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Ce qu’on ne voit pas toujours, côté spectateurs, c’est comment on nous fait voir. On sait bien que, derrière nos têtes, quelqu'un règle la lumière et le son, il n’en reste pas moins qu’on ignore jusqu’à quel point cet œil étranger va préparer nos regards... et nos oreilles.
Derrière sa console, Florian soutient Anthony dans un tour de chant exigeant à la guitare (aux guitares : car il y en a trois dont une toute petite). L’espace est réduit, c’est l’Espace fou ; on couvrira l’ambiance avec une floppée de spots de 50 watts, de sorte que les filtres colorés puissent valoriser la chaleur du bois, sans aplats ni reflets superflus. Florian a envie de ne souligner que des détails, comme le bras gauche quand l’artiste tient le manche de l’instrument. Quoi qu'il en soit, la lumière frontale écrase trop : ce qu’il faut plutôt, à la fin de sa journée de travail, c’est avoir pu exercer l’éclairage point par point de chaque endroit sombre, en suggérant les reliefs, en apaisant les accidents, en variant les ressources et les directions, en alternant les moments de pause et ceux de mise en évidence.
La colère n’existe pas quand on travaille dans ces lieux sans doute exigus, mais correspondant à la nature intime du spectacle présenté. Et si les artistes savent ce qu’ils veulent transmettre au public, on se sent capable de les suivre sur d’autres tournées. Ce serait certainement meilleur si les moyens correspondaient réellement aux aspirations, seulement, il y a de quoi offrir de la qualité avec les techniques à disposition.
L’intérêt de ce métier, c’est de surplomber la salle, plateau compris, pour qu’il reste un peu de ces lueurs, imprégnées dans la rêtine de ceux qui se sont trouvés là, à partager l’événement.
AnthonyAlborghetti chante Dick Annegarn sous la régie de Florian Guerbe, à l’Espace fou, 95 rue des Infirmières, Avignon, jusqu’au 31 juillet 2011.
Jean-Jacques M’µ