Billet de blog 4 janvier 2012

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Des étudiants boursiers victimes de la rigueur

A l'université de Reims, les étudiants boursiers sur critères sociaux partis à l'étranger ont appris courant décembre que le montant de leur aide à la mobilité serait revu à la baisse. En cause, le ministère de l'enseignement supérieur qui a retoqué 39.715€ de crédits alloués à l'université en 2011. Simon Ulrich, étudiant et militant du Front de Gauche, dénonce un «abandon» de la part de l'Etat.

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A l'université de Reims, les étudiants boursiers sur critères sociaux partis à l'étranger ont appris courant décembre que le montant de leur aide à la mobilité serait revu à la baisse. En cause, le ministère de l'enseignement supérieur qui a retoqué 39.715€ de crédits alloués à l'université en 2011. Simon Ulrich, étudiant et militant du Front de Gauche, dénonce un «abandon» de la part de l'Etat.

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Illustration 1

Je me présente. Je m'appelle Simon Ulrich et je suis actuellement en 3e année de licence de droit. Je poursuis mon cursus universitaire dans le cadre du programme Erasmus en Écosse à Aberdeen. En effet, depuis plusieurs années, l'Europe a mis en place avec succès une politique d'échange international.

Comme de plus en plus d'étudiants français, j'ai tenté ma chance et j'ai décidé de quitter mon pays pour en découvrir un autre, découvrir une nouvelle langue et diversifier mes connaissances juridiques. Mais, actuellement boursier, je dois choisir mon orientation non pas seulement en fonction de mes résultats, ma soif de connaissance ou mon ambition professionnelle, mais surtout en prenant en compte les coûts que ma famille peut supporter.

Étudier à l'étranger à un prix, un prix qui est loin d'être négligeable. Je le dis clairement, sans l'aide de l'Etat, sans une politique d'accompagnement et de solidarité, j'aurai refusé de quitter mon université de Reims pour celle d'Aberdeen. Lorsque j'ai déposé ma candidature pour ce programme, il me fut bien précisé que ma situation sociale ne sera pas un frein. J'y ai cru.

En effet, en plus des bourses Erasmus et régionales qui sont accordées à tous les étudiants en mobilité, le ministère a promis et confirmé une bourse supplémentaire de 400 euros mensuels pour les étudiants boursiers sur critères sociaux. Vous pouvez trouver sur le site du maroquin les traces de son existence (1).

Je suis donc parti en étant certain de toucher cette bourse et donc avec l'assurance d'équilibrer un budget conséquent. Il ne me restait plus qu'à travailler dur. Aujourd'hui, ma certitude s'est effacée, l'ignorance s'est installée et la précarité approche à grands pas.

En effet, au cours des semaines en Écosse, je n'ai vu aucun signe des versements promis. Je me suis dit que ces retards trouvaient leur source dans les problèmes qui touchaient les autres étudiants boursiers en France. Mais à mon retour à la maison familiale, ma mère m'a présenté une lettre m'informant que pour le premier semestre, le montant de ma bourse de mobilité avait été revu. Ce ne serait plus 400 euros mensuels, mais 400 euros pour le semestre qui me seraient versés. Mon budget se voyait donc, par une décision floue, perverse et obscure, amputé de moitié. Et cette même lettre laissait planer un doute total pour le second semestre.

Illustration 2

Ne comprenant pas ce revirement, j'ai décidé de me renseigner sur les raisons de cet «abandon». Je suis allé sur le site du ministère, sur le site service-public mais aussi sur le site gouvernemental informant les étudiants de leurs droits et tous, sans exception, confirmèrent à la fois l'existence et le montant mensuel de 400 euros.

D'un côté, officiellement, la bourse existe toujours. Et de l'autre, par une lettre aux formes discutable, on m'annonce sa modification. Face à cette contradiction, j'ai décidé de faire lumière et d'obtenir mes droits. J'ai donc pris l'initiative d'écrire une lettre ouverte au ministre sur mon blog. Avec des camarades du Front de Gauche, nous avons relayé l'information le plus possible. Elle est même disponible sur le site de campagne du Front de Gauche.

Grâce à cette action, d'autres étudiants se sont reconnus dans ma situation et m'ont contacté pour m'informer de leur précarité. Ainsi, ce problème de non-versement total des bourses concerne également la Fac de Dunkerque. Pour les autres, je ne sais pas encore.

À l'heure actuelle, je n'ai toujours pas eu de réponse du ministre. Grâce à un reportage de France 3, il semble que les problèmes budgétaires soient réglés et que les bourses nous seront versées. Mais l'utilisation de termes flous ne nous rassure que pour 2012 et a la politesse de nous laisser dans l'ignorance pour les sommes dues en 2011 (2). Il est à noter que j'ai pu lire le rapport de la commission des finances du sénat et que celui-ci signalait une baisse de 10 millions d'euros sur l'enveloppe de l'aide à la mobilité.

Bien sûr, voir une corrélation entre l'augmentation du nombre de boursiers, la décision gouvernementale de la baisse de l'enveloppe budgétaire et nos retards et annulations de nos versements serait l'oeuvre d'un esprit vraiment pervers.

En tout cas, je tiens à signaler que je suis heureux que le gouvernement se félicite du nombre record d'étudiants français envoyés à l'étranger. Envoyés ou abandonnés?

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(1) L'aide à la mobilité est attribuée aux boursiers sur critères sociaux. Pour répondre aux demandes formulées en 2011, l'université de Reims a créé une grille définissant le montant de l'aide allouée en fonction de l'échelon de bourse dont bénéficient les étudiants. Selon cette grille, Simon Ulrich, boursier d'échelon de niveau 1, aurait dû se voir allouer 2,000 euros pour son année à l'étranger.

(2) Le ministère de l'Enseignement supérieur s'est engagé auprès de M. Gelle, vice-président du Conseil des études et de la vie Universitaire, à payer la somme permettant à l'université et au Crous d'assurer le versement des bourses de 2011. Pour l'heure, la situation n'est toujours pas régularisée.

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