Association des Amis du Rosier Rouge
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"Attentats et catastrophes,
Le traumatisme psychologique chez les victimes et leur famille"
par le Dr CROCQ, médecin Général
Psychiatre, il a tout d'abord travaillé sur la névrose de guerre et sur les réactions des populations
sous bombardements, puis sur le traumatisme psychologique vécu lors de catastrophes, attentats,
agressions…
Ainsi, grâce à ses travaux, on sait maintenant que peut se développer suite à un traumatisme
psychologique une symptomatologie spécifique.
Mais avant de le décrire, qu'est-ce que le traumatisme psychologique ?
Le psychotraumatisme se définit comme un événement violent et brutal faisant irruption dans la vie
d'un individu ; il faut conserver à cet événement ses caractères d'exception ; les défenses
psychologiques de l'individu sont alors débordées.
La symptomatologie post-traumatique se devise en trois périodes : les réactions immédiates, le
temps de latence et les réactions tardives.
La réaction immédiate normale, sur un individu soumis à une situation inhabituelle est la réaction
biophysiologique et psychologique, par libération d'adrénaline. Cette réaction est utile puisqu'elle
est focalisatrice d'attention, mobilisatrice d'énergie et incitatrice à l'action. Elle peut être
accompagnée de symptômes gênants : accélération du pouls, accélération du rythme respiratoire,
sueurs, envie d'uriner.
Dans le cas d'un psychotraumatisme, le stress peut être dépassé : on verra alors des individus
s'installer dans une sidération, ou au contraire dans une agitation : certains adopteront une fuite
panique ou alors des actions automatiques. Ce sont ces individus soumis à une réaction de stress
dépassé qu'il faut soigner sur le terrain. Puis, dans les heures ou les semaines suivant le
psychotraumatisme, peut se développer une pathologie post-immédiate sous forme de décharges
émotives différées (crise de larmes, abattements, irritation…), de queues de stress durant plus
longtemps, un repli sur soi ou au contraire une euphorie ces symptômes sont également à prendre en
compte.
Puis, débute une période qui est le temps de latence, où apparemment il ne se passe rien.
Elle peut durer de 15 jours à 6 mois ou 1 an (même trois ans dans le cas des déportations). Pour un
observateur averti, cette période n'est pas si neutre que cela, c'est pourquoi il faut assurer un suivi
des individus.
Puis, peut s'installer le syndrome post-traumatique avec son cortège de symptômes spécifiques et de
ceux non spécifiques. Le syndrome de répétition est spécifique : il se manifeste par des
hallucinations, des souvenirs forcés, des ruminations, des tics, des sursauts ou des cauchemars ; et
ceci spontanément ou de manière provoquée (stimulus, anniversaire)…
Les symptômes non spécifiques sont les suivants : asthénie, anxiété, symptômes psychonévrotiques
troubles psychosomatiques, troubles des conduites.
A cette symptomatologie peut s'associer une modification de la personnalité en personnalité
traumatique : blocage de la fonction de filtrage, blocage de la fonction de présence, démotivation,
blocage de la fonction d'affection.
L'histoire naturelle de la maladie ainsi décrite amène à deux sortes de réflexion :
1. Les individus ayant vu leur vie basculer par un psychotraumatisme sont malheureux et souffrent
d'une vraie maladie, qui n'a été reconnue par décret en tant que telle qu'en 1992 (reconnaissance de
la névrose de guerre).
2. La connaissance précise des symptômes et de leur évolution permet d'intervenir efficacement à
chaque étape du développement de la maladie, d'informer les individus ainsi que l'entourage, les
sauveteurs, les témoins qui eux-mêmes peuvent être choqués.
Que faire sur le terrain, et ensuite ? En dehors des soins somatiques, il faut rassurer et faire parler ;
informer sur les symptômes présents et à venir, revoir l'individu si nécessaire dans les jours suivants
vers les consultations spécialisées. C'est la mission des cellules d'urgence médico-psychologiques,
initiées par le Docteur Louis CROCQ en 1995 et qui interviennent sur le terrain.
Le thème de cette conférence était une bonne opportunité puisque si le psychotraumatisme est
tristement d'actualité de par le monde, il l'est aussi pour le Rosier Rouge qui accueille régulièrement
des victimes de guerre et d'attentats (Liban, Algérie…) pour lesquelles un accompagnement
particulier s'avère nécessaire.
compte-rendu par le Dr. Pascale Bouthillon-Heitzmann- 10/03/95