Billet de blog 12 avril 2013

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Logement : l'échec du système Delanoë

« La question du logement mécontente plus que jamais les Parisiens », constate Jean-François Legaret, maire du Ier arrondissement et président du groupe UMP au Conseil de Paris. Il reproche au maire de la capitale une « politique de financement de logements sociaux (qui) n’est qu’un espoir déçu » alors que « dans le même temps, le nombre de logements construits dans la capitale a nettement diminué ».

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« La question du logement mécontente plus que jamais les Parisiens », constate Jean-François Legaret, maire du Ier arrondissement et président du groupe UMP au Conseil de Paris. Il reproche au maire de la capitale une « politique de financement de logements sociaux (qui) n’est qu’un espoir déçu » alors que « dans le même temps, le nombre de logements construits dans la capitale a nettement diminué ».


A travers le souhait d’une Autorité métropolitaine du logement, Bertrand Delanoë a décidé d’imposer son modèle à l’ensemble des communes de l’aire urbaine de Paris par une structure contraignante vis-à-vis des villes qui ne respectent pas les seuils de logements sociaux, fixés par la loi.

En effet, depuis 12 ans, la politique du logement a pour seul objectif – quantitatif – d’atteindre le seuil de 20% de logements sociaux en 2014, soit avec 6 ans d’avance.

Et pour quel résultat ? La question du logement mécontente plus que jamais les Parisiens. La mobilité résidentielle est au plus bas, l’accession à la propriété semble inaccessible, les loyers paraissent élevés et la densité insupportable.

Tous les moyens ont été mis au service de cet objectif idéologique: les recettes des cessions, l’augmentation des droits à construire, et les réserves de logements sociaux dans le PLU.

L’échec de cette politique mise en œuvre pendant 12 années révèle aujourd’hui toute sa perversité.

Entre 2001 et 2012, 55 505 logements sociaux ont été financés mais 27 450 d’entre eux ont été réellement construits. Cela signifie que plus de la moitié des logements financés existaient déjà et ont été acquis pour être conventionnés en logements sociaux (1).

Tous les élus, au-delà des clivages politiques, reconnaissent que l’augmentation exponentielle du prix des logements et les loyers trop élevés sont la conséquence de la pénurie de logements.

Depuis son élection, le maire de Paris n’a donc construit que 2 500 logements sociaux par an. C’est nettement insuffisant eu égard aux 126 000 demandeurs de logements sociaux (2) et aux espoirs entretenus par le financement de 70 000 logements sociaux sur toute la mandature.

Bertrand Delanoë a ainsi organisé la pénurie de logements à Paris. Sa politique de financement de logements sociaux n’est qu’un espoir déçu, et dans le même temps, le nombre de logements construits dans la capitale a nettement diminué : 5 963 logements par an étaient autorisés entre 1991 et 2001 contre 2 884 logements par an entre 2001 et 2011.

Considérant le niveau de construction de logements à Paris, il n’est pas étonnant que le marché immobilier et locatif privés soient si déprimés : un taux de mobilité à 17 % – en recul de 9 points par rapport à 2009 –, des loyers à 23,2 €/m2 en moyenne et des appartements à plus de 8 200 €/m23.

Les Parisiens voient ainsi leur parcours résidentiel d’autant plus contrarié, dans une zone pourtant déjà tendue.

La Mission d’information et d’évaluation consacrée à la politique immobilière (4) a montré qu’en réalité, cette politique de financement de logements existants en logements sociaux n’a presque rien coûté à la ville. Entre 2001 et 2011, la Ville de Paris a effectué des dépenses foncières d’investissement en logements et en équipements publics à hauteur de 1,7 milliard d’euros... presque intégralement financées par des recettes foncières estimées à 1,3 milliard d’euros, tout en totalisant 10 milliards d’euros de recettes de droits de mutation sur la meme période.

La manne des recettes foncières a ainsi été entièrement mise au service d’une politique de préemption inefficace entretenant par là la spéculation immobilière.

Cette politique est d’autant plus perverse qu’elle conduit surtout à exclure. Selon une enquête de l’Atelier parisien d'urbanisme (Apur), la part des locataires présents lors d’un conventionnement  (5) représente 60% des occupants des opérations récentes (2007-2008), 56% des occupants des opérations précédentes (2004-2005-2006) et 45% des occupants des opérations les plus anciennes (2001-2002-2003).

Ces chiffres démontrent que le “ système Delanoë ” a mis en place une politique de peuplement et d’exclusion plus qu’une politique de construction de logements.

Au regard de ces chiffres, on comprend mieux pourquoi le bilan migratoire est déficitaire à Paris, avec une perte d’environ 1 427 personnes par an (6).

Il est urgent d’agir pour le logement des Parisiens ! La politique du logement doit être équilibrée entre les aides à la pierre et les aides à la personne, elle doit se donner des objectifs ambitieux de construction de logements, privés comme publics, elle doit s’adresser à tous et notamment aux familles, aux jeunes actifs, aux étudiants mais également aux retraités.

En 2014, il faudra rompre avec un modèle qui ne permet ni de répondre à la pénurie, ni de développer une offre large et diversifiée aux parisiens..

A Paris, un autre modèle est possible, consacré à la construction et la réhabilitation de logements.

Il est donc urgent de concevoir une autre politique pour le logement des parisiens en y associant tous les acteurs.

• • • • •

(1) Sources: Bleu budgétaire logement de la Direction du Logement et de l’Habitat de la Mairie de Paris (novembre 2012) et étude de l’Apur :  L’accès au logement social à Paris (septembre 2011).

(2) Rapport de la Mission d’Information et d’Evaluation relative aux modes et méthodes d’attribution des logements sociaux à Paris : états des lieux et mise en perspective (juillet 2012) (télécharger en pdf)

(3) Dossier CLAMEUR La conjoncture du marché locatif privé Bilan 2012 et perspectives 2013 (février 2013) et Base BIEN – Notaires Paris – Ile-de-France (février 2013)

(4) Mission d’Information et d’Evaluation relative à la politique immobilière de la collectivité parisienne, présidée par Jean-François Legaret. Le rapport sera présenté au Conseil de Paris des 22 et 23 avril 2013

(5) Apur, Enquête auprès des bailleurs sociaux sur le nombre de logements mis à disposition des Parisiens dans les immeubles acquis conventionnés de 2001 à 2009

(6) Apur, Paris, une population toujours en hausse – Résultats du recensement au 1er janvier 2010.

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