Dérives politiques… Si ce débat idéologique est quelque chose auquel vous ne vous sentez pas à l’aise et que vous préférez revenir à un débat plus monétaire; voici un site [www.liberaux.net] qui répertorie une liste impressionnante de scandales auxquels le gouvernement libéral de Jean Charest est impliqué. Et ça, ce ne sont pas les étudiants qui le disent, ce sont les médias qui les rapportent. Dernier exemple majeur : le pétrole découvert à l’île d’Anticosti. Le Parti Québécois au pouvoir en 2002 avait mis en place un investissement de 330 millions de dollars sur dix ans dans une division d’Hydro-Québec sur le pétrole et les gaz naturels. En 2008, le gouvernement libéral de Jean Charest supprime cette division prétendant que nous n’avons pas l’expertise pour faire de l’exploration sur notre vaste territoire; si 33 millions de dollars ne peuvent procurer un minimum d’expertise, qu’est-ce qui le peut? En supprimant cette division de la compagnie nationale, les contrats (permis d’exploration et d’exploitation) sont revenus au secteur privé, deux compagnies : Pétrolia et Junex. Quatre ans d’exploration plus tard, ces mêmes compagnies annoncent la découverte d’un potentiel pétrolier à l’île d’Anticosti de 4 000 milliards de dollars. Fait non surprenant, plusieurs hauts dirigeants en poste à Hydro-Québec en 2008 travaillent maintenant au sein de Pétrolia et Junex. À lui seul, ce scandale vaut un soulèvement populaire pour démontrer un mécontentement certain envers ce gouvernement. Imaginez, les 332 millions que le gouvernement veut aller chercher avec la hausse des frais de scolarité ne représentent que 0,0083 % de ces 4 000 milliards! La dette de l’État si dangereuse de plus de 250 milliards, n’aurait pas été si dangereuse. La santé. Les routes. La liste est longue, mais tout ça est à l’heure actuelle impossible plus difficile par la(es) faute(s) de Jean Charest et ses décisions de gouvernance. Mais bon, il agit en père qui réprimande des enfants gâtés, alors il doit être un bon dirigeant. On dit que ce sont les actions qui déterminent qui nous sommes, j’ajouterai que ce ne sont pas seulement les actions médiatisées qui définissent la personne que nous sommes. Transposons la réflexion sur une actualité (peu médiatisée) canadienne : un questionnement s’impose lorsque les vies de millions de personnes ne valent pas la peine d’être épargnées parce que le possible remède du cancer serait un produit non breveté [http://www.youtube.com/watch?v=nA8kNR5y7Hs].
Sur une touche plus personnelle
Le plus grand défi n’est pas la validité de notre idéologie, mais bien qu’elle se fasse entendre, véritablement entendre. En ce sens, le cœur serait qu’il y ait présence d’échanges entre les étudiants (et leurs partisans) et ceux qui se positionnent en opposition au mouvement. Cette absence d’échanges (dans mon cas, je suis toujours prêt à discuter, mais plusieurs « opposants » à mon carré rouge ne m’ont jamais adressé la parole concernant ce que je porte) est pour moi la solution. Par l’absence verbale de leur pensée, je ne peux que tirer quelques conclusions de ce mutisme sélectif envers moi : soit qu’ils ont choisi leur position sans la réfléchir et leur orgueil leur empêche d’admettre une possible faiblesse dans leur raisonnement, soit ils ont peur que je change leur vision du conflit; les obligeant ainsi à prendre conscience des problèmes de la société, forçant leur conscience à travailler, et une conscience qui travaille apporte des questionnements désagréables qui rendus à un certain point exige une action, effort que plusieurs ne désirent pas faire. Je ne peux m’empêcher de penser, dans ces cas-là aux paroles d’un croyant âgé doutant de sa religion : pourquoi continuer à vivre selon les principes de l’Église alors qu’il y a présence de doute? La réponse est simple, parce qu’aussi non, j’aurai vécu toute ma vie pour rien, je dois donc croire. Il est difficile d’admettre l’échec partiel d’une vie, mais à mes yeux l’humilité a davantage de valeur qu’une maison payée!
Ces dernières lignes sont une provocation ouverte et assumée puisque le mutisme dans mon entourage est ce qui me gruge le plus d’énergie, mon dernier recours est donc la provocation facile pour connaître leur point de vue, directement, et non pas par paroles rapportées. Je suis parfaitement conscient que tout ne soit pas noir ou blanc, mais la provocation amicale a ses avantages.
