Billet de blog 8 octobre 2025

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Florence Levain : « Je voulais apprendre à écrire »

Du sport et de la poésie, Florence Levain retient une même idée du mouvement, un rythme intérieur qui anime l’esprit jusqu’aux mots. Son recueil, Caresse Bleue à paraître prochainement, condense vingt années d’une méditation intérieure, travaillée patiemment, retenant l’effet impalpable du temps. Entretien 2/2.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

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Florence Levain © François Rochon pour Le Sas-culture

Le Sas-culture : Votre volonté de travailler l’écrit commence voilà une vingtaine d’années. Vous avez pris l’habitude de noter quelques mots sur des feuilles volantes, évoquant la sensation d’un moment, mais vous souhaitez entrer dans une pratique poétique plus consciente, plus technique. Commencent alors de longues années d’ateliers d’écriture. Pouvez-vous nous parler de ce long cheminement ?

Florence Levain : Au départ, j’ai mis des mots sur le papier juste comme ça, pour une carte d’anniversaire, pour souhaiter la bonne année, pour mon plaisir, pour faire plaisir, chercher un mot qui me touche et change de la formule habituelle. Un geste simple pour la joie que donne le bruit de la plume glissant sur le papier, la sensation. Et puis, j’ai pris l’habitude de noter, une couleur, un parfum, une idée, d’associer un mot avec un autre, de créer des associations improbables.

Un jour, j’ai eu envie d’apprendre à écrire et j’ai cherché des ateliers d’écriture près de chez moi, j’ai choisi celui de Blandine Vernier, Écrits libres. Les ateliers n’étaient pas orientés vers la poésie, mais l’été, elle animait un blog poétique. Et puis une consigne est aussi là pour être détournée… je continuais à griffonner sur des bouts de papiers, des Post-its, des tickets de caisse, des enveloppes, tout ce qui me passait entre les mains.

Mais des bouts de papier, comme vous dites, à un livre, il reste des étapes…

J’ai souhaité organiser cette matière, mettre de l’ordre même, reprendre les textes, les travailler encore. Le temps était venu de me munir de jolis carnets, avec leur couverture cartonnée, leurs enluminures. À l’intérieur, un papier chaud, couleur écru, épais, agréable à toucher. J’ai commencé à reprendre les textes, comme si j’avais de minuscules livres sur les rayonnages de ma bibliothèque intérieure.

Après la pandémie, une période éprouvante, j’ai changé d’atelier d’écriture, pour voir, je suis allée chez Véronique Amans, avant de rejoindre Sylvaine Reyre à Rochefort. Le temps était venu d’aller plus loin, Sylvaine proposait un atelier spécialisé dans la perspective de composer un livre. Je voulais donner une forme, une unité, à tous ces poèmes écrits à différents moments de mon existence.

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Caresse bleue © François Rochon

 La publication de Caresse bleue fait actuellement l'objet d'un financement participatif sur la plateforme Proarti (avec le soutien du Ministère de la culture). Pour vous joindre à la démarche et précommander le livre, vous pouvez accéder au site du projet ici.


Le Sas-culture : À l’automne paraîtra votre recueil. La poésie reste une forme d’écriture confidentielle, même si nos souvenirs d’enfance se rappellent forcément le plaisir d’un joli texte, puis à l’adolescence l’émerveillement de Baudelaire ou Rimbaud, par exemple. En quoi votre recueil a-t-il changé votre regard sur la poésie ? Vous donne-t-il envie plus encore d’en lire ?

Florence Levain : Mon histoire avec la poésie est très classique, à six ou sept ans, j’avais reçu en cadeau un 45 tours des Fables de La Fontaine, Le lièvre et la tortue, Perrette et le pot au lait, Le pot de terre et le pot de fer. En France, ces fables marquent une vie ! Et puis, il y a eu Alphonse Daudet, Les lettres de mon moulin ou L’oiseau bleu ; Jacques Prévert avec Le portrait d’un oiseau ou Le cancre qu’il fallait réciter par cœur et en y mettant le ton…

Ensuite à l’adolescence, Lamartine et Le lac, Breton, Queneau avec L’écolier. C’est dans cette période que j’ai découvert La Montagne de Jean Ferrat que j’écoutais en boucle, je connaissais la totalité des paroles, j’ai donc lu Aragon qui rendait toutes les choses plus belles et plus intenses. Enfin, au bac, plus question d’apprendre, il fallait comprendre, analyser, décortiquer. J’ai fait connaissance avec Baudelaire, Verlaine, Eluard, Rimbaud avec des textes comme Brise marine, Mon rêve familier, La courbe de tes yeux, Ma bohème ou Le dormeur du Val.

Mais depuis, comment la poésie a continué avec vous ?

Le temps a filé, je me suis un peu perdue, j’ai oublié la poésie, je l’ai rangée, je l’ai fuie, peut-être par peur ou par pudeur. Depuis que j’écris des poèmes, que je travaille sur ce recueil, je me souviens des textes en oubliant l’exercice scolaire, surtout je m’attache à la tendresse de la poésie, la façon dont elle me permet de tenir le monde entre mes mains et de le façonner, comme j’ai envie de le voir.

J’ai découvert de nouveaux auteurs, de nouveaux poètes. Je pense à Franck Bouysse, Alexis Bardini, Gaëlle Josse, Albane Gellé et plus récemment Cécile Coulon. Je compte bien continuer cette quête et tout en relisant les classiques.

J’ai besoin à la fois de lire et de mettre mon corps en mouvement pour donner un sens aux mots. Le sport me procure aux plans physique, mental, émotionnel, une immense quiétude, une force d’esprit source de clarté.

Retrouvez la première partie de l'entretien parue tout dernièrement ici.

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Florence Levain © François Rochon pour Le Sas-culture

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