Billet de blog 23 novembre 2024

François Rochon (avatar)

François Rochon

habitat et logement social, culture et citoyenneté

Abonné·e de Mediapart

Sur « Vacance du retour », roman récemment paru

Alors que vient de paraître mon roman « Vacance du retour » aux éditions Le Sas-culture, je reviens ici sur le contexte de son écriture. Après avoir évoqué dans un précédent billet d’été l’origine du texte liée à une interrogation sociologique, je présente ici sa dimension « littéraire », qui me renvoie à la relecture de Pierre Loti, académicien Rochefortais à redécouvrir.

François Rochon (avatar)

François Rochon

habitat et logement social, culture et citoyenneté

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
Photographie originale de la couverture de "Vacance du retour", femme à la fenêtre, juillet 2022 © François Rochon

En février 2020, je pars un mois à Bamako, au Mali. Je n’ai jamais voyagé si loin, si longtemps. Je rejoins un couple d’amis qui habitent là-bas, ils souhaitaient faire l’expérience d’un poste à l’étranger. J’arrive après une importante manifestation anti-française, des précautions de sécurité sont demandées, le voyage sera loin du circuit touristique local qui a tant fait rêver voilà quelques années. Dans la villa, je note des impressions sur un carnet. Car ce voyage marque une césure entre ma décennie de vie parisienne et mon retour dans ma ville natale de Rochefort en Charente-Maritime, où je vis depuis cinq ans maintenant.

Une forme de « vacance intérieure » s’installe entre deux périodes. Cette idée m’est venue progressivement, elle trouve sa formulation avec un travail photographique et d’archives entamé en 2017, que je place finalement sous le signe de Pierre Loti. J’ajoute même un sous-titre explicite, dans la suite d’un précédent livre Veillées du fleuve, Aux pays de Pierre Loti, coordonné avec Sylvaine Reyre. Ce sera bien une « Vacance intérieure, Aux pays de Pierre Loti », qui naviguera entre mon expérience comme un exemple simple et la lecture de l’écrivain, le souvenir de son œuvre. Mon récit de voyage pourrait prendre place dans cette démarche.

 C’est pourquoi au retour, dans mon nouvel appartement, je lis et retrouve Loti, avec Une vie de roman de Quella-Villéger, Pécheur d’Islande dans une remarquable version audio, Vers Ispahan en miroir d’une œuvre pour piano fascinante de Kœchlin, Les heures persanes. Je visite et photographie la première maison de Cruchita, rue Pasteur comme le relate un article de Kharinne Charov dans Sud-Ouest, actuellement en ruine, dont l’état de délabrement me renvoie au Pèlerin d’Angkor.

Progressivement, je reprends mon récit de voyage avec la conscience que le juste avant et le juste après sont tout aussi importants, que c’est la continuité d’une transition lente qui compte parce que je ne suis plus le même. En effet, j’avais échangé quelques lettres avec une amie, au moment de quitter Paris, puis noté les idées qui venaient spontanément dans un carnet lors de mon installation à Rochefort. Je comprenais que le récit de voyage fonctionnait en fait avec ces deux autres récits potentiels qui l’encadraient, formaient ensemble l’exploration méthodique d’un même mouvement. Mais en les liants, le récit se détachait aussi de moi, mon double devenait un personnage, il quittait l’époque, se tournait vers sa propre perception dont je devenais seulement le narrateur.

J’ai précédemment décrit, dans un billet de blog cet été comment l’interrogation sociologique m’a accompagnée dans l’écriture, pour passer des relevés biographiques à l’histoire réinventée d’un roman, travaillant une sujet de réflexion. Mais il y avait aussi une motivation « littéraire », entre guillemets parce que seulement exploratoire. J’ai pu la travailler méthodiquement dans l’atelier d’écriture À Mots Ouverts de Sylvaine Reyre. Elle débouche sur le travail en cours autour de la « vacance intérieure » qui me renvoie désormais directement à la figure Loti, soulagé d’avoir passé ce premier cycle de l’initiation littéraire porté davantage par le récit de soi, entre 2017 et 2024 donc, ouvrant sur un deuxième cycle tourné vers le dialogue avec une œuvre de notre patrimoine.

Je place donc le récent roman Vacance du retour entre deux autres textes, évoquant en miroir l’échappée de Paris, que j’avais indiquée seulement comme une intuition dans, Maintenant je t’écrirai (2021), et l’arrivée à Rochefort où j’avais décrit l’étape d’après l’installation avec Lettres rochefortaises (2023). Le roman, Vacance du retour se situe intellectuellement entre ces deux livres, explorations « littéraires » qui m’ont permis d’approcher, à leur manière, l’idée de « vacance intérieure » sur laquelle je vais me concentrer désormais dans un travail spécifique. Celui-ci me permettra de prolonger mon étude sur le logement, éditée aux éditions de l’Aube, sur un versant culturel complémentaire du versant citoyen.

 Référence : Vacance du retour, de François Rochon Saint-Aubert, Le Sas-culture, 220p, 2024, 14 euros

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.