La majorité des gens qui tentent de me provoquer ou m’agresse verbalement parce que je porte fièrement le symbole d’une génération (j’ose l’affirmer comme une certitude) ne se rendront jamais à ces lignes, pour la seule et unique raison qu’ils ne veulent pas entendre ce que j’ai à dire. Ce blocage est désolant et m’attriste à un point tel que j’ai perdu, envers cette partie de mes aîné(e)s, la confiance et le respect que je leur portais. Je relativise ici le mot respect, parce que j’ai été élevé en l’ayant comme principe, j’affirme donc que j’ai perdu le respect idéologique de certaines personnes, leur validité intellectuelle. Je suis ouvert aux différences idéologiques, mais je rejette l’agression hermétique ne laissant aucune place à la parole réciproque. Par contre, je suis tombé amoureux de ma génération. Amoureux de sa fougue, de sa créativité, de son attitude posée, de ses démarches pacifiques, de son refus à se rabaisser à des combats éphémères qu’apporte l’argent, à son sens communautaire, collectif et social bien supérieur à ce que je pouvais même imaginer dans le plus fou de mes rêves et de mes fantasmes sociaux, de son refus du paternalisme assommant et dégradant dont elle est victime (dans l’espace social), de ses discours réfléchis, de son intelligence, de son dédain envers l’égoïsme, mais surtout de l’usage de ses souliers, parce que malheureusement peu de gens sont encore prêts à marcher dans les rues préférant rester dans leur petit confort et leur routine par peur de déranger plutôt que de se battre pour ce qu’ils croient, désirent et espèrent pour la société dans laquelle ils sont supposés évolués. Faisant d’eux des membres économiquement responsables, mais socialement irresponsables.
Parfois les mots des autres sont mieux appropriés pour exprimer ce que l’on ressent. Dans mon cas, ce sont les mots de Charles Dionne tirés de son texte intitulé La fêlure :
« L’Histoire advient, qu’on le veuille ou non. Et rarement est-elle advenue si proche de nos yeux — rarement l’avons-nous entendue si clairement — rarement l’a-t-on sentie aussi distinctement nous glisser des mains.
Cette Histoire, c’est l’histoire étrange d’un regard condescendant que porte une « majorité du silence » sur sa jeunesse — sa jeunesse qui a décidé de s’interroger, de réfléchir un moment, de douter, de remettre en question un modèle qui, visiblement, craque et laisse tomber dans ses crevasses toute la génération qui devait le porter sur ses épaules. C’est l’histoire de citoyens au regard effaré qui ne trouvent rien d’autre à faire que de froncer les sourcils tandis que leurs enfants dépoussièrent la corruption, le gaspillage, les mensonges et la main de fer de la finance.
C’est l’histoire de parents qui, une fois leurs impôts, leurs taxes, leur maison, leur spa, leur voiture, leurs études, bref, leur juste part payée, se sentent nargués par cette jeunesse qui espère autre chose que de vivre sous le seul signe de l’amertume — cette jeunesse qui déchire les mailles du tissu social en affirmant qu’elle peut faire mieux que de s’engager dans une lutte de marché où l’accomplissement d’une vie ne tient qu’au revenu qu’elle génère. »
Je tiens à remercier toutes les personnes qui ont participé à l’élaboration de cette pensée! Marion Froger, Magali Ouellet, Djemaa Maazouzi, Sophie Wahnich, Stéphanie Croteau, Keven Mercier, Ariane Roy-Poirier, Paméla Lepage, Annie Hardy, Maxime Garros, Julie Logeais, Sylvie Vendette, Valérie Préseault, Daniel Préseault, Brice Tiret, Mme D’Amour (!), Stéphanie St-Laurent, Janie Brien, Samuel Vendette, Pierre Beaubien, Jean Brien, Habiba Djahnine, André Habib, Suzanne Beth, Amélie Vendette, Emma Roufs, Marie-Hélène Constant, Rémy Besson, Karine Abadie, Noël Vendette, Guillaume Vendette, et plusieurs autres.
Et les figures publiques du conflit : Gabriel Nadeau-Dubois, Martine Desjardins, Léo Bureau-Blouin, Jeanne Reynolds, Line Beauchamp, Jean Charest, Raymond Bachand, Michelle Courchesne, AnarchoPanda, Québécor Média (et tous ses protégés), Le Devoir, La Presse et plusieurs autres, car le combat se poursuit…
Marc-Antoine Lévesque