Billet de blog 17 août 2009

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L'écologie pour transformer la gauche

Les Verts se retrouveront pour leurs journées d'été du 20 au 22 août à Nimes. A la veille de leur rentrée politique, Dominique Voynet, sénatrice de Seine-Saint-Denis, maire de Montreuil, et Mickaël Marie, secrétaire national adjoint et trésorier national des Verts, livrent dans un texte programme leur vision de la suite: les écologistes ne peuvent pas «se contenter de disputer [aux socialistes] la place de premier parmi les perdants» tout comme ils «n'ont pas le droit de se désintéresser de la nécessaire refondation de la gauche».

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Les Verts se retrouveront pour leurs journées d'été du 20 au 22 août à Nimes. A la veille de leur rentrée politique, Dominique Voynet, sénatrice de Seine-Saint-Denis, maire de Montreuil, et Mickaël Marie, secrétaire national adjoint et trésorier national des Verts, livrent dans un texte programme leur vision de la suite: les écologistes ne peuvent pas «se contenter de disputer [aux socialistes] la place de premier parmi les perdants» tout comme ils «n'ont pas le droit de se désintéresser de la nécessaire refondation de la gauche».

Illustration 1

Sans doute bon nombre de sympathisants de gauche, au soir des élections européennes du 7 juin, ont-ils éprouvé des sentiments mêlés. De joie évidemment, pour celles et ceux qui espéraient ce rebond des écologistes. D'inquiétude aussi, face à l'écroulement — en France et en Europe — des socialistes et sociaux-démocrates. Car pour qui demeure soucieux de l'Histoire et des valeurs de la gauche, quels qu'aient été les manquements de celle-ci à ses promesses, un tel effondrement n'est pas une bonne nouvelle.

La tentation de ne voir dans l'échec qu'un accident semble écartée. C'est déjà un point d'appui. Il s'est passé quelque chose le 7 juin, qui ne tient pas simplement au succès d'un homme, d'un casting ou d'une stratégie, si justes qu'ils aient été ; quelque chose qui trouve ses racines dans les combats écologistes des trente dernières années, les alertes et les coups de semonce, la conscience plus grande de la vulnérabilité de notre monde et du destin commun de ses habitants. Les écologistes ne se sont pas contentés de kidnapper, ce jour-là, le désarroi d'électeurs privés de repères ; ils ont récolté une part, venue à maturation, de ce qu'ils sèment depuis longtemps.

Lucides, nous mesurons ce que ce succès peut avoir de fragile. Nous nous gardons bien de moquer les difficultés du premier parti de gauche. Nous comprenons, pour l'avoir éprouvée, la douleur de la défaite. Elle ne justifie, ni les commentaires ironiques sur « le bio et les radis », ni les mises en garde contre les archaïsmes dont l'écologie serait porteuse. Reléguer au rang d'amusements exotiques les diagnostics — justes — que les écologistes ont longtemps portés seuls, n'est pas seulement injuste et exaspérant. A l'heure où les milieux d'affaire retrouvent les comportements «d'avant la crise», à l'heure où les diverses familles de la droite se rassemblent avec l'ambition affichée de parachever leur main-mise sur le pays, céder à cette facilité n'aide en rien les socialistes à se hisser au delà de leur propre désarroi.

Prendre la mesure du défi consiste d'abord, pour les uns et les autres, à admettre une communauté de destin politique. Chacun de leur côté, jouant les uns contre les autres, ni les écologistes ni les socialistes ne pourront prétendre conquérir une majorité dans les urnes. Les citoyens, dont nous — écologistes et socialistes — prétendons porter les aspirations, ne veulent pas d'une compétition où nous nous disputerions simplement la place de premier parmi les perdants. Qu'on ne se méprenne pas : la question n'est pas de positionnement électoral, et ne peut pas trouver sa réponse dans le chantage à l'union systématique de toutes les forces de gauche à toutes les élections, dès le premier tour. Il est sain, juste et utile, dans une démocratie adulte, que puissent s'exprimer au premier tour (où l'on choisit, lorsqu'au second on ne peut plus qu'éliminer) différents projets, permettant ainsi aux électeurs d'arbitrer, parmi ces projets, celui qu'ils veulent voir mis en œuvre en leur nom.

Nous en tirons d'ores et déjà deux leçons. La première s'adresse aux socialistes, qui doivent comprendre qu'ils ne peuvent plus prétendre seuls au gouvernement de la gauche ; convoquer, l'air de rien, les formations de gauche pour les inviter à la constitution d'une très hypothétique maison commune ; et résumer l'union de la gauche à l'alignement de tous sur le projet d'un seul, amendé de quelques ornements identitaires concédés aux plus petits pour que passe la pilule de l'hégémonie du plus gros. Cette attitude est d'autant moins souhaitable que la social-démocratie souffre d'une absence de véritable projet, et d'un essoufflement idéologique qui poussa certains, naguère, à considérer que le projet qu'ils devaient défendre n'était même plus « socialiste ».

Les écologistes, quant à eux, n'ont pas le droit de se désintéresser de la nécessaire refondation de la gauche. Comment le nier ? La tentation de bâtir une citadelle victorieuse au premier tour, pour se désintéresser du second et de la constitution de majorités de gouvernement, existe. Nous n'entendons pas y céder : si les écologistes ont l'intention de porter, lors du premier tour des élections régionales, leur propre projet, c'est parce qu'ils considèrent que le gouvernement des régions par les majorités de gauche qui se constitueront au second tour sera d'autant plus efficace que l'impératif de transformation écologique aura été porté haut et fort au premier tour. Il ne s'agit donc pas d'isoler dans sa pureté un message qui serait corrompu s'il s'additionnait à d'autres, mais de permettre aux électeurs de dire quelle dose d'écologie ils veulent intégrer à un projet de gauche, capable de répondre aux désordres du monde.

Si écologistes et socialistes savent entendre ces leçons, nous serons en droit de penser qu'il reste un chemin praticable pour l'emporter en 2012. Ce nouveau visage de la gauche n'a rien de certain. Mais c'est « l'audace même de la tentative », pour reprendre les mots de Jean Jaurès, qui pourra faire son succès.

Le socialisme a incarné depuis plus d'un siècle les espérances de millions de citoyens, de travailleurs, de pauvres. En France, en Europe, dans le monde. Les partis sociaux-démocrates ont été — et voudraient l'être encore — un bouclier protecteur des désordres et de la violence du capitalisme. Ils ne le peuvent plus, faute d'avoir compris la portée de la crise écologique, et la manière dont celle-ci bouscule la distribution des richesses et les outils traditionnels des solidarités.

Nous savons désormais la gravité et l'urgence des périls qui menacent l'humanité. Rien n'est caché : c'est une vérité qui dérange, mais c'est une vérité connue. Face à elle, les analyses, les réponses et les traditions d'hier ne peuvent plus suffire.

Il revient aux écologistes de les transformer. C'est la condition d'une véritable fidélité aux promesses, aux valeurs et aux aspirations fondatrices de la gauche, qui ont mobilisé dans le monde et dans l'Histoire tant et tant de volontés. Une écologie populaire, audacieuse et responsable, pour prolonger les espérances du siècle dernier dans notre siècle, en refusant pour les habitants du monde le destin des îliens de Tuvalu menacés par le dérèglement climatique ou des pauvres de la Nouvelle Orléans prisonniers de l'ouragan Katrina ? Plus que jamais, nous sommes prêts.

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