Billet de blog 24 février 2010

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Au Quick de Roubaix, des consommateurs comme les autres

Face à des politiciens devenus «hors sol», Slimane Tir, conseiller municipal Vert de Roubaix et vice-président de Lille Métropole, souligne le succès commercial des hamburgers hallal, plébiscité par des Roubaisiens qui peuvent se restaurer dans une enseigne banale, «non ethnique».

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Face à des politiciens devenus «hors sol», Slimane Tir, conseiller municipal Vert de Roubaix et vice-président de Lille Métropole, souligne le succès commercial des hamburgers hallal, plébiscité par des Roubaisiens qui peuvent se restaurer dans une enseigne banale, «non ethnique».

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Les objectifs du business plan du Quick du centre-ville de Roubaix sont déjà largement dépassés, et les amateurs (trices) de hamburgers hallal y sont au rendez-vous, en couples, en famille, en groupes avec leurs copains de toutes confessions supposées. Quick a vraiment écrasé sa concurrence, dont les établissements sont quasi vides, l'opération commerciale est une belle réussite.

Compte tenu de la contribution du maire de Roubaix à ce succès, il faudrait, à tout le moins, que cette enseigne fasse un très gros don pour couvrir les frais d'avocat inconsidérément engagés sur le budget communal, pour une opération électoraliste. Car l'agitation judiciaire permet de brandir des leurres et de gagner du temps mais se terminera très bientôt en déroute.

Face aux risques de Bérézina morale et de contre effet électoral, auxquels la polémique qu'il a provoquée peut le conduire, le maire-candidat , «pyromane» comme le qualifie Claude Askolovitch dans son éditorial du Journal du Dimanche, recherche «une sortie par le haut» avec Quick, depuis ce week-end.

Enfin, tant mieux que la réflexion, la raison et la discussion reprennent le dessus. Mais attention aux fausses bonnes idées !

Au moment où le hallal se banalise dans une enseigne du «business normal», en proposant à Quick d'ouvrir un «fast food spécial bacon» (c'est mon expression, pas la sienne), il révèle sa préférence pour le commerce ethnique (tant que c'était un «arabe» qui faisait du burger hallal, par exemple, comme Flash burger, ce n'était pas un problème : il n' y avait pas matière ni à polémique, ni à discrimination).

La transgression de Quick (car il s'agit bien de cela), c'est d'avoir osé assumer la banalisation de ces produits dit «hallal», et donc de la clientèle visée, d'avoir osé la banalisation du ciblage du consommateur musulman concret dans l'espace public du centre ville.

En plébiscitant l'initiative de cette enseigne, ces consommateurs nous parlent de leur désir d'être respectés (considérés comme les autres), et même assimilés, en ayant la possibilité de manger «hallal» justement dans un établissement «non ethnique». Ils sont, au fond, des consommateurs comme les autres, qui veulent «bouffer» comme tout le monde, y compris de la «malbouffe». Consommer, en quelque sorte, dans les temples banalisés de la consommation et sortir de l'offre «ethnique».

Nos pseudo-gardiens du temple républicain n'ont ils pas compris cela ou ne veulent pas l'entendre ?

Le centre ville est un secteur commercial, qui présente une offre de restauration diversifiée. Il est socialement et sociologiquement partagé.

L'essentiel, pour des élus responsables, réside dans le fait que cette diversité d'offre soit maintenue, promue, voire publiquement encouragée et subventionnée, le cas échéant. Toutes les études de marché ne font-elles pas état d'une insuffisance de l'offre de restauration le midi, très faible en soirée, beaucoup trop faible pour une ville de 100 000 habitants ?

Les moyens financiers publics (de l'Etat, du Conseil régional Nord-Pas-de-Calais, de la Communauté urbaine de Lille, de la Caisse des dépôts...), en raison des difficultés sociales de notre population, n'ont-ils pas été massivement déversés sur Mac Arthur Glen, Géant et sa galerie commerciale (plus de 200 millions d'euros), à juste raison, pour redresser l'infrastructure commerciale du centre ville ?

A ce stade de cette détestable affaire, les dégâts sont déjà immenses. Les postures irresponsables ont fait au moins quatre victimes :
- l'image de notre ville, considérablement dégradée
- le concept de discrimination, «appliqué à une tranche de bacon», détournement indigne dans une ville au sein de laquelle une partie importante de la population souffre cruellement de la discrimination au patronyme, au faciès, à l'origine, au quartier de résidence
- la laïcité, qui est curieusement mobilisée dans cette affaire de sandwich, burqua sémantique de xénophobes prétendument républicains
- la concorde civile roubaisienne et l'éthique de l'engagement civique et électif.

Espérons que cette affaire, justement par l'émotion et la colère qu'elle a provoquées, sera un électrochoc salutaire et qu'elle engendrera un sursaut.
Qu'elle fasse prendre conscience à nos concitoyens(nes) que la politique est une affaire trop sérieuse pour la laisser aux seuls politiciens, de plus en plus «hors sol».

Que s'élèvent, enfin, à Roubaix, publiquement, des voix et des militant(e)s dans toutes les familles politiques humanistes et démocrates pour crier : ça suffit !

Débattons de l'essentiel et occupons nous des vrais problèmes de notre ville.

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