Billet de blog 28 août 2013

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Réformer les retraites, un levier pour l’égalité femmes-hommes

Charlotte Brun, Adeline Hazan et Laurence Rossignol, élues socialistes, émettent leurs propositions pour combattre les inégalités de pensions: améliorer la valorisation des trimetres incomplets, transformer la majoration aux parents de trois enfants, et réformer l'assurance vieillesse des parents au foyer.

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Charlotte BrunAdeline Hazan et Laurence Rossignol, élues socialistes, émettent leurs propositions pour combattre les inégalités de pensions: améliorer la valorisation des trimetres incomplets, transformer la majoration aux parents de trois enfants, et réformer l'assurance vieillesse des parents au foyer.


Le débat qui s’ouvre sur les retraites est un levier fondamental pour l’égalité femmes-hommes. Il est de la responsabilité de la gauche de réaliser une réforme qui consolide notre système par répartition, le rende plus juste et plus solidaire. Une réforme progressiste des retraites doit corriger les inégalités, et notamment celles qui touchent les femmes.

Il y a trois ans, nous étions dans la rue pour nous opposer à la réforme des retraites de Nicolas Sarkozy, François Fillon et Eric Woerth, aux côtés de millions de salariés, de citoyens, engagés ou non, aux côtés d’un mouvement féministe y trouvant alors le terreau de son second souffle. Nous y dénoncions, entre autres, les effets catastrophiques de cette réforme sur les retraites des femmes.

Aujourd’hui, la gauche au pouvoir a fait de l’égalité femmes-hommes une de ses priorités politiques. L’intégration de l’égalité dans toutes les politiques publiques est autant un objectif qu’une méthode : le rétablissement du ministère des droits des femmes, la tenue en novembre 2012 du Comité interministériel pour l’égalité femmes-hommes, la prise en compte des droits des femmes dans la politique de la ville, la politique culturelle ou encore l’action diplomatique de la France, la nomination d’un haut fonctionnaire chargé de l’égalité femmes-hommes dans chaque ministère en sont la preuve.

L’enjeu est immense : faire de l’égalité femmes-hommes la priorité de la réforme des retraites.

Si cette responsabilité échoit aujourd’hui à la gauche, c’est parce que la droite n’a jamais pris en compte les inégalités femmes-hommes, voire les a aggravées. La dernière réforme en date, celle de 2010, a reculé l’âge du départ à taux plein de 65 à 67 ans ; les femmes en furent les premières victimes – 25% d’entre elles attendent 65 ans pour prendre leur retraite, contre 15% des hommes.

Nous le disons à l’opposition, qui revendique la fierté d’avoir fait cette réforme : le courage politique, ce n’est pas de sacrifier les femmes sur l’autel de l’équilibre purement financier des comptes sociaux mais de regarder la précarité en face et de la faire reculer – un tiers des femmes retraitées touche une pension inférieure à 700 euros, contre un sixième des hommes retraités. C’est aussi de chercher les meilleurs moyens de corriger les inégalités de pensions : l’écart moyen entre les pensions des hommes et celles des femmes est de 42%.

Les inégalités salariales sont la principale cause des inégalités de pensions. Le ministère des droits des femmes et le ministère du travail mènent une politique globale pour le recul des inégalités professionnelles : accompagnement des entreprises dans la réalisation de leurs plans d’action pour l’égalité salariale, renforcement de leurs obligations et effectivité des sanctions prévues par la loi. Mais c’est une lâcheté de renvoyer la réduction des inégalités de pensions à la seule lutte contre les inégalités salariales. Les inégalités salariales ne disparaîtront qu’à long, voire très long terme et c’est dès maintenant que les mécanismes de correction de la « child penalty » (décrochage de cotisation lié au temps passé par les femmes auprès des leurs enfants) doivent être renforcés.

Nous mettons donc trois propositions sur la table.

  • Le mode de validation des trimestres (200 heures au SMIC) doit être modifié pour ne pas pénaliser les salariés à temps partiel, dont plus de 80% sont des femmes. Nous proposons d’ouvrir la possibilité de capitaliser des heures travaillées qui ne permettent pas de valider un trimestre de retraite : ces heures seraient alors utilisées, en fin de carrière, pour valider des années incomplètes.
  • La majoration de 10% du montant de pension pour les personnes ayant élevé trois enfants a été créée en 1926 dans un contexte de moindre activité professionnelle des femmes. Proportionnelle au montant de la pension, elle n’est pas équitable : elle bénéficie davantage aux retraités aisés qu’aux retraités pauvres, et davantage aux hommes qu’aux femmes. C’est pourquoi nous proposons de la transformer en une majoration forfaitaire par enfant.
  • L’assurance vieillesse des parents au foyer doit être réformée pour prendre en compte l’évolution des familles. Elle est aujourd’hui calculée sur la base du revenu du couple, alors même qu’une séparation a pu avoir lieu depuis. Il s’agit ici de reconnaître le droit à l’autonomie des femmes retraitées.

Ces propositions permettraient, parmi d’autres, de faire reculer les inégalités de pensions entre les femmes et les hommes. La réforme des retraites que prépare le gouvernement exprimera le redressement dans la justice, qui guide l’action du Président de la République depuis le 6 mai 2012. Elle montrera aussi qu’il est possible de réformer nos retraites en restant fidèle aux principes de notre système par répartition, et que réformer puisse être synonyme de progrès. A condition que la situation de la moitié de la population soit prise en compte !

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