Billet de blog 13 novembre 2009

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Corruption: ne manquons pas le rendez-vous de Doha!

Une conférence, réunie en ce moment au Qatar, est sur le point d'adopter un mécanisme qui permettrait de vérifier la mise en œuvre par les Etats de leurs engagements contre la corruption, signale Jacques Terray, vice-président de Transparence-International pour la France.

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Une conférence, réunie en ce moment au Qatar, est sur le point d'adopter un mécanisme qui permettrait de vérifier la mise en œuvre par les Etats de leurs engagements contre la corruption, signale Jacques Terray, vice-président de Transparence-International pour la France.

La corruption, grande ou petite, prive des millions de personnes de l'accès aux biens publics que sont l'éducation, la santé, la justice, la sécurité.

La convention des Nations unies contre la corruption, adoptée en 2003, a pour la première fois, apporté une réponse globale à ce fléau. Signée par 141 Etats, cette convention constitue un instrument unique, avec des dispositions couvrant tous les aspects de la lutte anti-corruption : de la prévention de la corruption dans les secteurs public et privé au recouvrement des avoirs et à la protection des victimes. La mise en œuvre effective de ces dispositions, par l'ensemble des Etats parties, est cependant loin d'être assurée. A ce jour, rien ne permet de vérifier - et de garantir - leur application.

L'avenir de la convention se joue donc aujourd'hui, avec la conférence qui réunit du 9 au 13 novembre, à Doha, au Qatar, les 141 Etats parties à la convention. Principal point au menu des discussions, l'adoption d'un mécanisme de suivi devant permettre de vérifier la mise en œuvre par les Etats de leurs engagements. Depuis l'entrée en vigueur du traité en 2005, les Etats parties ont, par deux fois, échoué à se mettre d'accord sur ce point.

Si un consensus existe enfin pour la création d'un tel système, des désaccords subsistent en revanche quant à ses modalités pratiques. La transparence des évaluations constitue le principal point d'achoppement. Or sans un processus transparent, l'efficacité du suivi ne pourra être assurée, menaçant alors sérieusement la crédibilité de la convention.

Qu'entend-on par mécanisme efficace ?

Trois conditions doivent notamment être réunies. Tout d'abord, pour garantir l'impartialité des évaluations, les citoyens les plus vulnérables à la corruption doivent pouvoir faire entendre leur voix par le biais de la société civile. Possibilité doit ainsi lui être donnée, ainsi qu'au secteur privé, de prendre part au processus d'évaluation. L'équipe de suivi doit par ailleurs pouvoir effectuer des visites de terrain et s'entretenir de vive voix avec les acteurs.

Enfin, dernier point essentiel, les rapports doivent être rendus publics. La publicité permet en effet aux citoyens et aux Etats tiers d'exercer leur pouvoir de contrôle et de faire pression sur les Etats les plus en retrait pour qu'ils appliquent effectivement leurs engagements. De tels mécanismes ont déjà fait leurs preuves. Des systèmes d'évaluation respectant ces trois conditions existent pour la plupart des conventions anti-corruption et des standards anti-blanchiment (Conseil de l'Europe, OCDE, GAFI, etc.).

Alors qu'un grand nombre de gouvernements reconnaît la nécessité d'un mécanisme crédible, un groupe restreint de pays s'oppose farouchement à la participation de la société civile et à la publication des rapports. Ces Etats prônent à l'inverse l'instauration de questionnaires, en lieu et place de visites de terrain, auquel répondraient directement, et de manière strictement confidentielle, les Etats visés. Si cette opposition arrive à fédérer d'autres Etats, le risque est grand qu'un mécanisme a minima soit adopté. Ce serait alors un échec cuisant pour la convention, qui marquerait un coup d'arrêt aux progrès déjà réalisés en matière de lutte contre la corruption.

Pour juguler ce risque, de nombreux acteurs de la scène internationale se sont mobilisés. Transparency International, au sein d'une coalition de plus de 300 organisations, multiplie les appels à la communauté internationale pour qu'elle ne cède pas à ces pressions et, au contraire, fasse preuve de détermination. Par ailleurs, près de 100 parmi les plus importantes multinationales du secteur privé se sont exprimées en faveur d'un mécanisme crédible et efficace. Les entreprises - on a tendance à l'oublier - peuvent en effet aussi être victimes de la corruption. Le G20 a également lui-même réclamé, en septembre dernier, l'adoption d'un mécanisme d'examen « efficace, transparent et profitant à tous ».

Nous formulons le vœu que cette mobilisation parviendra à assurer, demain, le succès de la Conférence de Doha.

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