La Grande-Bretagne a voté jeudi. La Loire-Atlantique a voté dimanche. Et si la France, à son tour, votait dans un futur très proche ? Un vote qui permette de trancher la grande question de ce printemps : la loi travail ! Cette piste nous l’avons évoqué pour la première fois quand la situation était particulièrement tendue dans la rue. Notre appel n’a pas été entendu jusqu’à présent, il n’est pas trop tard pour que l’exécutif prenne un peu de recul.
Un projet de loi en panne de légitimité
Nous sommes opposés à la loi travail mais nous proposons une sortie de crise par le haut, qui est dans l’intérêt même du Président de la République. On pourrait lui préférer un retrait pur et simple mais ce serait une défaite pour l'exécutif qui signerait l'échec total de cette opération politique. Ce projet de loi, imaginé l'an dernier mais reporté à cette année après le passage en force de la loi Macron, ne répond à aucune nécessité. Ce projet est une mise en scène de la volonté « réformatrice » de l'exécutif pour rassurer Bruxelles et les surveillants généraux de l’Europe disciplinaire. Pour compenser l'échec de la stratégie française de redressement des finances publiques, les 3% de déficit sont en effet renvoyés à 202O, l'exécutif a dû rassurer sur sa volonté et sa capacité « réformatrice » en proposant une troisième loi travail en rupture avec les deux précédentes, Sapin (2013) et Rebsamen (2014): absence de dialogue social, inversion de la hiérarchie des normes et facilitation des licenciements. Logiquement cette loi a été radicalement contestée par des millions de manifestants au cours des nombreuses manifestations organisées par l’intersyndicale. La situation politique s’est dégradé quand le gouvernement a constaté qu’il n’avait aucune majorité à l'Assemblée nationale, ni sa majorité de gauche originelle ni une majorité de rechange au centre, et qu’il a déclenché le 49.3 avant même l’examen du premier article. Comment prétendre légiférer dans de telles conditions ? Les sénateurs de droite ont permis à l’exécutif de jouer à « Au secours la droite revient ! » mais la manœuvre ne trompe personne. L'annonce d'une primaire autour du Parti Socialiste a donné un gage de démocratie à quelques députés socialistes, mais l’effet a été immédiatement annulé par la tentative d'interdiction des manifestations. Il n'est pas raisonnable de légiférer dans ces conditions.
La référendum comme sortie de crise par le haut
Plutôt qu'un nouveau recours au 49.3, nous proposons d'utiliser l'article 11 de la Constitution celui qui permet les référendums législatifs, y compris depuis 1995 sur des questions économiques et sociales. Dans une crise de légitimité, la solution la plus juste doit être de rendre la parole au peuple. Il n'y a que deux façons : la dissolution qui ne serait qu’une manœuvre politicienne à moins d'un an de la fin du mandat et le référendum législatif. Faire trancher cette question par le peuple serait une option gagnante pour l'exécutif. Non que le succès soit assuré….loin de là. Aujourd'hui l'opinion exprimée par voie de sondages n'est pas favorable au projet de loi mais le choix courageux de la clarté serait mis au crédit du Président de la République. C’est cette capacité décisive d’arbitrage qu’on attend d’un chef de l’Etat. Le référendum constituerait une sortie par le haut de cette crise de 6 mois.
Une République adulte, des citoyens au centre
Les peuples sont adultes et l'usage du référendum doit être dédramatisé. Le changement de ligne politique opéré à l'hiver 2012-2013 et aggravé tous les ans a progressivement creusé un fossé au sein de la gauche. Les référendums n'ont pas bonne presse. La critique usée du populisme vient de s'abattre sur les libres électeurs britanniques qui ont choisi. « Trop vieux », « Pas assez métropolitaines », « Trop pauvres ».de ce côté-ci de la Manche, on aura tout entendu sur les électeurs du Brexit. En Loire-Atlantique, on a vu la critique habituelle en légitimité : mauvais périmètre, mauvais calendrier… tout est prétexte aux incorrigibles gauchistes pour refuser de se sentir liés par un quelconque vote majoritaire.
Ce déferlement de critiques sur les deux référendums nous conforte au contraire dans notre conviction que le recours au référendum législatif est la solution. Au-delà du projet de loi travail, il faudra s'habituer à demander directement leur avis aux gens, plus souvent, de manière moins dramatique et plus tôt et sans attendre les situations de crise. Libérons le référendum de son originaire bonapartiste pour en faire l’instrument d’une République adulte dont les citoyens occupent réellement le centre et pas épisodiquement la Place de la République.