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On le dit l'inventeur des portraits de dos. On voit en lui tantôt un héritier de Vermeer tantôt un précurseur de Hopper. Toujours est-il que Vilhelm Hammershøi, peintre danois de la seconde moitié du XIXe siècle, a su, à mes yeux en tout cas, rendre comme personne la rigueur des atmosphères d'intérieurs et lui opposer la présence vibrante des femmes qu'il peint, immobiles, songeuses ou indifférentes, occupées à coudre, à lire ou à rien mais comme figées dans l'instant et tout entières résumées dans la fragilité de leur nuque qui attire toute la lumière, au point d'en devenir le sujet principal.
Ce tableau me "parle" tellement que j'ai failli un moment le choisir pour illustrer mon profil sur le site. Puis j'ai renoncé et lui ai préféré une banale salière qui probablement me ressemble davantage en tant que saupoudreuse invétérée. Toujours est-il que c'est un peu de lui que l'idée de cette édition est partie. Lors d'échanges de commentaires dans un magnifique billet de Jonas2 sur le dedans-dehors, d'abord, puis sur un autre billet, d'Alain Gillis, cette fois, consacré à Bergson et la neuro-imagerie. A noter, d'ailleurs, plusieurs médiapartiens comme F Denizot, Anne Guérin-Castell, ou Alain Gillis lui-même, s'étaient alors déclarés sur le fil qui avait suivi, pas hostiles à rejoindre cette édition lorsqu'elle serait créée, mais bon ! (smiley clin d'œil + auréole faussement innocente)
Le titre de ce tableau est somme toute assez banal: "Intérieur au 30, Strandgasse". Moi, quand je pense à lui, je lui donne un autre nom: "L'Hésitation". J'y vois chaque fois un carrefour des possibles, la pause impalpable où tout peut basculer, le moment-clé où l'avenir de cette femme va peut-être se jouer. Bref, le moment exact où pour elle un choix crucial va être fait. Ou pas. Chaque fois, le scénario que j'en fais est différent, selon le temps qu'il fait ou mon humeur du moment. Tantôt elle va se précipiter au devant des visiteurs dont elle guette l'arrivée. Tantôt la seconde d'après elle va tout planter là, jeter un manteau sur ses épaules et se sauver, sans même savoir vers quoi ses pas vont la mener. Tantôt, elle s'était fait un sang d'encre et aux bruits qu'elle entend, se sent enfin rassurée. Tantôt il y a de l'amour dans l'air. Tantôt c'est de la peur. Tantôt de l'ennui. Tantôt de l'impatience. Tantôt, ce n'est rien, juste un itinéraire habituel dans l'appartement et des gestes quotidiens.
Et vous, que voyez-vous dans cette image ? A quoi songe-t-elle ? Qui est-elle ? Que faisait-elle la minute d'avant et que fera-t-elle la minute d'après ? Quel sera le dénouement ? Faites votre sous-titrage personnel, en bulles ou en simple légende sous l'image, et racontez ce que cette image vous évoque....
Et pour connaître un peu mieux l'univers très dehors-dedans d'Hammershøi, si cela vous tente, voir ici....