Billet de blog 12 septembre 2012

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Une nouvelle conf-errance environnementale? Non merci!

A la veille de l'ouverture de la Conférence environnementale, «l’environnement fait, toujours et encore, figure de domaine résiduel et déconnecté des priorités présidentielles», regrette Peggy Kançal, conseillère régionale d’Aquitaine (EELV). 

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A la veille de l'ouverture de la Conférence environnementale, «l’environnement fait, toujours et encore, figure de domaine résiduel et déconnecté des priorités présidentielles», regrette Peggy Kançal, conseillère régionale d’Aquitaine (EELV). 


Quasi absente du « cap » évoqué par le chef de l’Etat dans son allocution – hormis une brève et lapidaire référence à la fiscalité écologique – la conférence environnementale des 14 et 15 septembre conditionnera pourtant la vie, la soutenabilité du modèle économique et social de notre pays, pour les générations actuelles et futures. Force est de constater, si l’on s’en tient strictement aux paroles de François Hollande et au plan de redressement tel qu’il est présenté aujourd’hui, que l’environnement fait, toujours et encore, figure de domaine résiduel et déconnecté des priorités présidentielles… S’achemine-t-on alors vers un “ sous-Grenelle ” ?

Confusion. Observons d’abord la phase de préparation et d’élaboration cette conférence, annoncée sur le même mode opératoire que le Grenelle et la même organisation que la conférence sociale. Si, d’un côté, on peut saluer l’intégration de parlementaires, et d’élus de divers horizons, en revanche de nombreuses maladresses se sont produites lors de l’invitation des réseaux agréés, acteurs institutionnels, économiques et associatifs. Qui peut ainsi croire à une réelle éthique de la discussion lorsque, tout à la fois, la ministre de l’écologie annonce placer au cœur de la conférence le sujet de la qualité de l’air, et en même temps, à une dizaine de jours des débats, ne pas avoir convié officiellement la fédération nationale des agences agréées pour la qualité et la surveillance de l’air, et ne pas avoir balisé non plus le contenu des discussions.

Au-delà de tables rondes thématiques classiques, une double hiérarchisation des questions et sujets selon le niveau d’édiction des normes et règlements (européen, national) et selon le degré d’urgence de prise de décision serait pertinente. En effet, l’agenda annoncé du redressement de deux ans, ou de loi-cadre sur l’énergie fin 2013, semble hors sol pour certaines filières malmenées durant le précédent quinquennat (solaire, éolien notamment) dont la santé économique dépend de mesure de très court terme.

Corporatisme. L’enjeu de poids de la conférence environnementale serait de poser sur la place publique des difficultés, blocages et barrières propres au fonctionnement de l’administration française, pour pouvoir y remédier. Pour exemple, citons la situation de la filière des éco-matériaux biosourcés, comme la ouate de cellulose: les avis techniques sur certains de ses produits ont failli être supprimés par une instance liée au ministère du logement, en mai dernier, sous la pression de lobbys industriels. Même si un report de la suppression des avis techniques a été décidé, la réalité vécue par les PME-PMI positionnées sur une filière en plein essor n’est en pas moins injuste et préoccupante ; ce sont des milliers d’emplois dans des petites entreprises innovantes qui se trouvent ainsi touchés.

Un autre exemple marquant, ces derniers mois, est celui des dérogations accordées par certains préfets aux pratiques d’épandages aériens de pesticides, proscrits pourtant par une directive européenne. Comment, en effet, comprendre que ces dérogations soient délivrées de manière différenciée dans des départements où la pression d’acteurs agro-alimentaires peut être plus forte qu’ailleurs, piétinant le principe de précaution et les objectifs « Ecophyto » du Grenelle (réduction de 50% dans l’utilisation des pesticides d’ici à 2018). Dans les deux cas, la France montre le visage d’une administration dans laquelle les grands corps, et les lobbys, transgressent les réglementations. C’est bien d’un cap politique ambitieux et lisible dont nous avons besoin !   

Collusion. Cristallisant le plus d’attentes et de crispations, la table ronde sur la transition énergétique semble enfin assez mal engagée. Dès fin août, des ministres communiquent déjà sur des orientations liées au mix énergétique et à la part du nucléaire, créant la polémique et fermant le débat. Doit-on invoquer une simple erreur de communication, ou au contraire la distillation volontaire d’éléments de langage tout droits issus d’un rapport du Conseil en analyse stratégique, confié par le premier ministre au président honoraire d’EDF, Jean Bergougnoux ? Ce rapport, publié le 28 août, pose le nucléaire en filière d’excellence et d’avenir, seule capable d’assurer l’objectif prioritaire d’une énergie « peu chère ». Les énergies renouvelables y sont vues comme un secteur porteur, mais secondaire ; les inconvénients tels que l’intermittence sont majorés. Contestable sur le fond, ce rapport l’est autant sur la forme, ne serait-ce que sur le panel d’acteurs auditionnés (pas de PME, pas d’usagers). Le président François Hollande s’est pourtant engagé, lors de sa campagne, à faire respecter une déontologie et une éthique dans la conduite des politiques publiques. Un débat réellement ouvert sur l’énergie aurait pu être fondé à partir de sources d’expertises pluralistes (GIEC, Global Chance, Négawatt) afin d’enrichir le cadre de réflexion et sortir du dogme de l’énergie « peu chère » qui était le pilier des Trente Glorieuses, et qui ne peut plus l’être !

A la veille de l’ouverture de la conférence environnementale, les signaux délivrés ne sont pas des plus optimistes… mais un changement de cap est toujours possible !

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