Billet de blog 15 novembre 2013

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Prolonger les centrales ou se tourner vers les énergies propres, il faut choisir !

« Au lieu d’investir des dizaines de milliards dans le rafistolage de réacteurs vieillissant, ne serait-il pas plus urgent de miser radicalement sur les économies d’énergie et les énergies renouvelables? », s'interroge le réseau Sortir du nucléaire.

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« Au lieu d’investir des dizaines de milliards dans le rafistolage de réacteurs vieillissant, ne serait-il pas plus urgent de miser radicalement sur les économies d’énergie et les énergies renouvelables? », s'interroge le réseau Sortir du nucléaire.


Dans son discours de clôture de la conférence environnementale, Jean-Marc Ayrault suggérait de « financer la transition énergétique » grâce au nucléaire, en mettant les centrales à contribution « pendant toute [leur] durée de vie restante ». Peu après, une « fuite » parue dans le Journal du Dimanche évoquait une décision prochaine d’octroyer à EDF le feu vert pour une prolongation « comptable » de la durée d’amortissement des réacteurs à 50 ans.

Malgré les démentis de Philippe Martin, affirmant que « ce ne sont pas les commissaires au compte d’EDF qui détermineront la politique énergétique de la France », il n’y a pas de quoi être rassurés ! Entre les protestations des uns, les allusions des autres, le possible renvoi aux discussions sur la loi de transition énergétique, ce flottement montre bien l’absence d’une ligne de conduite claire. Ou plutôt, à voir la manière dont le gouvernement met en œuvre la réduction de la part du nucléaire promise (en l’absence de fermetures de centrales, la seule manière de réaliser cette promesse passant par… une augmentation massive des autres énergies et donc des consommations, absurde en période de crise économique et qui augmenterait les émissions de gaz à effet de serre !), cette ligne n’est que trop claire : après des protestations de forme, finir par s’aligner sur les demandes d’EDF.

EDF compte en effet bel et bien sur une prolongation de la durée d’activité de ses réacteurs – une prolongation qui ne sera pas seulement « comptable », mais effective, avec l’ambition de pouvoir même pousser jusqu’à 60 ans les réacteurs qu’il souhaite. Et il a déjà prévu, à cet effet, d’injecter plus de 50 milliards d’euros dans un programme de travaux pompeusement appelé « grand carénage ».

Or dans toutes ces discussions, le principal enjeu n’est pas évoqué : les risques inacceptables que ferait courir à la population une telle prolongation, en dépit de tous les travaux de rafistolage possible. Le vieillissement des réacteurs est un processus mal connu et incontrôlable, d’autant qu’aucune centrale dans le monde n’a encore atteint les 50 ans. Surtout, rappelons qu’à l’origine, la durée de fonctionnement annoncée des réacteurs était de 30 ans – durée qu’une vingtaine d’entre eux ont déjà dépassée, atteignant actuellement leurs limites physiques. Comment EDF et Jean-Marc Ayrault peuvent-ils envisager sereinement de les faire fonctionner jusqu’à 50 ans, sachant que les cuves des réacteurs – qui ne peuvent être remplacées – ne sont conçues pour résister qu’à 30 ans d’irradiation à pleine puissance, et que même l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire, en 2010, prévenait de risques de ruptures de cuves passé 35 ans de fonctionnement ?

Comment parier sur une telle roulette russe pour « financer la transition énergétique », sachant qu’un accident nucléaire pourrait coûter l’équivalent de 2 ans de PIB à la France ? Au lieu d’investir des dizaines de milliards dans le rafistolage de réacteurs vieillissant, ne serait-il pas plus urgent de miser radicalement sur les économies d’énergie et les énergies renouvelables, seuls moyens de répondre efficacement aux défis climatiques et énergétiques – et d’ailleurs bien plus créatrices d’emplois que le nucléaire ?

Tout le temps qu’EDF compte gagner en repoussant l’échéance de la fermeture des réacteurs vieillissants est en fait du temps perdu qui ne se rattrapera pas. C’est maintenant qu’il faut fermer les réacteurs vieillissants et commencer la sortie du nucléaire, pour supprimer le risque et laisser aux alternatives une chance de se développer.

Qui décide sur ces questions qui mettent en jeu la sécurité des Français ? Sont-ce les intérêts à court terme ou l’intérêt général ? À quoi cela sert-il que la loi sur la transition rende au politique le pouvoir de décider d’une fermeture de centrale si c’est pour céder face à EDF ? En cas d’accident, ce gouvernement devra dans tous les cas assumer ses non-choix et ses renoncements.

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