Billet de blog 20 septembre 2011

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Mme Merkel, 43 millions d'Européens ont besoin d'aide

Estelle Grelier, députée européenne (PS), réagit à l'échec des négociations entre ministres de l'Union sur le Programme alimentaire d'aide aux plus démunis, menacé de démantèlement par la position de six pays, dont l'Allemagne.

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Estelle Grelier, députée européenne (PS), réagit à l'échec des négociations entre ministres de l'Union sur le Programme alimentaire d'aide aux plus démunis, menacé de démantèlement par la position de six pays, dont l'Allemagne.

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Madame la Chancelière,

Le Conseil des ministres européens de l'Agriculture et de la Pêche, qui s'est tenu le 20 septembre à Bruxelles, était crucial pour l'avenir du Programme alimentaire européen d'aide aux plus démunis (PEAD) mis en place au milieu des années 1980, à la «faveur» d'un hiver particulièrement rigoureux.

Pourtant, aucun n'accord n'a été trouvé pour empêcher l'extinction progressive d'un dispositif qui a fait ses preuves et qui peut s'avérer vital pour les quelques 80 millions de citoyens européens menacés de pauvreté, et plus encore pour les 43 millions d'entre eux qui sont menacés de pénurie alimentaire. A l'heure actuelle, 13 millions d'européens provenant de 19 des 27 pays de l'Union bénéficient effectivement des denrées fournies par le PEAD. Le problème reste donc entier et rend cette lettre d'autant plus importante.

Les incertitudes qui pèsent sur l'avenir de ce dispositif, avec, en l'état et dès l'année prochaine, une diminution programmée des crédits alloués de l'ordre de 75%, résultent d'une décision de la Cour de Justice de l'Union européenne.

Ce jugement a été rendu à l'issue d'une procédure qui a été initiée notamment par l'Allemagne. Ce verdict a donné raison aux plaignants, lesquels considèrent que le PEAD dépasse les prérogatives de la Politique agricole commune (PAC). Mais il ne valide pas pour autant la thèse selon laquelle les politiques de solidarités en direction des plus démunis devraient relever de la seule responsabilité des Etats, pour la plupart lourdement endettés.

L'Union européenne consacre actuellement 1€ par habitant et par an pour défendre le principe, élémentaire et fondamental, du droit à l'alimentation de ses citoyens. Est-ce vivre au-dessus de nos moyens que de consacrer 1€ par habitant et par an pour permettre aux millions d'européens qui n'ont pas les moyens de se nourrir de pouvoir le faire à peu près dignement ?

Le problème qui nous préoccupe suscite beaucoup d'émotion au sein de l'opinion publique et des associations caritatives. Ce problème n'est plus d'ordre technico-juridique ou budgétaire. Il est devenu profondément politique. Il pose en effet la question des valeurs et du sens du projet européen que nous voulons défendre, mais aussi celle du modèle de développement et de société que nous voulons léguer à nos enfants.

Prendre prétexte de difficultés techniques et juridiques pour démanteler ce dispositif d'aide alimentaire est désastreux pour les populations concernées. Cette situation entache gravement la crédibilité et l'image de l'Union.

Les citoyens ont l'impression que l'UE en général, et l'Allemagne en particulier, consacrent beaucoup d'énergie et de moyens pour rassurer les marchés financiers et assurer la stabilité de la zone euro, mais qu'elles en mobilisent peu pour porter secours aux populations les plus durement frappées par la crise. Cet état de fait alimente un sentiment d'injustice et de défiance à l'égard des institutions européennes.

Fervente européenne, sincèrement attachée à défendre et à promouvoir l'amitié franco-allemande et les valeurs de l'Union, ayant la responsabilité de représenter les 500 millions d'habitants qui peuplent notre territoire, je vous demande solennellement de bien vouloir prendre les initiatives nécessaires pour maintenir à son niveau actuel, sous une forme ou sous une autre, l'aide alimentaire européenne en faveur des plus démunis.

Vous remerciant par avance de l'attention que vous voudrez bien porter à cette requête, je vous prie d'agréer, Madame la Chancelière, l'assurance de ma considération distinguée.

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