante de nos concitoyens envers les instances politiques, n'aurait pas pu tomber à un moment plus propice. M. Dassault, en voyant la levée de son immunité parlementaire refusée par le bureau du Sénat, contribue à distiller dans l'opinion publique la sensation d'un "tous pourri"qui, non contente de discréditer un peu plus encore ce multirécidiviste des pirouettes judiciaires, jette l'opprobre sur l'ensemble de la classe politique.
Déjà destitué de son mandat municipal après l'invalidation de son élection en 2009 par le Conseil d'Etat, M. Dassault, qui n'a pourtant pas les moyens d'être avare (5ème fortune de France) s'est vu être accusé, entre autre, d'extorsion de fonds. S'il est en aucun cas question de condamner quelqu'un qui n'est pas encore passé entre les mains de la Justice, c'est évidemment le fait de se cacher derrière son mandat parlementaire qui horripile une grande partie de la population française. Cela est d'autant plus regrettable que cette manœuvre n'a été possible qu'avec l'assentiment d'une partie du bureau du Sénat.
Les fonctions politiques obéissent en partie aux mêmes règles que tous les métiers. Elles comportent leur lot de "menteurs" et de "resquilleurs"... Néanmoins, elles comportent aussi des devoirs qui leurs sont inhérents. Elus du peuple, nous nous devons à ce titre d'être exemplaires et irréprochables, tant pour la République que pour ceux qui nous ont mandatés et ont remis leurs espoirs et leur voix entre nos mains. Or, M. Dassault, tant en clamant son innocence, allant jusqu'à se dire "victime de harcèlement et de racket par une bande de voyous", qu'en refusant de se soumettre au juge, bafoue ces principes.
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S'il est libre de ternir son honneur, il en est tout autrement de sa fonction, celle de sénateur de la République. Car ce faisant, il contribue à déstabiliser un peu plus la Haute Assemblée, qui se doit donc d'être plus exemplaire que toute autre. La Justice est un droit, mais aussi un devoir, qui se doit d'être respectée, d'autant plus pour les représentants de la République. M. Dassault n'est cependant pas seul responsable, car c'est à certain de ses pairs, sénateurs membres du Bureau de la Haute Chambre, qu'il doit temporairement son salut.
Il est de notre devoir collectif d'honorer la République et cela passe nécessairement par une irréprochabilité dans l'exercice des fonctions qui sont les nôtres. Si nous sommes effectivement des représentants de la République, cela ne doit être que pour mieux la servir, et non pour la salir. Le projet de moralisation de la vie politique, voulu par le président François Hollande et sur lequel il a été élu, auquel la Gauche forte apportera tout son soutien le moment voulu, montre le désir que les Français ont de voir les institutions politiques assainies et respectueuses de leur vote.
Il nous faut arrêter de jouer sur les ambiguïtés juridiques, qui permettent de reporter ad vitam aeternam des "affaires publiques", en ce qu'elles touchent à notre représentativité nationale. C'est ce pourquoi nous nous battrons, pour que la politique soit, dans les rangs de tous, exercée avec toute la probité et le sens de l'honneur qu'elle exige.
Cette tribune, signée par Yann Galut, Alexis Bachelay et Marie-Anne Chapdelaine, parlementaires de la Gauche forte, et Mehdi Thomas Allal, délégué général, a été publiée initialement par le Huffongton Post, le jeudi 16 janvier 2014, à l'adresse suivante : http://www.huffingtonpost.fr/yann-galut/fonction-politique-dassault-immunite-parlementaire_b_4603034.html